Si vous ne deviez voir qu’une seule vidéo aujourd’hui, ce serait celle de Meufs sur les féminicides à Ciudad Juarez, au Mexique.
“Parmi les 3892 cas de féminicides [perpétrés au Mexique] entre 2012 et 2013, seuls 24% ont fait l’objet de d’une enquête, et 16% ont entraîné une condamnation.” Ces chiffres effrayants sont révélés par Meufs dans une vidéo intitulée Qu’arrive-t-il aux femmes de Ciudad Juarez?. C’est dans cette ville du nord du Mexique que Juani habite. Dans un témoignage bouleversant, elle raconte la disparition en 1997 d’Ana Maria, sa fille de 10 ans, retrouvée trois mois plus tard. L’enfant a été violée puis poignardée 16 fois. “Un meurtre délibéré d’une femme [ou jeune fille] parce que c’est une femme”: celui de la fille de Juani rentre dans la définition du féminicide.
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Si ôter la vie à une personne parce qu’elle est femme est un fléau mondial, le phénomène est particulièrement présent dans le Nord du Mexique, explique dans la vidéo Nina M. Lozano-Reich, professeure adjointe de communication à l’université Loyola Marymount en Californie, avant d’avancer plusieurs raisons à cette triste situation. D’abord, la signature en 1993 du NAFTA, un traité de libre circulation des marchandises entre les États-Unis, le Mexique et le Canada, qui permet aux compagnies américaines d’installer leurs usines dans le nord du territoire mexicain. Pour favoriser l’arrivée de firmes, les dirigeants tiennent à donner une bonne image de leur pays. “Le gouvernement parle de féminicides […] au Mexique comme d’une ‘légende urbaine’”, déplore Nina M. Lozano-Reich. L’universitaire ajoute qu’à cette période, les zones rurales du sud du Mexique sont ravagées: “Du coup, les travailleurs des États du sud du Mexique ont été forcés d’émigrer au nord pour chercher du travail dans les usines.” Les femmes qui déménagent se retrouvent donc seules, loin de leur famille qui ne peut alors pas partir à leur recherche si elles disparaissent. Dans ces conditions, les enquêtes aboutissent rarement.
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La vidéo met ensuite en lumière des associations qui prennent en main le travail de recherche et parcourent la ville et ses alentours pour retrouver les corps de femmes disparues. Leur objectif? Lutter contre “l’amnésie culturelle” du pays et redonner leur singularité et leur humanité aux victimes de féminicides en affichant leurs portraits dans la ville et en racontant leurs histoires, rêves et projets qui resteront à jamais inaboutis.
Margot Cherrid
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