Marine boys. Grâce à la mise en scène limpide d’Ustinov, Billy Budd restitue tout le sel métaphysique du roman de Melville. 1797 : la marine britannique et la marine française se livrent une guerre sans merci. A bord de L’Avenger, commandé par le capitaine Edward Fairfax Vere (Peter Ustinov, plutôt sobre et très convaincant en […]
Marine boys. Grâce à la mise en scène limpide d’Ustinov, Billy Budd restitue tout le sel métaphysique du roman de Melville.
1797 : la marine britannique et la marine française se livrent une guerre sans merci. A bord de L’Avenger, commandé par le capitaine Edward Fairfax Vere (Peter Ustinov, plutôt sobre et très convaincant en officier doucereux, suintant et fatigué), les hommes sont tous les jours victimes de l’arbitraire et du sadisme du maître d’équipage, l’inquiétant John Claggart (Robert Ryan, rongé par le Mal). Un jour, L’Avenger croise la route d’un petit bateau de commerce anglais au nom évocateur : The Rights of man. Une loi royale autorisant à recruter de force tout citoyen britannique apte au combat, le jeune mousse Billy Budd (Terence Stamp, dans le rôle qui a lancé sa carrière) se retrouve sur L’Avenger sans qu’on lui ait demandé son avis. Seulement Billy n’est pas un gars comme les autres. Son innocence, sa loyauté et sa franchise, mais aussi sa vigueur, sa timidité et surtout sa beauté exercent un pouvoir de séduction sur tous les membres de l’équipage. Mais aiguisent aussi la jalousie et attirent le mal. Claggart subit lui aussi le charme de Billy, mais décide de lui résister. Il accuse le jeune marin de fomenter une mutinerie.
De l’impressionnante et longue nouvelle d’Herman Melville, Peter Ustinov, plus connu pour ses numéros de cabotinage dans les péplums hollywoodiens, tire bizarrement tout le sel métaphysique qui s’y trouvait déjà, en CinémaScope et noir et blanc. Sa mise en scène est limpide et adroite pendant les trois premiers quarts du film. Bien et Mal s’affrontent maladivement sur ce navire symbolisant l’humanité et l’Ancien Régime corrompus, où les hommes sont des esclaves, les maîtres des intellectuels décadents imbus d’éthique mais incapables de dépasser leurs préjugés de classe pour faire triompher la vraie justice des hommes, celle qui repose sur la vérité et l’amour. Envahis par le doute, ils s’en remettent à la loi, quelle qu’elle soit. La figure angélique de Budd, très ambiguë et d’une grande modernité (il est victime de mutisme dès qu’il doit exprimer ses sentiments ou son bon droit), annonce le personnage qu’interprétera Stamp dans Théorème de Pasolini (incarnation du Mal ou du Bien ?) six ans après. Il est mis en valeur par le personnage de Claggart, méchant finement interprété par Ryan, homme plus intelligent que la fonction qu’il occupe, détestant les hommes autant qu’il se déteste. Notons que Robert Rossen, l’un des scénaristes (aussi réalisateur de L’Arnaqueur et de Lilith), dénonça ses petits camarades au moment de la chasse aux sorcières et porta ce fardeau jusqu’à sa mort…
On regrettera le flottement de la dernière partie du film flottement étrange, comme si Ustinov n’en était pas responsable , lorsque le capitaine Vere retourne soudain sa veste et celle de ses lieutenants sans que nous y fussions préparés et seulement parce que le scénario l’exigeait.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}