Sept ans après le remarquable Under the Skin, le Britannique Jonathan Glazer signe un court en forme de parabole cauchemardesque.
Des cris et des bruits tribaux, un arbre secoué dans la nuit et un individu masqué qui en tombe pour être lynché par un groupe d’autres individus masqués eux aussi. C’est avec ce court métrage d’un peu plus de cinq minutes que Jonathan Glazer rompt une retraite artistique de presque sept ans, depuis ce dernier plan sublime d’Under the Skin, pointé vers un ciel enneigé.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Entre cette fin et le début de The Fall, entre le film et le court métrage, circulent quelques signes identiques : le déguisement comme condition, la forêt comme environnement et la verticalité comme trajectoire : celle d’une Scarlett/alien descendant du ciel et celle d’un condamné qui tombe de son arbre, avant de tomber plus bas encore.
The Fall est une vision cauchemardesque qu’on croirait issue d’un tableau de Goya, de Deux vieillards mangeant de la soupe ou bien alors de Saturne dévorant un de ses fils. Ton verdâtre, c’est une humanité sombre et poisseuse que nous donne à voir le réalisateur de Birth, une humanité régie par la vindicte populaire et la bêtise. S’il n’y avait la présence d’un téléphone portable utilisé pour prendre une photo du condamné au milieu de ses bourreaux, nous pourrions être au Moyen-Age. Cette photo a son importance puisqu’elle renvoie à l’origine du projet.
Ce court métrage produit par la BBC est inspiré d’une photographie sur laquelle les deux fils de Donald Trump s’affichent fièrement avec leur trophée de chasse : un léopard étreint comme s’il s’agissait d’une grosse peluche gagnée à la foire du coin. Un flash cru vient mettre leur acte en lumière, le sort d’une nuit noire.
Très court récit parabolique, The Fall suscite un mélange d’espoir et de crainte quant au prochain film de Jonathan Glazer ayant pour cadre l’Holocauste : espoir de voir l’immense potentiel du réalisateur mis au service d’une œuvre formellement encore plus ambitieuse et inventive et crainte de voir ce génie mis au service d’une pensée de l’humain complaisamment pessimiste.
The Fall de Jonathan Glazer, avec Susanne Brown, Christopher Jupp (G.-B., 2019, 7 min). Le 10 mai sur Mubi
{"type":"Banniere-Basse"}