Le réseau de cinémas Utopia lance un circuit de distribution alternatif, « Vidéo en poche ». Le principe : acheter un film au cinéma et l’emporter sur une clé USB. Le tout via un logiciel libre et sans DRM.
Aller au cinéma et repartir avec un film sur sa clé USB : c’est possible. Pour cinq euros, le réseau Utopia proposera, à partir de septembre, d’acheter dans l’ensemble de ses cinémas des films sur support amovible en format ouvert. Onze films seront disponibles d’ici le lancement. Pour la plupart des documentaires (Les LIP, l’imagination au pouvoir, Ma mondialisation…), mais des fictions et films d’animation devraient rejoindre le catalogue. Pour Rodolphe Village, à l’origine de l’idée au sein du réseau Utopia, le procédé sonne comme une évidence :
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« Il s’agit de se baser sur les pratiques des gens. Ils consomment du dématérialisé. Cela ne sert à rien de se caler sur des modèles anciens. »
Bertrand Vaesken est le responsable vidéo des Films du Paradoxe, premier distributeur à se lancer dans l’aventure avec eux : « De toute façon, tout est piraté. Il est utopique de vouloir lutter contre ça », complète-t-il.
Un remède anti-Hadopi
« Vidéo en poche« , c’est en fait une double réponse : d’une part à l’Hadopi, jugée injuste et inefficace, d’autre part à une offre légale inadaptée, notamment la VOD.
« Le problème de la dématérialisation, c’est que souvent, elle n’est pas respectueuse du spectateur. On ne leur propose que des tarifs à la location. Avec « Vidéo en poche », on souhaite offrir un film à l’achat au prix moyen d’une entrée de cinéma », poursuit Rodolphe Village.
Une première phase de test a eu lieu lors des Rencontres mondiales du logiciel libre qui se sont tenues à Bordeaux, début juillet. Le lancement définitif aura lieu en septembre dans toutes les salles du réseau. A terme, il s’agirait de constituer, au-delà de l’Utopia, « un véritable circuit de vente et de distribution alternatif et dématérialisé, mais recentré autour de la salle de cinéma ». Et pas question d’installer des caisses automatiques : « le déplacement au cinéma et la culture de l’échange sont au centre du projet ». Les autres cinémas regroupés au sein de l’association Indépendants solidaires et fédérés pourraient constituer le premier élargissement du réseau.
Pour une ouverture des contenus
La distribution de « Vidéo en poche » est fondée sur l’utilisation d’un logiciel libre, développé par Objectif Libre et financé par Utopia. Le logiciel permet de rationaliser la vente en faisant remonter les recettes par salle et en comptabilisant la partie reversée aux ayants droit sur un serveur. Un procédé sur le modèle de celui mis en place par le CNC pour les caisses informatisées. Il devrait par la suite être disponible sur la plate-forme de logiciels libres Ubuntu.
Le fichier lui-même est ouvert et vendu sans DRM, ce qui permet la plus grande souplesse d’utilisation. « Avec les DRM, on s’est mis les spectateur à dos. Le seul truc que cela provoque, c’est de favoriser le piratage », explique Rodolphe Village. Et le problème de la copie ? « Bien sûr que les fichiers peuvent être recopiés. Mais les ayants droit savent que c’est déjà le cas avec les DVD », justifie-t-il. Ceux-ci n’y perdent d’ailleurs pas au change. Sur les cinq euros payés, trois euros leur reviennent, 0,98 euro sont consacrés à la TVA et la salle conserve 1,02 euro.Sur un DVD, la part moyenne des recettes reversée aux ayants droit (producteur et auteur) est située entre 20 et 25%, estime le CNC.
Un produit adapté
Les films distribués seront au minimum en qualité DVD, en HD quand cela sera possible techniquement. « On ne peut plus se contenter d’une simple qualité DVD. Et le Blu-ray n’a pas décollé. On propose une qualité d’image supérieure pour un tarif bien plus raisonnable », s’enthousiasme Rodolphe Village.
Une qualité de diffusion enfin offerte à un cinéma de genre et alternatif. C’est pourquoi les Films du Paradoxe prennent le risque : « Les cinémas Utopia ont une clientèle particulière. Et nous, nous avons un catalogue de moutons à cinq pattes. C’est donc un ballon d’essai porté par une grande curiosité. C’est l’expérimentation d’un nouveau type de vente et surtout de diffusion de la vidéo. On verra ce que cela peut donner », conclut Bertrand Vaesken.
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