Hier le CNC a remis pour la toute première fois son prix destiné au livre de cinéma. C’est Luc Béraud, réalisateur et ancien assistant de Jean Eustache qui remporte la mise avec « Au travail avec Eustache » publié chez Institut Lumière/Actes Sud.
Le 1er février dernier, le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée). annonçait sur son site la création d’un prix du livre de cinéma ainsi que le lancement d’un appel à projets pour l’édition dans ce domaine. Une initiative pour tenter de relancer les ventes (en forte baisse depuis les années 90) d’un genre qui peine à retrouver sa vigueur des années 70-80. « J’ai souhaité créer le prix CNC du livre de cinéma pour que la cinéphilie grandisse encore un peu plus en France », avait alors déclaré la présidente du CNC Frédérique Bredin.
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Hier, le 9 mai, le jury présidé par l’écrivaine Yasmina Reza a récompensé l’ouvrage Au travail avec Eustache de Luc Béraud, réalisateur (La Tortue sur le dos, Plein sud, La Petite Amie) mais aussi assistant sur La Maman et la putain, Mes petites amoureuses et Une sale histoire.
Dans cet ouvrage, truffé d’anecdotes des plus cocasses (sur le tournage de Mes petites amoureuses, après une nuit en cellule de dégrisement, Eustache, tourmenté par la mort récente de sa grand-mère, exige une lettre d’excuse du ministre de la Culture), Béraud revient sur ces trois tournages houleux et brosse le portrait tendre d’un personnage tiraillé.
Au travail avec Eustache, de Luc Béraud, premier prix du livre du cinéma pic.twitter.com/UFDi3BIGyH
— News Tank Digital (@NewsTankDigital) 9 mai 2017
Désormais chaque année le CNC décernera son prix du livre tout juste avant le début des festivités cannoises et récompensera l’élu d’une somme de deux fois 5 000 euros pour l’auteur ainsi que pour l’éditeur afin de booster la promotion du lauréat.
Un document inédit
Ultime réjouissance : alors que la Cinémathèque française consacre le cinéaste Jean Eustache à travers une rétrospective intégrale du 3 au 27 mai, celle-ci a publié hier via son site internet, une archive inédite du cinéaste. C’est le même Luc Béraud qui partage ce document radiophonique rare datant de 1981.
A l’époque, Bernard Faivre d’Arcier, le directeur du Festival d’Avignon, crée pour la première fois Radio Festival. Il convie alors Georges Lavaudant qui décide d’inviter une personne chère à ses yeux. Lavaudant porte son dévolu sur Eustache mais celui-ci, reclus dans son appartement parisien, refuse l’invitation. En revanche, il fait parvenir au metteur en scène et dramaturge une cassette audio. Bien évidemment, Eustache détourne l’entretien traditionnel et livre un document hautement cinégénique. Il y raconte un projet de film en cours (« Je suis en train d’écrire un film, un scénario. Je suppose que c’est la même chose puisque jusqu’ici tout ce que j’ai écrit, je l’ai filmé« ) pour finalement annoncer qu’il n’en parlera pas (« mais je ne vous en parlerai pas, parce que je ne sais pas s’il sera. Alors je vais vous dire comment se passent mes journées« ).
A partir de là, le cinéaste débute son histoire et entremêle à sa parole d’autres documents sonores, des messages de répondeurs de jeunes filles amoureuses, des extraits audio de ses films (Une sale histoire) pour finalement revenir sans cesse à ce mystérieux projet (avorté) de film baptisé L’Oiseau des vacances.
L’enregistrement sera diffusé sur Radio Festival en juillet 1981. Au mois de novembre de la même année, Eustache se tire une balle dans le cœur et laisse sur la porte de son appartement ce mot à l’ironie macabre : « Frappez fort, comme pour réveiller un mort.”
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