Malgré un casting all-stars et James Gray au scénar, Guillaume Canet et son « Blood Ties » anesthésient le polar. Sortez les mouchoirs.
Le sujet
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En 2008, Guillaume Canet incarne l’un des premiers rôles des Liens du sang de Jacques Maillot, un polar à la française, un peu cheap et très anecdotique. Jugeant peut-être qu’il y avait là quelques scories à corriger, l’acteur devenu petit prince du box-office décide, cinq ans plus tard, d’en réaliser un remake à sa sauce. Comprendre : une version plus classe, cette fois-ci aux Amériques, avec un casting quatre étoiles (Clive Owen, Matthias Schoenaerts, Marion Cotillard…) et surtout un coscénariste de prestige (James Gray, dont on se demande bien ce qu’il peut faire dans cette galère). Pour le reste, c’est exactement le même film : une banale histoire circa 1970 de rivalité et d’amour contrarié entre deux frères, l’un, flic à la morale infaillible et la moustache bien peignée, l’autre, voyou au grand cœur.
Le souci
Affrontements virils, jalousies familiales et dilemmes moraux : Blood Ties lorgne du côté de la grande fresque romanesque et puise dans la grammaire classique du polar. Mais le rêve américain de Guillaume Canet a ses limites, qui sont celles d’un bon élève, appliqué, propre sur lui, éternel petit copiste. Tout est à sa place ici : la photographie vintage, les décors d’époque, la soul-funk infligée à chaque séquence, les cols pelle à tarte, les personnages de gangsters archétypaux et d’autres signes d’appartenance à la mythologie Scorsese. Il ne lui manque que l’essentiel, un point de vue, une idée sur le genre qu’il aborde, ou, à défaut, un peu de mise en scène. Car rien dans cette falsification de polar ne dépasse de la surface du plan, rien n’existe en dehors de la simple illustration publicitaire.
Le symptôme
On aurait tort cependant de nier à Guillaume Canet toute singularité. Il y a bien une signature identifiée chez l’auteur des Petits Mouchoirs, qui a ses obsessions (l’amitié entre hommes), ses perversions (faire pleurer Marion Cotillard, beaucoup) et sa lecture du monde, une forme de gentillesse naïve, de bienveillance un peu guimauve. Même lorsqu’il se frotte au genre rugueux du polar, qui exige une certaine cruauté, il ne peut pas s’empêcher d’arrondir les angles, de tempérer sa violence par quelques poussées de sensiblerie : ici une leçon de vie adressée à ses enfants par un père mourant, là une emphatique déclaration d’amour entre frères ou encore un dernier acte de sacrifice chevaleresque. C’est plus fort que lui : au Cap-Ferret comme dans le Bronx, chez les vacanciers comme chez les gangsters, la seule loi qui règne est celle de ce petit cœur qui bat.
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