Puisque Karl Lagerfeld inspire le monde de la mode, nous avons décidé de soumettre nos créatrices favorites à ses mantras. Profonds, futiles, dingues ou drôles, les propos du Kaiser ne laissent personne indifférent. Cette semaine, Géraldine Cohen et Adélaïde Salvi, à la tête de la marque MySuelly, répondent en chœur à l’interview “Karl vous parle”.
Les deux créatrices de la marque MySuelly (Ndlr: contraction des prénoms de leurs grands-mères respectives, Su- pour Suzanne et Elly, le “My” apportant l’idée d’un sac qui n’appartient qu’à une seule personne), Géraldine Cohen, 37 ans, et Adélaïde Salvi, un an de moins, se rencontrent pour la première fois au Bon Marché, il y a maintenant 15 ans. Géraldine vient alors de finir ses études de communication, après avoir remisé le Code civil en fond de bibliothèque, et s’occupe désormais des relations presse du grand magasin. Adélaïde, son diplôme de l’ISEM (Ndlr: filière business d’ESMOD) en poche, débute comme styliste et rédactrice de mode pour les versions nippones des grands magazines de mode français et vient régulièrement y faire sa sélection. Elle deviendra ensuite la styliste personnelle des égéries L’Oréal telles que Claudia Schiffer et Penelope Cruz, avant de reprendre la clef du vestiaire de stars du petit écran.
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“On a monté la marque en pleine frénésie du sac jetable.”
“On avait toute les deux la volonté de créer notre entreprise et on partageait cette même sensibilité pour l’accessoire de mode”, raconte Géraldine qui quittera son poste de directrice de l’image de la marque Tara Jarmon pour sauter le pas en fin d’année 2009. “On a monté la marque en pleine frénésie du sac jetable”, explique Adélaïde. Les deux jeunes femmes prendront la tendance à contre-courant avec des sacs structurés “qui passent les saisons”, sans toutefois se réfréner sur la création, n’hésitant pas à mélanger les couleurs et les matières, le tout à un prix juste. Adélaïde reprend: “Très vite, on a eu envie de raconter plein de choses sur l’accessoire et de faire de MySuelly bien plus qu’une marque de sacs, mais une attitude inspirée d’une certaine élégance avec des produits identitaires.” Contre le système des logos, elles ont imaginé trois fermoirs qui sont aujourd’hui les signes distinctifs de la marque. L’hiver prochain, elles ouvriront la gamme à l’homme. Dans leur showroom parisien, les deux créatrices répondent, complices, aux citations du Kaiser.
“Je hais les montres, c’est la raison pour laquelle je suis toujours en retard.”
Adélaïde Salvi: J’adore les montres. Non pas pour regarder l’heure en permanence, mais pour l’objet en lui-même que je trouve beau. C’est un objet indémodable qui se passe, se transmet. Il y a ce contraste entre l’idée d’intemporalité et le fait qu’il indique le temps. C’est ma grand-mère qui m’a offert pour mes 18 ans la montre que je porte aujourd’hui. Quand j’achète une montre, je pense au plaisir que j’aurai de l’offrir à mes enfants qui la transmettront à leur tour. Ce n’est pas un acte impulsif comme l’achat d’une paire de chaussures. (Rires.)
Géraldine Cohen: De manière générale, j’aime bien les bijoux anciens, montres comprises, qui ont une histoire. Pour mon anniversaire, mon mari m’a offert une superbe montre des années 60.
“Je trouve les tatouages horribles. C’est comme vivre dans une robe Pucci 24 heures sur 24.”
AS: Je déteste les robes Pucci, mais j’aime beaucoup les tatouages, à petite dose cependant. Je trouve qu’un tatouage ne doit pas forcément trop se voir. Si l’envie me prend, je vais d’abord penser à un endroit joli, mais en même temps confidentiel. Le côté “j’en ai plein les bras”, très peu pour moi. C’est sympa quand tu as 20 ans, beaucoup moins quand tu as la peau qui commence à flétrir.
“Pensez rose, ne le portez pas!”
GC: On aime toutes les deux les couleurs, d’ailleurs cela se voit dans nos collections, surtout pour les collections de l’été où l’on s’amuse encore plus que l’hiver. Au quotidien, j’en porte, mais j’ose un peu moins qu’Adélaïde.
“Les pantalons de jogging sont un signe de défaite. Vous avez perdu le contrôle de votre vie, donc vous sortez en jogging.”
AS: Carrément, on a perdu le contrôle de notre vie! En même temps, je peux comprendre, je ne suis pas du tout jogging. J’en mets uniquement pour faire du sport. Par contre, toi, je t’ai connue en Nike, jogging et veste en jean!
GC: Non, mais, c’est une catastrophe! Pour moi, le jogging, c’est un peu comme une paire de Ugg: une fois testées, tu ne peux plus les enlever, alors que c’est monstrueux. Je peux sortir, m’afficher en jogging, cela ne me dérange pas. À chaque fois que l’on fait les boutiques ensemble, je me dirige systématiquement vers le rayon jogging et c’est Adélaïde qui vient m’en déloger.
“Si je pouvais être réincarné en un accessoire de mode, ce serait un shopping bag.”
GC: Moi, ce ne serait pas un accessoire de mode. D’ailleurs je ne me réincarnerai pas, je n’aime pas cette question.
AS: Si je devais choisir, ce serait la montre, justement pour son côté intemporel.
“Il faut porter une fourrure comme un vulgaire tricot.”
AS: Non, je ne suis pas d’accord, moi, quand je mets une fourrure, j’y vais à fond. Je vais la faire très élégante, très sophistiquée, en la cassant peut-être avec quelque chose d’un peu plus masculin.
GC: Je ne porte pas trop de fourrure. Par contre, pour la collection de cet hiver, on a travaillé sur des bandoulières en fourrure pour nos modèles de sacs les plus structurés. La fourrure vient ainsi se mêler à la chaîne.
“Le vêtement ne doit pas t’aller, c’est toi qui dois aller au vêtement.”
AS: On a toutes des morphologies différentes avec nos atouts et nos complexes. Tout ne va pas à une femme, c’est le vêtement qui doit s’adapter. Il n’y a que pour la chaussure que mon pied s’adapte à la pointure! (Rires.)
GC: On chausse entre du 36 et 37! (Rires.) Sur cette question, je partage le même avis qu’Adélaïde. Parfois, je vais avoir envie de porter des choses qui ne vont pas m’aller à l’essayage.
“Si vous me demandiez ce que j’aurais préféré inventer dans la mode, je vous répondrais la chemise blanche. Pour moi, une chemise, c’est la base de tout. Tout le reste passe après.”
AS: J’aurais mis le jean, qui va très bien avec la chemise blanche d’ailleurs. Et toi, le jogging?
GC: (Rires.) Non, j’aurais mis le trench parce qu’il va aussi bien avec une robe de soirée qu’avec un jean. Mais, c’est vrai qu’avec une chemise blanche, tu peux faire toutes les attitudes.
“On n’est jamais trop habillé, ni pas assez habillé avec une petite robe noire.”
GC: C’est trop facile. Nous, justement, on aime prendre des risques.
Propos recueillis par Léandra Ricou
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