Alors qu’une jeune femme a été agressée mardi soir dans le métro lillois sans qu’aucun voyageur n’intervienne, la psychologue Yvonne Poncet-Bonissol décrypte la passivité des témoins face à une manifestation de violence.
Si les agressions en tout genre révoltent les internautes, la majorité d’entre eux restent passifs quand ils se retrouvent face à de telles situations. Mardi 22 avril au soir, une femme d’une trentaine d’années a été agressée dans le métro de Lille. L’altercation a duré 30 minutes sans qu’aucun témoin ne réagisse, entre le moment où la jeune femme est entrée dans la station et le moment où elle a finalement trouvé de l’aide auprès d’un automobiliste, dehors.
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Hier après-midi, son agresseur a écopé de 18 mois de prison ferme. Mais qu’en est-il de la dizaine de témoins qui ont assisté à cette scène sans rien faire? Bien que le geste de l’agresseur soit intolérable, le comportement des témoins est tout aussi inquiétant. Yvonne Poncet-Bonissol, psychologue clinicienne, analyse ce phénomène de passivité collective.
Pourquoi les témoins ont-ils tendance à se déresponsabiliser face à une agression?
Il existe un phénomène de groupe: si personne n’intervient, les autres sont tétanisés et n’osent pas s’impliquer. Cependant, les êtres qui sont structurellement et psychologiquement bien constitués réagissent. J’ai vu des sauveurs traverser le feu pour secourir un enfant et des gens s’interposer dans des conflits de manière très franche.
Le sexe de la personne et le type d’agression ont-ils une influence sur la réaction des personnes qui assistent à la scène?
Quand une personne est en danger de mort, les gens réagissent. Mais lorsqu’il s’agit d’un conflit de type agression sexuelle, ils ont peur de s’immiscer et ils la banalisent alors qu’ils ne devraient pas. Si l’agresseur avait été une femme, les gens auraient certainement bougé parce qu’ils ont naturellement moins peur. Mais en règle générale, on se rétracte souvent face à un agresseur, homme ou femme, car on ne sait pas de quoi il/elle est capable.
Cette situation est-elle le reflet d’une société individualiste?
Il y a une forme de démission généralisée quasiment sociétale car, en effet, nous vivons dans un monde très individualiste. Les gens sont animés par la peur et ne veulent pas être confrontés à l’agression. Il y a quelques années, lorsqu’il y avait la moindre altercation, les gens essayaient de s’interposer; actuellement, on voit de plus en plus de personnes se faire agresser alors que l’entourage ne bouge pas. Toutefois c’est avant tout une réaction citadine parce qu’en province, il y a davantage de proximité entre tout le monde. Surtout, ce genre d’agression reste exceptionnelle, il ne faut pas tomber dans la paranoïa.
Propos recueillis par Lara Sini
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