La cinquième et dernière saison des aventures de Walter White a commencé sur les chapeaux de roues. Elle devrait trouver sa place au panthéon des fins de séries.
Une série qui vieillit bien. Rare. Avec sa cinquième saison débutée depuis un mois, Breaking Bad relève le gant. Avec brio. Il y aura peut-être des épisodes moins forts que d’autres au fil de cette ultime livraison étirée sur deux étés (la deuxième partie arrivera en 2013), mais le créateur Vince Gilligan et sa petite équipe soudée, presque la même depuis les débuts de la série, semblent parfaitement maîtriser le monstre narratif qu’ils ont créé. Les scènes s’enchaînent avec une précision redoutable.Comme dans les sports collectifs, un plan de jeu a été mis en place et il faut le respecter.
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http://www.youtube.com/watch?v=PYErgUu95HA
Breaking Bad c’est désormais l’histoire d’un homme que la terre entière, personnages et spectateurs compris, déteste plus que tout. Magistral retournement de perspective. Le prof de chimie irréprochable accablé par un cancer le lendemain de ses cinquante ans, obligé en raison d’un système de santé publique indigent de débuter une carrière de fabricant de métamphétamine, n’est plus qu’un effarant pourri. Foin de compassion, le côté obscur de la force l’a emporté. L’avilissement de Walter White, en germe depuis au moins trois saisons, atteint un point de non-retour. Le néoparrain n’a désormais plus une once d’empathie et nous non plus. La quatrième saison avait sonné le glas de son rival, l’effrayant Gus Fring, l’un des meilleurs méchants de l’histoire des séries avec le mémorable Ben Linus de Lost. “Mister White”, comme l’appelle son jeune partenaire Jessie, est aujourd’hui le seul maître du jeu.
Les fascinants premiers épisodes de cette cinquième saison montrent un homme qui ne se rend plus tout à fait compte de l’image qu’il renvoie. Walt se promène avec un bandage sur le nez qui le fait ressembler à Jack Nicholson dans Chinatown. Il mate la scène finale de Scarface en piaffant, avec son fils ado et son bébé de quelques mois dans les bras. Il fait joujou avec des voitures de nouveau riche. Il prétend relancer son business pour le bien-être de sa famille, mais plus personne n’est dupe. Passé de l’autre côté, Walt évolue dans une autre dimension, presque étranger au réel. Breaking Bad décrit ce basculement vers un monde parallèle bizarre avec une acuité incroyable, à la fois drôle et flippante, ce qui la fait ressembler de plus en plus à une série de science-fiction, même si elle n’en reproduit pas directement les codes – Vince Gilligan a appris son métier auprès de Chris Carter, monsieur X-Files: l’inspection brutale de l’effondrement d’une famille, perçue comme une petite communauté toxique, continue.
C’est la force de la série. Pour Walter White, la chute, si chute il y a, viendra non pas des ennemis de l’extérieur mais certainement de ses proches : son beau-frère, évidemment, Américain moyen et flic brillant qui devrait finir par le coincer ; son associé, Jessie, de moins en moins naïf à mesure qu’avancent les épisodes ; et enfin sa femme, Skyler, personnage tragique auquel ce début de saison redonne toute sa place. Dans le sublime quatrième épisode, Breaking Bad se transforme grâce à cette blonde triste en un précis de terreur conjugale parfaitement effrayant.
Breaking Bad saison 5. Jusqu’au 2 septembre sur AMC. A l’automne sur Orange cinéma séries.
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