Le cheval le plus mélancolique d’Hollywood (ou plutôt d’Hollywoo) revient pour une cinquième saison décapante, qui chronique à sa façon les retombées de l’affaire Weinstein. La meilleure série d’animation de ces dernières années est-elle toujours au top ?
C’est en août 2014 que nous découvrions, hilares, les tribulations tragi-comiques de BoJack Horseman, homme-cheval à la vie dissolue, ancienne star d’une sitcom à succès des années 90, trimballant ses sabots fatigués dans les dédales cartoonesques de Hollywoo, le pendant fictif, peuplé d’animaux anthropomorphiques, du célèbre quartier de Los Angeles, « mystérieusement » dépossédé de sa lettre finale.
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Quatre années et autant de saisons plus tard, la série d’animation de Netflix créée par Raphael Bob-Waksberg continue de fasciner. C’est que BoJack Horseman a su renouveler ses enjeux tout en gardant le cap de son intention infuse : dresser le portrait au vitriol d’une industrie du spectacle nombriliste et décadente, carburant à l’ego et aux psychodrames, peuplée d’acteurs has-been, d’influenceurs mégalos, de scénaristes ratés ou de producteurs véreux, tour à tour imbuvables et touchants, sous les traits d’humains comme d’animaux.
Back to Hollywoo
Après une quatrième saison bouleversante, négociant un virage existentiel osé, dans laquelle BoJack remontait le fil de ses origines pour faire face à ses traumas fondateurs, cette cinquième saison démarre sous de meilleurs auspices pour le canasson malotru. Ayant brigué le rôle titre d’une sulfureuse série policière , BoJack compte bien renouer avec sa gloire d’antan. C’était sans compter sur la ténacité de ses vieux démons – un alcoolisme notoire et une addiction vorace aux antidouleurs – qui l’amèneront, une fois n’est pas coutume, à saborder son come-back.
On retrouve dans cette saison les ingrédients ayant fait le succès du show – un humour à froid décapant, un maelstrom de références pop passées au filtre de l’absurde et des épisodes à forte teneur conceptuelle – auxquels s’ajoute le ton , plus sombre et préoccupé, défriché à partir de la troisième saison. Si BoJack apparaît plus autodestructeur et paranoïaque que jamais, c’est tout Hollywoo qui baigne désormais dans un spleen vaporeux.
#BalanceTonCheval
La série, dont on a vanté la capacité à s’emparer des sujets brûlants secouant le microcosme hollywoodien, était attendue sur sa manière d’aborder l’émergence du mouvement #MeToo. Qu’il s’agisse de l’ascension, aussi fulgurante que fortuite, d’un sex robot dysfonctionnel, constitué de godes bariolés, à la tête d’une start-up hollywooienne (tout un symbole), ou du féminisme spécieux, tout juste soluble dans les plateaux TV, dont BoJack devient malgré lui l’improbable porte-voix, la série s’attaque avec un cynisme féroce aux retombées de l’affaire Weinstein, brossant le portrait d’une industrie schizophrène, plus encline à sauver ses apparences qu’à déloger ses prédateurs.
Si l’on rit d’abord à gorge déployée, on est pris de court lorsque BoJack, dans le creux d’une crise de démence, devient lui-même l’objet du scandale. Ce mélange des genres, désinvolte mais jamais licencieux, fait tout le sel de cette cinquième saison, aussi prompte à dégainer un humour joyeusement potache qu’à instiller le malaise.
Bijou de créativité à la direction artistique faussement grossière, BoJack Horseman confirme une fois de plus son statut de série d’animation incontournable, et s’impose comme l’une des créations originales les plus réjouissantes du catalogue Netflix.
BoJack Horseman saison 5, disponible sur Netflix depuis le 15 septembre
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