Dans les banlieues middle-class du Pays basque, les lycéens s’ennuient et se livrent à des jeux sexuels. Un grand coup de fraîcheur dans le cinéma français.
Le genre “film d’ados” a connu ses plus belles floraisons aux Etats-Unis entre les mains inspirées de jardiniers sensibles tels que Gus Van Sant, Larry Clark ou Sofia Coppola, ultraconnectés aux élans et tourments de la jeunesse contemporaine.
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En France, dans le domaine teenage, on a souvent droit à La Boum ou, pour le meilleur et le plus rare, aux visions introspectives et littéraires d’un Desplechin ou d’un Assayas. A ce titre, Bang Gang fait l’effet d’un big-bang dans notre cinéma, cumulant avec grâce la finesse d’observation française et la pulsion physique, le coulé sensoriel propre au cinéma américain.
Tiré justement d’un fait divers américain, situé dans les faubourgs cossus de Biarritz (assimilables à n’importe quelle banlieue middle-class des States), Bang Gang démarre de manière classique : un groupe de lycéens qui s’ennuie, des stratégies amoureuses qui s’échafaudent, une grande fête qui se prépare dans la vaste maison de l’un d’eux.
Une énergie sauvage, élégante, sensuelle
Dans ce microcosme, Eva Husson s’intéresse tout particulièrement à un trio formé par la blonde George, la brune Laetitia et le sombre Alex. George kiffe grave Alex mais ce dernier est plutôt du genre à enchaîner les conquêtes. Par défi et dépit, George organise un jeu sexuel qui fait vriller la party en partouze, comme si on passait du Péril jeune à Kids, Virgin Suicides ou Last Days.
Bang Gang convainc par son sens inné des codes de la jeunesse contemporaine (langage, façon de marcher, rapport à la musique ou aux réseaux sociaux…), par son portrait fin et cruel des relations amoureuses 2015. Le film, surtout, sidère par son énergie sauvage, élégante, sensuelle. La caméra légèrement flottante serpente à travers l’orgie comme en un songe contagieux, Eva Husson semble faire corps en une chorégraphie inspirée avec le corps collectif de ce phalanstère en pleine décharge hormonale, parents et société relégués dans les limbes du hors-champ.
Un grand coup de fraîcheur
On picole, on se drogue, on baise à tous les étages mais dans un élan vital, sans la moindre trace de culpabilité, sans éclaboussures trash, sans le poids morbide du sida, des armes à feu ou des drogues dures qui ombre si souvent et tragiquement le travail d’un Larry Clark (le livre Teenage Lust, les films Kids, Ken Park…). Les seules menaces encourues ici sont la déception sentimentale, les maladies vénériennes “classiques”, l’éventuel retour de bâton parental.
Dans la réussite de son film, Eva Husson a été plus que bien épaulée par son chef op (Mattias Troelstrup) et ses acteurs novices aux noms de stars internationales : Finnegan Oldfield tranchant comme une lame, Marilyn Lima petite Bardot en herbe, Daisy Broom et sa très sexy coquetterie dans l’œil, Lorenzo Lefebvre tout en beauté ténébreuse… Leurs corps, leurs voix, leurs présences, leurs silences, leurs gestes tout neufs participent du grand coup de fraîcheur que Bang Gang souffle sur notre cinéxagone.
Bang Gang (Fr., 2015, 1 h 38)
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