Vendredi soir à 21h aura lieu la 42e cérémonie des César. Le cinéma français devra y désigner ses champions. Nous nous sommes livrés au petit jeu des pronostics, probablement démentis dans deux jours à la salle Pleyel.
Meilleur film
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Favori : Divines
Depuis sa présentation au dernier festival de Cannes, le film d’Houda Benyamina a provoqué une large adhésion, validée par sa réception outre-Atlantique (où le film est diffusé par Netflix et a suscité un vif intérêt de la profession). Les César aiment régulièrement favoriser David plutôt que Goliath et Divines est le film au budget le plus modeste parmi les nommés. Souvent quand un premier film excède sa catégorie dédiée pour se retrouver nommé également parmi les meilleurs films, il l’emporte (Les Nuits fauves, La Vie rêvée des anges, Le Goût des autres, Guillaume et les garçons à table) – même si cette règle connait deux contre-exemples récents (Les Combattants, Mustang). Réalisé par une femme issue de l’immigration, le plébiscite du film aurait aussi une résonance politique forte.
Possibles : Elle et Franz
Avec 11 citations chacun, les deux films dominent les nominations. Elle de Paul Verhoeven a été soutenu par une presse dithyrambique et bénéficie d’une aura de chef-d’œuvre. Le voir consacré comme meilleur film de l’année parait une évidence. Franz a remporté un large succès public (650 000 entrées) en cumulant les supposés handicaps (film français en langue étrangère, noir et blanc…). Sa victoire consacrerait la carrière pavée de succès de François Ozon, jusque-là assez négligée par les César.
Autres nommés : Ma Loute, Victoria, Les innocentes, Mal de Pierres
On aimerait que Victoria, un de nos chouchous de l’année, ait toutes ses chances. Mais l’absence de Justine Triet dans la catégorie des réalisateurs est le signe d’un enthousiasme mesuré des votants à son endroit. La présence du Mal de Pierres de Nicole Garcia et des Innocentes d’Anne Fontaine, profilés pour les César selon une idée assez désuète du cinéma de qualité, parait un peu automatique et sans grand enjeu. Ma Loute de Bruno Dumont, premier vrai succès public de son auteur, a indéniablement ses chances. Mais le film, à la fois loufoque et dérangeant, compte autant de détracteurs que de partisans.
Notre choix : Elle
Meilleur acteur
Favori : Fabrice Luchini pour Ma Loute
En dépit de six nominations, il n’a toujours pas remporté le César du meilleur acteur (une fois néanmoins celui du meilleur second rôle). L’occasion donc de rattraper cet oubli. Ses interventions médiatiques en amuseur incontrôlable (dont récemment son show mordant sur la scène des Globes de cristal) lui valent l’idolâtrie de certains. Sa performance délirante dans Ma Loute est le genre de composition où le travail se voit – donnée qu’affectionne les cérémonies de remise de prix. Points faibles : ses coups de griffes un peu réac’ et son narcissisme un peu cabot peuvent ne lui valent pas que des amis.
Possibles : Gaspard Ulliel pour Juste la fin du monde et Pierre Niney pour Franz
Derrière le monument Luchini, deux acteurs autour de la trentaine déjà en concurrence il y a deux ans pour un même rôle : celui d’Yves Saint-Laurent. Injustement perdant, Gaspard Ulliel pourrait avoir sa revanche cette année avec le film de Xavier Dolan, où il est bouleversant. Mais Pierre Niney néanmoins, porté par le succès de Franz, a aussi quelques chances – même si la perceptive de voir l’acteur couronné de deux César à moins de trente ans parait quelque peu disproportionnée (pour ne pas dire grotesque).
Autres nommés : François Cluzet pour Médecin de campagne, Pierre Deladonchamps pour Le fils de Jean, Omar Sy pour Chocolat, Nicolas Duvauchelle pour Je ne suis pas un salaud
Notre choix : Gaspard Ulliel pour Juste la fin du monde
Meilleure actrice
Favorite : Isabelle Huppert dans Elle
Sa carrière exceptionnelle connait un nouveau pic et on ne voit pas comment les César pourraient ne pas en prendre acte. Elle est particulièrement éblouissante dans le film de Paul Verhoeven. Enfin, si elle a obtenu un nombre impressionnant de récompenses dans les festivals internationaux, elle n’a gagné qu’une seule fois le César de la meilleure actrice – ce qui semble peu en regard de sa filmographie foudroyante. Seule ombre à une victoire annoncée : son succès occasionne possiblement des jalousies.
