Le cinéma ne cesse de filmer l’ère du Net, et l’idéalisation de soi dans un monde virtuel à double tranchant.
L’avatar est à l’affiche. Du film de James Cameron au Inception de Christopher Nolan, de L’Autre Monde (Gilles Marchand) à Chatroom (Hideo Nakata) en passant par le Clones de Jonathan Mostow, ces derniers temps, la question du transfert des corps revient souvent au cinéma.
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Matrix (les frères Wachowski, 1999) avait amené Hollywood à l’ère du tout-numérique. Ennemi d’Etat (Tony Scott, 1998) l’avait initié à la naissante révolution des télécommunications. Et Cloverfield (Matt Reeves), Redacted (Brian De Palma), ainsi que Diary of the Dead (George Romero), paraphèrent l’avènement de l’influence de l’internet sur le cinéma en proposant la même année (2008) de confier les clés d’une image sale, fébrile, subjectivée et performative à monsieur Tout-le-monde. YouTube, style Chatroulette avant l’heure.
Mais ce n’était que la phase d’apprivoisement, par la forme, d’un monde qu’on disait virtuel et illimité, mais où personne encore, comme une Lune nouvelle, ne s’était rendu.
On comprend mieux désormais pourquoi il aura fallu dix ans à James Cameron ou à Christopher Nolan pour ressasser, préparer, repenser les magnifiques oeuvres que sont Avatar et Inception, venant ponctuer (avant peut-être le film sur Facebook de David Fincher ?) une décennie d’un cinéma révolutionné par le web en allant puiser du côté de l’obscur.
Car s’il y a bien une chose que l’on aura décelé derrière notre écran d’ordinateur, c’est la possibilité d’être un autre, sur une île que l’on aura créée et explorée soi-même.
Si l’avatar permet de s’effacer au profit d’une excroissance idéalisée de soi, il n’en provoque pas moins des troubles secs de l’identité. Et la question qui fâche souvent nos personnages principaux: vaut-il mieux se terrer derrière la version parfaite et chimérique de soi-même, vivre ses rêves et jouir d’une liberté qu’on a perdue depuis longtemps dans l’autre monde, ou bien s’assumer en tant que réalité défectueuse mais néanmoins vivante?
Dans Inception, Dom Cobb ne se contente pas de se créer un monde virtuel, il va jusqu’à le mettre en abyme. Quand les uns (Avatar, L’Autre Monde, etc.) réglent leur mal-être avec une version 2.0 d’eux-mêmes, Cobb lui, recherche la fragmentation de son être, de son disque dur, de son deuil. Comme un puits où l’on se jette en dispersant ses effets sur les parois pendant la chute. Pour être plus léger.
Cet élan immodéré pour les rêves et les autres mondes, s’il est le fait d’arme des geeks, est aussi, surtout, le lot quotidien de tous les cinéphiles du monde. Ceux dont Cobb, dans une version fanatique, s’est chargé d’être le nouveau chef de file.
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