Trois jeunes stars face à la tourmente de l’intervention US en Afghanistan. Trop larmoyant.
Si le grand film romanesque de cet hiver reste Bright Star de Jane Campion (message grossier à l’usage des sceptiques : même le marquis de Sade portera du liberty après avoir vu ce film, tant il met en scène une vision exemplaire de l’amour), Brothers, le nouveau film de Jim Sheridan (Au nom du père et My Left Foot), était pourtant attendu.
On espérait beaucoup, sur la seule foi d’un nœud passionnel heureusement trouvé (une femme entre deux hommes) et d’un casting inédit qui promettait des situations nouvelles pour des acteurs ayant fait fortune sans jamais se rencontrer jusqu’ici : un Spider-Man en voie de reconversion civile (Tobey Maguire), une reine de beauté au port de tête sensuellement impérieux (Natalie Portman), un beau gosse au parcours plutôt indépendant (Jake Gyllenhaal).
Un marine (Maguire) très amoureux de sa femme (Portman) part faire la guerre en Afghanistan, laissant derrière son frère, mouton noir de la famille tout juste sorti de prison (Gyllenhaal). Maguire sera fait prisonnier par des talibans et tenu pour mort par l’armée américaine. Sa femme et son frère, unis par le chagrin, tombent amoureux l’un de l’autre.
Une triple tension (le conflit des deux frères, le retour inattendu du mari vivant, le secret d’une dégueulasserie faite pendant la guerre) devrait créer des scènes prenantes par leur haut potentiel de gêne et par l’exploration des voies impensables du désir (comment dire à son mari qu’on a aimé son frère honni ? comment dire à sa femme qu’on a cédé aux abjections de la guerre ? comment revenir quand plus personne ne vous attend ? comment aimer à nouveau un homme qu’on a enterré ?).
Jim Sheridan les élude à grands coups de serpe, ménageant certes quelques moments où le scandale prend de court le spectateur, mais les noyant le plus souvent dans un récit qui pratique l’évitement. Mauvais conteur ? Oui, certainement. Mais aussi cinéaste obsédé par le seul pardon, ce moment où la traîtrise se résorbe dans la chaleur de l’absolution, et qui en oublie de construire le long chemin qu’il aura fallu pour arriver jusque-là.
Quant au trio de stars, il se coule sans difficulté dans les situations paroxystiques du monde des adultes, mais avec un reste de juvénilité malhabile (Maguire roule trop des yeux, Portman s’appuie sur une psychologie conventionnelle, Gyllenhaal peine à faire le méchant) qui manque de poisse.