Possible : Virginie Efira dans Victoria
Elle porte avec une verve incandescente la comédie de Justine Triet et le succès public du film doit beaucoup au capital de sympathie et à la popularité de la comédienne. Elle a franchi cette année un véritable cap dans la reconnaissance de ses pairs. Elle pâtit seulement de la concurrence d’Isabelle Huppert (dont elle est par ailleurs la partenaire dans Elle).
Autres nommées : Sidse Babett Knudsen pour La fille de Brest, Solo pour La Danseuse, Marina Foïs pour Irréprochable, Judith Chemla pour Une Vie, Marion Cotillard pour Mal de pierres
Notre choix : Isabelle Huppert pour Elle
Meilleur réalisateur
Favori : Aucun
Possibles : Houda Benyamina pour Divines, Paul Verhoeven pour Elle, Bruno Dumont pour Ma Loute, François Ozon pour Franz, Xavier Dolan pour Juste la fin du monde
C’est une catégorie assez ouverte. La Dolanmania pourrait permettre la victoire du jeune prodige canadien. Mais le fait que Juste la fin du monde ne concoure pas dans le César de meilleur film (mais dans celui de meilleur film étranger) peut peut-être le desservir dans cette catégorie, souvent soudée à celle du meilleur film. Le prestige de Paul Verhoeven et la virtuosité de sa mise en scène pourraient lui valoir la statuette. Mais François Ozon et Bruno Dumont, jamais récompensés en dépit de vingt ans de carrière, peuvent aussi y prétendre. Enfin Houda Benyamina peut possiblement profiter d’une vague d’amour pour Divines. Bref, on a du mal à voir se dessiner une tendance.
Autres nommés : Anne Fontaine pour Les Innocentes, Nicole Garcia pour Mal de pierres
Notre choix : Paul Verhoeven pour Elle
Meilleur film étranger
Favori : Toni Erdmann de Maren Ade
Si le film de Maren Aden a remporté un succès raisonnable mais modeste en salles, il fait vraisemblablement partie des films largement rattrapés par les votants grâce au coffret César. Son originalité et sa maîtrise lui valent l’admiration de beaucoup.
Possibles : Moi, Daniel Blake de Ken Loach, Juste la fin du monde de Xavier Dolan et Manchester By The Sea de Kenneth Lonergan
Le cinéaste anglais n’a jamais été récompensé par les César. Ce film, véritable succès public, pourrait être celui de sa reconnaissance par l’Académie. Il n’est pas impossible néanmoins que sa Palme d’or le desserve aujourd’hui et qu’une large partie des votants estime que, déjà largement reconnu, il a moins besoin de ce prix que d’autres films. La nomination de Dolan en meilleur réalisateur, celle de trois de ses comédiens, disent l’enthousiasme pour le film de nombreux votants. Dolan, son succès, la mythologie qui l’entoure, bénéficient d’une vraie admiration auprès de nombreux professionnels. Mais il a déjà obtenu ce prix il y a deux ans pour Mommy et le risque d’une redite pourrait constituer un frein à sa victoire. Dernier choix possible, le bouleversant Manchester by The Sea de Kenneth Lonergan tant le film marque la naissance d’un auteur que les votants pourraient vouloir saluer.
Autres nommés : Aquarius, Baccalauréat, La fille inconnue
Notre choix : Aquarius
Meilleur premier film
Favori : Divines
Les multiples nominations du film attestent de l’enthousiasme qu’il a déclenché chez beaucoup de votants. C’est le film le plus discuté, commenté, exposé médiatiquement de la catégorie. On voit mal ce qui pourrait empêcher sa victoire, sinon que certains des votants qui le choisiraient pour la catégorie meilleur film opteraient du coup un autre candidat pour celle du meilleur premier film. Mais un tel danger de dispersion des votes parait peu probable.
Possible : Diamant noir
Nous aimerions tellement que le premier film d’Arthur Harari, doté d’une maîtrise époustouflante, l’emporte, que nous nous permettons de rêver. Mais face au phénomène Divines, peu d’espoirs subsistent. Ou peut-être un seul, comme c’est quelques fois arrivé, si Divines remporte le prix de meilleur film, les votants pourraient décider de décerner le prix de meilleur premier film à une autre œuvre. C’est pourtant peu probable. Il y a 3 ans, Guillaume et les garçons, à table! avait remporté les deux.
Autres nommés : Cigarette et chocolat chaud, La danseuse, Rosalie Blum
Notre choix : Diamant noir
Meilleur second rôle masculin
Favori : Vincent Lacoste pour Victoria
La côte d’affection dont il bénéficie est immense. Il est étourdissant de drôlerie et de finesse dans le film de Justine Triet. Il est le petit frère que tout le monde aimerait avoir. Sa victoire ne serait que justice.
