Dans son ouvrage “Défaire le discours sexiste dans les médias”, Rose Lamy, fondatrice du compte Instagram “Préparez-vous pour la bagarre”, décrypte et analyse la façon dont le sexisme et l’antiféminisme sont encore quotidiennement véhiculés dans les médias.
“Depuis trois ans, je collecte et décortique des centaines d’exemples d’un discours sexiste et antiféministe dans les médias. Bien sûr, ce sexisme ne dit jamais son nom, car depuis la déflagration #MeToo en 2017 il est passé de mode. C’est pourtant lui qui conduit les rédactions à taire ou à reléguer les violences sexistes et sexuelles en périphérie des journaux”, écrit Rose Lamy en quatrième de couverture de son ouvrage intitulé Défaire le discours sexiste dans les médias. C’est en 2019, alors qu’elle est communicante en gestion de crise que Rose Lamy lance sous pseudo son compte Instagram Préparez-vous pour la bagarre, qui compte deux ans plus tard plus de 190 000 abonné·es.
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Sur le réseau social, elle épingle et surtout étudie les termes qui déresponsabilisent les agresseurs de leurs actes, humilient volontairement les victimes et participent in extenso à la culture du viol. Son ouvrage se présente ainsi comme un manuel pour décoder le sexisme, qui, chiffres et études à l’appui, s’immisce partout: lorsque l’on refuse d’imaginer un homme de 90 ans capable de tuer sa femme et qu’on le surnomme affectueusement “papy” dans la titraille, lorsque l’on accuse les femmes de mentir pour se faire de l’argent, lorsque l’on classe les féminicides et les agressions sexistes et sexuelles en faits divers ou encore lorsque l’on utilise le terme “déraper” pour évoquer un meurtre ou des agressions sexuelles.
Questionner le discours médiatique
Pour Rose Lamy, tous ces choix de fouiller le passé d’une victime de viol pour la décrédibiliser ou encore de dépolitiser les violences sexistes et sexuelles en refusant de les analyser concourent à une même culture patriarcale qui ne compte pas lever sa domination, qui agit donc sciemment pour construire une société dans laquelle les femmes doutent de leur propre parole. Et lorsque cette culture sexiste se sent en danger, elle réplique -le fameux backlash- avec là aussi des outils langagiers. “Elles [les féministes] sont tout à la fois délatrices d’innocents envoyés à la mort, organisatrices d’Apartheid, lanceuses de diktats, d’oukases ou de fatwas civilisationnelles, planificatrices de lapidations publiques, de lynchages médiatiques, de chasses aux sorcières, et même de crucifixion ou de mise au pilori, ayatollah complaisant, et, pourquoi pas, conniventes avec l’islamogauchisme”, écrit Rose Lamy dans un chapitre qui se repait de la mauvaise foi de tout un tas de tribunes publiées en 2017 en parallèle de #MeToo.
On ne va pas se mentir, c’est à une démonstration que nous convie Préparez-vous pour la bagarre. En 300 pages, elle expose méthodiquement les mots pour en découvrir les intentions. Son analyse illustrée du discours sexiste puise dans une colère saine qui aura vite fait de carrément mettre le feu aux poudres, et de vous faire bondir de votre chaise. “Les mots qu’on décide de lancer dans l’espace public à un haut niveau d’influence ne sont jamais laissés au hasard. Il n’y a pas de ‘dérapage’, mais des calculs et des stratégies qui fabriquent l’opinion.”
Défaire le discours sexiste dans les médias, Préparez-vous pour la bagarre, Rose Lamy, Éd. JC Lattès.
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