Tous les jours, à 19h30, elle parle de cul sur le Mouv’. Dans son émission intitulée Point G comme Giulia, la journaliste Giulia Foïs aborde tous les sujets sans jamais se démonter. À l’occasion de la sortie de son livre, nous avons voulu savoir ce qu’elle avait dans le ventre et l’avons soumise à une interview “C’est ceux qui en parlent le plus qui en font le moins”.
La discrétion ne doit pas être son fort et d’ailleurs, ça lui va bien: Giulia Foïs est du genre à occuper l’espace. Volubile, souriante et énergique. À 37 ans, cette journaliste anime une émission quotidienne sur la sexualité intitulée Point G comme Giulia sur Le Mouv’ et vient de sortir un livre du même nom. Née à Clamart d’un père italien chercheur en physique nucléaire et d’une mère française psychanalyste, Giulia Foïs est journaliste depuis ses 23 ans. “Ce métier me va parfaitement bien, précise-t-elle, la seule ambition que j’avais enfant, c’était d’être contente de me lever le matin, j’étais la kiffeuse, un peu la glandeuse des enfants.” Cette dernière d’une fratrie de quatre enfants a grandi à Aix-en-Provence: “Si tu fais le calcul, tu peux m’appeler retour de couches, le jour où j’ai demandé à ma mère si c’était le cas, elle m’a fait une réponse de psy: ‘Ton père et moi, dans l’absolu, nous te voulions’.” Giulia Foïs est comme ça, la langue de bois glisse sur elle. Des enfants, elle était celle qui faisait le mur, fumait des joints et mentait aux parents.
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“Les gens me fascinent.”
Elle étudie les lettres à Paris et se découvre une passion pour les autres: “les gens me fascinent”. Et comme elle “aime bien écrire”, elle décide de passer les concours de journalisme. Elle obtient du premier coup celui du Centre de formation des journalistes (CFJ). Ce qui la captive très vite, c’est “la société au sens large, ce qui est notre dénominateur commun, ce qui fait qu’on a envie de se lever le matin, ce qui nous fait courir, ce qui nous fait vibrer”. Assez naturellement, elle fait donc de la sexualité son principal terrain de jeu journalistique et s’intéresse au “désir au sens large, celui qui va au-delà du désir génital, c’est-à-dire à l’expression de soi dans ce que l’on peut avoir de plus intime et puis aussi au rapport à l’autre, au plaisir et à la vie.” Après avoir écrit dans Psychologies, Libération et Marianne, elle a rejoint Le Mouv’ il y a un an et décortique chaque soir à 19h30 un sujet ayant trait à la sexualité. L’occasion toute trouvée pour la soumettre à une interview “C’est ceux qui en font le moins qui en parlent le plus”.
Ton premier souvenir sexuel?
C’est un film porno que j’ai vu alors que j’étais avec ma grand-mère en vacances en Italie. Un soir, elle nous gardait, ma sœur et moi, et on s’est mises à zapper sur les chaînes de télé. On est tombées sur un film dit “porno” qui, je pense avec le recul, était en fait un film érotique. J’avais huit ans. À l’écran, il y avait une fille qui enlevait sa robe blanche et elle portait un gode-ceinture. On avait demandé à ma grand-mère ce que c’était mais elle ne nous avait pas répondu. Ensuite, on avait posé la question à nos parents qui nous avaient dit que c’était des choses qu’on aurait tout le temps de découvrir… Et depuis, je vous rassure, je ne collectionne pas les godes-ceintures dans ma cave!
La première fois pour toi, c’était quand, où, avec qui?
En fait, elle est bi-bande, si j’ose dire! Ça s’est fait en deux temps. Ma première “première fois”, j’étais en troisième, je devais être assez précoce et je sortais avec un garçon qui faisait du sport avec moi. Il avait deux ans de plus que moi et il voulait qu’on le fasse. J’ai appelé ma grande sœur pour avoir son avis, elle m’a demandé si j’étais amoureuse, je lui ai répondu que non, elle m’a dit d’attendre mais le lendemain, je l’ai fait quand même. Je n’ai pas adoré. Le lendemain, j’avais l’impression d’être une femme et j’étais très déçue que personne ne s’en aperçoive.(Rires.)
“Il avait 19 ans, j’en avais 14, sauf qu’il ne le savait pas car je faisais plus vieille que mon âge.”
Et ta deuxième “première fois”?
