Trop attendue, cette adaptation longtemps fantasmée du roman de Bret Easton Ellis déçoit, puisque le résultat débouche non pas sur une œuvre autonome détentrice d’une monstruosité purement cinématographique mais sur une laborieuse mise en images, salement édulcorée de surcroît. Les visions terrifiantes du romancier sont en effet faiblement retranscrites à l’écran, le film procédant à […]
Trop attendue, cette adaptation longtemps fantasmée du roman de Bret Easton Ellis déçoit, puisque le résultat débouche non pas sur une œuvre autonome détentrice d’une monstruosité purement cinématographique mais sur une laborieuse mise en images, salement édulcorée de surcroît. Les visions terrifiantes du romancier sont en effet faiblement retranscrites à l’écran, le film procédant à une autocensure systématique des scènes de violence, réduites à quelques zébrures parodiques. Décidément, malgré ses provocations de surface, le ciné indé américain reste aussi frileux que les grosses majors. Par sécurité, le film évacue la dimension horrifique de l’histoire pour se recentrer sur la satire sociale, avec la description assez convenue mais d’une bouffonnerie acide de l’univers yuppie des années 80. Patrick Bateman est un golden boy de Wall Street qui dissimule sa vraie nature sous les oripeaux de la réussite et du conformisme. Sous le masque anonyme de la tête à claques BCBG se cache un tueur psychopathe jouissant de l’impunité de sa classe et massacrant selon son bon plaisir prostituées, clochards ou « collègues » de bureau. Débarrassé de ses images sulfureuses de sang et de sperme, récoltées en fin de parcours dans un cahier de dessins (scène malheureuse), American psycho devient un anodin « period movie », tout comme le précédent film de Harron sur les années Factory, I shot Andy Warhol. Du point de vue stylistique, ça sent l’imposture et la crise d’inspiration. Faute de pouvoir restituer l’originalité littéraire du livre, Harron se contente d’imiter très maladroitement Kubrick (travellings arrière à volonté) et les ambiances aseptisées de Cronenberg, les deux cinéastes à qui l’adaptation d’American psycho revenait de droit. L’ensemble de la distribution se croit dans un mauvais remake d’Orange mécanique. Seule notre égérie Chloë Sevigny trouve grâce à nos yeux, mais elle est placardisée dans le seul rôle humain d’un film qui ne la mérite pas.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}