Thor de Kenneth Branagh était probablement le blockbuster Marvel le plus réussi avec Captain America. On attendait donc la suite, réalisée par Alan Taylor, un habitué des séries télé qui a travaillé sur Game of Thrones, avec fébrilité. Notre déconvenue n’en est que plus grande.
Pas d’identité visuelle
Alors que dans le premier opus des aventures du dieu nordique nous n’avions que peu exploré son univers, Thor: Le Monde des ténèbres nous fait visiter les autres royaumes qui le constituent. Une idée excitante seulement en théorie car, malheureusement, leur découverte ne suscite pas le même émerveillement que la vue d’Asgard -la cité du père de Thor où se trouve le somptueux palais de la famille royale- dans le film de Branagh. Ici, Les décors manquent cruellement d’inventivité: on a l’impression de regarder tour à tour Le Seigneur des anneaux, les Star Wars des années 2000 et un épisode de la série Stargate SG1. Pire, Asgard elle-même a perdu de sa superbe: l’intérieur du palais semble avoir été construit en carton-pâte. Les costumes et les créatures ne sont pas plus convaincants: impossible de ne pas avoir des flashbacks de Brad Pitt dans Légendes d’automne en voyant Chris Hemsworth torse nu, c’est dire! Cette absence d’identité visuelle provoque un désintérêt pour l’environnement où évoluent les personnages, ce qui impacte directement notre bonne volonté à comprendre l’histoire tortueuse.
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Une histoire incompréhensible
Comme l’a une nouvelle fois expliqué le producteur Kevin Feige lors de la conférence de presse du film à Paris, la volonté de Marvel de lier les aventures des super-héros comme le font les comics est plus forte que jamais. Ainsi, regarder Thor:Le Monde des ténèbres sans rien y comprendre est normal si vous n’avez pas religieusement visionné l’intégralité des précédents films Marvel (Iron Man, Captain America, et surtout Avengers). Mais, et c’est là que ça se corse, c’est aussi normal de ne rien comprendre si vous les avez tous vus tant le scénario de Thor 2 est tordu! La menace qui pèse sur Asgard et sur la Terre nous est expliquée maintes fois, mais ses ramifications sont tellement complexes qu’elles en deviennent inintéressantes. Au lieu de dédier autant de dialogues et de scènes à leur exégèse, peut-être aurait-il mieux valu se concentrer sur le développement de personnages et d’angles narratifs attrayants, comme le triangle amoureux entre Jane Foster (Natalie Portman), Thor et Sif (Jaimie Alexander), ou la relation tumultueuse entre Thor et son frère diabolique Loki (Tom Hiddleston). Certes, Thor 2 propose de nombreux moments “Thorki” (cette contraction de “Thor” et de “Loki” est utilisée par les fans qui aiment les scènes de dispute et de réconciliation entre les deux frères), mais ils ne sont pas assez aboutis.
Trop d’humour, pas assez de tragédie
S’ils ne sont pas aboutis, c’est à cause du ton résolument humoristique du film. Certes, les scènes comiques sont absolument hilarantes et le geek qui sommeille en chacun de nous ne peut que frétiller à l’apparition guest-star d’un autre personnage Marvel, mais entre les blagues, il ne se passe émotionnellement pas grand chose. Sans s’attendre à ce qu’Alan Taylor atteigne l’équilibre parfait entre comique et tragédie obtenu par Kenneth Branagh dans Thor, on espérait qu’il ne sabote pas les quelques intenses échanges entre Loki et Thor en les faisant presque systématiquement suivre d’une scène légère, triviale. Loki est un dieu fripon et rusé mais il est aussi un être profondément meurtri dont les rages et le désespoir sont bien trop atténués dans Thor 2. Malgré son champ d’action réduit, Tom Hiddleston vampirise toujours l’écran, plus charismatique que jamais. Mais, Loki seul ne peut faire pardonner à Marvel ses erreurs. Après la déception Avengers et la catastrophe Iron Man 3, il est plus que jamais temps pour Marvel de réaliser que les fans de super-héros au cinéma ont les mêmes exigences scénaristiques que les collectionneurs de comics.
Linda Belhadj / almost-kael.com
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