Le jeune réalisateur anglais Charlie Lyne signe un documentaire subjectif et stylé sur le teen-movie.
Elle est bien loin l’époque où il fallait se cacher pour s’émouvoir des romances de lycée et rire des grossièretés impudiques de quelques obscurs comédiens. Longtemps déconsidérés, le teen-movie et le stand-up connaissent depuis au moins une dizaine d’années une vague de réhabilitation critique, qui les a fait passer de sous-genres infréquentables
de la culture américaine au rang de phénomènes pop majeurs.
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L’un comme l’autre font l’actualité de cette semaine, à la faveur d’un beau documentaire, Beyond Clueless, une plongée dans les marges du teen-movie, et d’un festival au Centre Pompidou, à Paris, consacré à l’art délicat
du stand-up. Le premier est l’œuvre d’un jeune Britannique de 26 ans, Charlie Lyne, un journaliste connu outre-Manche pour ses chroniques sur le site du Guardian, qu’il alimente chaque semaine avec d’irrésistibles petites pensées (ici une analyse de la bizarrerie de Miley Cyrus, là un éloge de la 3D chez Godard).
Pour ses grands débuts au cinéma, le wannabee réalisateur a voulu
tourner une lettre d’amour au teen-movie, genre qu’il trouve encore trop mésestimé. Profitant d’une faille dans le droit d’auteur, il a construit
son documentaire comme une sorte de livre d’images, voire de juke-box,
où il compile des centaines d’extraits de films commentés en voix off par l’actrice et muse Fairuza Balk, vue dans Dangereuse alliance. Sur le modèle des mash-up amateurs qui pullulent depuis des années sur les plates-formes de vidéos sur internet, Charlie Lyne y déroule l’histoire récente des films d’adolescence à travers un prisme purement subjectif.
Dans un geste critique fort et singulier, il évacue ainsi toute une frange de l’histoire officielle des teen-movies (aucune mention de John Hughes,
le maître eighties, auteur notamment de La Folle Journée de Ferris Bueller) pour se concentrer sur ses zones d’ombre, des films dits mineurs (Sexe Intentions, Mean Girls, Drive Me Crazy…) dont il décrypte avec plus ou moins de pertinence les motifs.
Mais peu importe, au fond, la portée analytique du projet : Beyond Clueless se lit plutôt comme une sorte de documentaire organique sur le teen-movie, un digest des affects et des grands tremblements émotifs qui constituent
le genre. Premiers émois sexuels, mutation des corps, montée des pulsions suicidaires : Charlie Lyne isole les moments clés des films d’adolescence dans de superbes saynètes façon clip, scandées par l’electro-pop gazeuse du duo Summer Camp. Il réaffirme avec passion la vertu première du genre : créer des images iconiques, encapsuler ces instants de vie où tout est plus sexy, dangereux, intense.
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