Puisque Karl Lagerfeld inspire le monde de la mode, nous avons décidé de soumettre nos créatrices favorites à ses mantras. Profonds, futiles, dingues ou drôles, les propos du Kaiser ne laissent personne indifférent. Cette semaine, Frédérique Dessemond, à la tête de la marque de bijoux GinetteNY, répond à l’interview “Karl vous parle”.
Ne discutez jamais avec elle si vous êtes pressé. Arrêter Frédérique Dessemond la bavarde une fois qu’elle est lancée relève de l’utopie. Heureusement pour nous, l’histoire qu’elle raconte est intéressante. Née à Marseille, cette créatrice de bijoux de 43 ans, installée depuis maintenant quinze ans aux États-Unis, a été bien inspirée de lancer à New York sa marque au nom américano-franchouillard, Ginette NY, quand on voit le succès qu’elle a aujourd’hui en France. D’ailleurs, pourquoi s’éloigner autant? “Je devais partir travailler là-bas pendant seulement un mois et finalement, je ne suis jamais revenue”, raconte cette chanceuse qui a gagné sa carte verte à la loterie.
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La marque, vendue en France depuis 2006, a ouvert la voie de la bijouterie fantaisie de luxe.
Après des études d’histoire de l’art à Marseille et Paris, Frédérique Dessemond peint pour le plaisir, pige pour un magazine spécialisé dans la décoration et revend des meubles qu’elle chine et restaure pour gagner sa vie. Une fois arrivée à New York, la jeune femme assiste pendant deux ans la designer américaine Paige Novick pour sa ligne de prêt-à-porter avant de “s’émanciper”. Elle se met alors à recycler des sacs vintage qu’elle va ensuite proposer à la sauvette sur West Broadway: “Je chinais un sac, je le retravaillais et je le revendais, ça marchait assez bien, puis j’ai été contactée par une boutique, Calypso, qui m’a demandé de faire des bijoux.” La créatrice dessine alors une médaille “qu’on faisait graver aux initiales des gens, ça a plu tout de suite”. Un article dans le magazine W plus tard, Ginette NY est née. Nous sommes en 2002. La marque, vendue en France depuis 2006, a ouvert la voie de la bijouterie fantaisie de luxe, un marché à l’époque pratiquement inoccupé. Frédérique Dessemond a écouté les mantras de Karl Lagerfeld et y a répondu.
“Je hais les montres, c’est la raison pour laquelle je suis toujours en retard.”
J’aime beaucoup les montres, je porte celle que mon père m’a offerte il y a plusieurs années et j’y suis très attachée. Je suis quelqu’un de très ponctuel, je trouve que c’est une certaine forme de respect. Plus on a de rendez-vous, plus on est attendu, moins il faut être en retard.
“Je trouve les tatouages horribles. C’est comme vivre dans une robe Pucci 24 heures sur 24.”
Ok… C’est pas super sympa pour Pucci dis donc! Si le tatouage est émotionnel, s’il représente quelque chose ou même s’il est purement décoratif, je considère que c’est un choix personnel. De mon côté, je n’en ai pas et si j’ai pu en avoir envie à un moment, je n’ai jamais passé le pas.
“Pensez rose, ne le portez pas!”
C’est con parce que le rose, ça me va bien! En fait, je trouve que ça dépend de la couleur de sa peau, de sa carnation. Certaines couleurs donnent mauvaise mine, finalement il faut se sentir bien avec la couleur que l’on porte.
“Les pantalons de jogging sont un signe de défaite. Vous avez perdu le contrôle de votre vie, donc vous sortez en jogging.”
Il y a quelques années, le jogging n’était vraiment pas chic et pouvait être considéré comme la preuve d’un certain relâchement mais aujourd’hui, on le décale et on le décline de mille façons.
“Si je pouvais être réincarné en un accessoire de mode, ce serait un shopping bag.”
Si j’avais la possibilité de me réincarner, je ne choisirais pas un accessoire de mode, je privilégierais la réincarnation en une meilleure personne.
“Si tu pisses partout, t’es pas Chanel du tout!”
C’est chic… Je suis sans voix. Il avait bu quand il a dit ça?
“Il faut porter une fourrure comme un vulgaire tricot.”
J’aime les fourrures mais ma fille est contre, alors je n’en porte pas beaucoup. Je chine énormément donc il m’est arrivé d’acheter une vieille fourrure en fripes mais je ne ferais pas la démarche d’aller chez un fourreur. Sinon, pour la mettre tous les jours, il faut en effet la porter à la cool.
“Je suis une sorte de nymphomane de la mode qui n’atteint jamais l’orgasme.”
Je ne suis pas une éternelle insatisfaite, à chaque nouvelle collection, j’ai du plaisir à la voir se concrétiser. Alors que le vêtement marche par saison, le bijou, lui, a un côté intemporel.
“Si vous me demandiez ce que j’aurais préféré inventer dans la mode, je vous répondrais la chemise blanche. Pour moi, une chemise, c’est la base de tout. Tout le reste passe après.”
La chemise blanche, ce n’est pas mon style car j’ai les épaules trop carrées. Moi, j’aurais aimé inventer la chaussure à talon. Je trouve qu’une jolie paire de chaussures peut donner une dimension très différente à une tenue, même si cette dernière n’est pas très travaillée. À l’inverse, des beaux vêtements ne rattrapent pas des chaussures moches. Cela dit, c’est vrai que les chaussures à talons sont assez inconfortables. Je dis ça mais je ne porterais pas de Louboutin car je ne sais pas marcher avec, et au final, je suis souvent en baskets.
Propos recueillis par Julia Tissier
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