Possibles : Laurent Lafitte dans Elle, Vincent Cassel pour Juste la fin du monde
Le film de Paul Verhoeven a modifié l’image proprette de nouveau champion de la comédie de Laurent Lafitte. Il y révèle une facette plus trouble et une sensualité jusque-là peu explorée de ses aptitudes de comédien. Un tel contremploi pourrait jouer en sa faveur. Vincent Cassel, dont la performance dans Juste la fin du monde a été très remarquée, n’est pas dans la même problématique. Malgré, pourrait-on même dire à cause de, son statut d’immense star du cinéma français, lui donner un César de meilleur second rôle alors qu’il a déjà remporté le César du meilleur acteur semble peu probable.
Autres nommés : Gabriel Arcand pour Le Fils de Jean, Melvil Poupaud pour Victoria, James Thierrée pour Chocolat
Notre choix : Vincent Lacoste pour Victoria
Meilleur second rôle féminin
Favorite : Anne Consigny dans Elle
Déjà nommée trois fois dans la catégorie, elle n’a pour l’instant jamais remporté de César. Elle est depuis une dizaine d’années un second rôle très prisé du cinéma français. L’occasion donc de primer une carrière, discrète mais solide, et une performance particulièrement convaincante.
Possible : Nathalie Baye dans Juste la fin du monde
Sa prestation dans le film de Xavier Dolan est particulièrement marquante et le rôle est probablement le plus étoffé de tous ceux représentés dans cette catégorie. Mais une récompense dans la catégorie second rôle paraitra peut-être peu appropriée pour une comédienne à la carrière aussi importante et reconnue (déjà deux César dans la catégorie meilleure actrice).
Autres nommées : Valeria Bruni Tedeschi dans Ma Loute, Déborah Lukumuena dans Divines, Mélanie Thierry dans La danseuse
Notre choix : Anne Consigny pour Elle
Meilleur espoir masculin
Favori : Niels Schneider pour Diamant noir
Cela fait un petit moment que ses jolies bouclettes blondes trustent le cinéma francophone. Révélé dans Les Amours imaginaires de Xavier Dolan puis dans des seconds rôles hexagonaux dans Les Rencontres d’après-minuit de Yann Gonzalez, Gemma Bovary d’Anne Fontaine, Une rencontre de Liza Azuelos, Belle dormant d’Ado Ariette (premier rôle) ou L’âge atomique d’Elena Klotz, Niels Schneider mérite que son talent soit reconnu par la profession grâce à ce premier grand rôle de composition. Seule ombre au tableau, avec une telle filmographie, peut-il encore vraiment se présenter comme un espoir?
Possibles : Damien Bonnard pour Rester Vertical, Kacey Mottet Klein pour Quand on a 17 ans
Face au sex-symbol québécois, deux acteurs peuvent également prétendre au César de meilleur espoir. Le premier a 38 ans. Après plusieurs rôles de figurants, il a été révélé par Guiraudie dans Rester Vertical où il brille par sa timidité nonchalante déjà récompensée aux prix Lumières. Le second a 18 ans mais a commencé sa carrière très tôt sous la direction d’Ursula Meier dans Home et L’enfant d’en haut. Il a également incarné Gainsbourg enfant dans le film de Joann Sfar. Les deux représentent des choix très différents, l’un une véritable révélation un peu sortie de nulle part et l’autre un très jeune acteur à la carrière déjà solide.
Autres nommés : Jonas Bloquet pour Elle, Corentin Fila pour Quand on a 17 ans
Notre choix : Niels Schneider pour Diamant noir
Meilleur espoir féminin
Favorite : Oulaya Amamra pour Divines
Sa vivacité, sa drôlerie, sa justesse, sa capacité à jouer sur les contrastes (tour à tour toute en excès ou en demi-tons) constituent une des grandes réussites de Divines. Vu le succès du film et sa côte d’amour auprès des votants, on ne voit pas trop comme ce césar pourrait échapper à l’irrésistible Oulaya.
Possible : Paula Beer pour Franz
Plus encore que Pierre Niney, cette jeune actrice allemande inconnue du public français porte le film de François Ozon. Si sa prestation est impeccable, sa gamme toute en retenue et sur une note presqu’unique est probablement moins payante que la composition en feux de Bengale d’Oulaya Amamra. Une petite chance néanmoins, en cas de raz-de-marée Franz.
Autres nommées : Raph pour Ma Loute, Lily Rose Depp pour La Danseuse, Noémie Merlant pour Le Ciel Attendra
Notre choix : Oulaya Amamra pour Divines
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