Les Perses et les Grecs continuent de se foutre sur la gueule, dans un blockbuster aussi brutal que le premier, mais plus classiquement narratif.
C’est l’âge de raison pour 300, péplum ultraviolent né de la cuisse de Frank Miller, qui depuis sa sortie en 2006 continue encore d’irriguer la pop culture : huit ans après, cette suite – que Zack Snyder produit et coécrit mais ne réalise pas –, moins condensée, plus feuilletonnante, retrouve en effet une certaine forme de récit classique du péplum contemporain. Alternance de combats et de pourparlers, éparpillement des décors, diversité des personnages, nous rappellent combien le premier volet était un objet étrangement compact, un film de pur combat, brutalement désincarné.
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L’idée n’est pas ici de reproduire la formule, mais d’y faire naître un film moins dur, un authentique blockbuster de guerre dans ce même climat de violence très graphique. Obsédé par ses textures grasses, lourdes, par sa pénombre jaunie striée des capes rouges ou bleues des soldats grecs, 300 est avant tout l’occasion de cuire dans le même pot un nouvel enchaînement de séquences de combats, où le ciel n’a jamais ni la couleur du jour, ni tout à fait celle de la nuit, mais annonce sans nul doute l’heure de tuer et de mourir.
Dans ces scènes d’action plutôt élégantes, apparaît la parenté très forte qui lie 300 à l’esthétique contemporaine du jeu vidéo : d’Assassin’s Creed à God of War, c’est bien de ce côté-ci qu’il faut aller chercher le tempo de mouvement (succession d’accélérés et de ralentis), la lecture de l’espace (zooms vers des points d’intérêt, enchaînement très codé des assauts), et surtout l’esprit de pure jouissance qui président au film.
Car il n’est question que de jouissance : on a rarement vu Eros et Thanatos s’emmêler autant les pinceaux. La rivalité qui oppose Thémistocle (Sullivan Stapleton) à Artémise (Eva Green) a tout d’une parade amoureuse déguisée en duel au sang ; leur combat final donne le change en terme de pénétration (on n’en dira pas plus), et leurs ébats ressemblent à s’y méprendre à des luttes à mort.
Cette superposition du sexe et de la lutte donne une bonne mesure du caractère masturbatoire de la violence dans les films de Zack Snyder, qui ne répondent qu’à la pulsion éphémère, flattent le regard dans une logique purement cathartique – mais le font avec une incontestable virtuosité.
On peut certes critiquer le relatif manque d’envergure de ce cinéma populaire, et regretter qu’il ne soit jamais “plus” qu’une remarquable fabrique d’orgasmes. Car, quand en son temps Paul Verhoeven (RoboCop) produisait de la jouissance, il n’oubliait pas de la questionner, de la renverser. Mais la raréfaction de ces blockbusters subversifs n’est pas imputable au seul Zack Snyder, qui reste un entertainer sans pareil.
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