L’errance de deux amants disséquée dans un premier film roumain qui frappe par sa justesse d’écriture.
On dit d’un couple, lorsqu’il va mal et qu’il suspend pendant une durée indéterminée le rituel de sa relation, qu’il fait une pause. Dans Après la nuit, ce n’est pas seulement le couple de Dana et Arthur qui semble avoir été mis sur pause, mais une partie d’eux avec.
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Une pause du corps et de l’esprit
Les regards perdus, errant chacun de leur côté dans la longue nuit, c’est une pause généralisée, du corps et de l’esprit, comme un appareil électronique mis en veille, en attente de son reboot.
https://www.youtube.com/watch?v=n1xToUTUMoQ
Entraînés par un vide qu’ils ne maîtrisent pas, les deux amants se laissent prendre par la nuit, sans trop savoir où aller ni quoi faire. Dana paie un chauffeur de taxi pour pouvoir rester avec lui une partie de la soirée à l’intérieur de son véhicule, tandis qu’Arthur rend visite à un partenaire sexuel rencontré sur une appli de rencontres gays.
Justesse d’écriture
Ancien assistant-réalisateur de Cristi Puiu (La mort de Dante Lazarescu), Marius Olteanu revendique sa méthode avec des séquences en temps réel, étirées à l’extrême qui frappent par leur justesse d’écriture. Mais c’est surtout parce que ces deux moments de vie ne mènent ses personnages nulle part − ils ne construisent rien de très sérieux, font juste passer le temps − qu’ils atteignent une telle vérité.
Après la pause qui, par définition, ne peut durer qu’un temps, on rappuie sur play, on remet la machine couple et ses habitudes en marche. Le cadre de l’image, jusqu’ici en format carré, s’est soudain ouvert. Si l’on imagine bien l’effet anti-Mommy recherché (figurer la persistance de l’enfermement du couple malgré l’ouverture du cadre), le résultat est plus ambigu.
Qu’il le veuille ou non, Après la nuit n’est pas un film à effets, et tant mieux. Tout est nébuleux, laissé sans réponse, à l’image de cet amour dont on ignore s’il pourra un jour renaître.
Après la nuit de Marius Olteanu, avec Judith State, Cristian Popa, Alexandru Potocean (Roum., 2018, 1 h 48), en salle le 18 décembre
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