C’était un garçon que j’avais rencontré dans le métro. Il m’avait proposé d’aller boire un café avec lui le lendemain. J’avais demandé à ma mère si je pouvais y aller, elle m’avait répondu non, mais j’y étais allée quand même. Il avait 19 ans, j’en avais 14, sauf qu’il ne le savait pas car je faisais plus vieille que mon âge. Ce jour-là, j’étais hyper contente que ma première fois “technique” soit passée car il me dominait déjà tellement par son âge, son aisance et sa beauté que si j’avais dû partager avec lui ma première fois, je me serais sentie encore plus petite… Il m’a appris qu’une relation, ce n’était pas forcément “le couple” ou “le plan cul”. Chacun faisait ce qu’il voulait, ça m’a donné une certaine souplesse mentale. Sans parler du fait que c’était un très bon amant.
Que préfères-tu dans le sexe?
Je ne saurais pas le dire car ça change à chaque fois. On se rend compte avec le temps que ça dépend de la personne et du moment. Ce que justement je préfère dans le sexe, c’est de ne pas savoir.
Tu parles de masturbation librement?
Je me rends compte que j’en parle très peu. Les hommes ne m’en parlent pas, comme s’il y avait une espèce de honte. Il n’y a qu’une seule amie avec laquelle j’en ai déjà parlé. C’est la première sexualité de l’enfant, ça reste tabou. Et puis, dans la masturbation, il y a quand même l’idée que les filles se donnent du plaisir et peuvent se passer des hommes, ce qui est insupportable pour pas mal de mecs. Enfin, je crois qu’on n’est pas totalement sortis de l’idée que la sexualité devrait être reproductive.
“Le jour où tu tombes sur une bite qui vibre, tu m’appelles.”
Une pratique sexuelle à laquelle tu ne te risqueras jamais?
Me faire faire caca sur la figure, je suis pas délire scato. On ne me l’a jamais proposé non plus mais j’aurais un petit souci avec ça!
Le sex-toy le plus fou que tu aies jamais testé?
Je ne sais pas… En tout cas, il y en a un que je veux tester: on m’a parlé d’un gode qui fait des mouvements de va-et-vient et qui ne vibre pas et je trouve ça très malin. Parce que le jour où tu tombes sur une bite qui vibre, tu m’appelles.
Ton plus gros tabou sexuel?
Ça n’existe pas de ne pas avoir de tabous et c’est tant mieux d’ailleurs! La sexualité, c’est un cadre et on peut s’amuser à l’intérieur de ce cadre. Et puis, le désir vient aussi de la transgression donc si on n’a pas de tabous, il n’y a pas de désir. Disons, pour répondre à ta question, que je m’octroie la possibilité de dire non. Mais les tabous évoluent aussi. Il y a des choses que je n’aimais pas il y a dix ans et que j’aime maintenant. Les choses changent.
“J’ai eu davantage de difficultés avec l’amour qu’avec le sexe.”
As-tu déjà été sous emprise amoureuse?
J’ai eu davantage de difficultés avec l’amour qu’avec le sexe. Le sexe, on peut se raconter que ce n’est que le corps; c’est moins impliquant, moins engageant que l’amour qui, pour le coup, occupe tout ton être. Je me suis beaucoup défendue de ça. J’ai la théorie du Monsieur Connard -je ne sais pas si l’équivalent féminin existe- mais on a toutes à un moment de notre vie été confrontées à un Monsieur Connard. C’est celui qui va te dire de ne pas tomber amoureuse de lui et le jour où ça finit par arriver, il te dit qu’il t’avait prévenue. J’ai déjà eu mon Monsieur Connard mais je n’ai jamais été sous emprise dans le sens où quelqu’un te manipule, t’isole et te fait oublier qui tu es.
La dernière fois que tu t’es demandée si tu étais normale?
Ce matin, en me regardant dans la glace.
L’endroit où tu serais incapable de faire l’amour?
Sur du barbelé.
Par amour, serais-tu prête à ne plus faire l’amour?
Ça dépend… S’il est dans une incapacité physique, tant que ça ne m’empêche pas de vivre et que le manque n’est pas trop cruel, oui. En revanche, si mon mec m’impose une asexualité, je ne sais pas. Je considère qu’on ne peut pas décider tout seul de ne plus faire l’amour avec son partenaire.
Es-tu amoureuse?
Oui. Il m’a fallu du temps mais maintenant que j’y arrive, je le dis.
Propos recueillis par Julia Tissier
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