Avocat, chroniqueur, aujourd’hui journaliste pour la télévision, Louis Lanher, féministe convaincu, pointe -avec humour et non sans mauvaise foi- les travers et les extrêmes de la pensée féministe actuelle dans son dernier roman intitulé Les Féministes n’auront pas l’Alsace et la Lorraine. Nous l’avons pris au jeu de sa caricature d’une société ultra-féministe pour le soumettre à une interview “Dans la peau d’une femme”. Attention, second degré.
De l’oral à l’écrit, Louis Lanher a déserté les tribunaux pour prendre la plume. À 38 ans, il signe son cinquième roman au titre volontairement provocateur. “J’ai toujours eu à cœur d’écrire des satires sociales et de tourner en dérision des gens qui se prennent très au sérieux sous prétexte qu’ils appartiennent à une certaine élite”, explique-t-il. Et d’ajouter: “Chaque roman correspond à une période de ma vie.” Issu d’un milieu bourgeois parisien, Louis Lanher use les bancs de la faculté de droit d’Assas, avant de devenir avocat. Après deux ans de barreau, lassé du droit, il commence à travailler comme chroniqueur à la radio et à la télévision. Il est aujourd’hui journaliste dans le divertissement télévisuel. Des étudiants de la faculté d’Assas –Microclimat, 2002-, aux créatifs en boîte de production –Un pur roman, 2004-, sans oublier les bourgeois parisiens bien lotis, tous ont senti dans leur chair potelée la pointe de sa plume vive et aiguisée.
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Tel un avocat à la barre, Louis Lanher déploie sa plaidoirie en renversant le discours féministe le plus extrême à grands renforts de mauvaise foi.
Le sujet de son dernier roman lui vient à la suite d’échecs répétés pour organiser “un week-end entre mecs”. Louis Lanher s’interroge alors sur la possibilité d’un découragement sociétal -dans son environnement bourgeois restreint- à l’organisation de réunions exclusivement masculines. L’auteur a enquêté sur le terrain, étudié la “théorie du genre”, bûché les ABCD de l’égalité, regardé des heures de conférence. Son jugement est sans appel: “Sous couvert d’égalité homme-femme ou femme-homme, la société tend quelque part vers un effacement de l’identité masculine. On nous somme de devenir des femmes comme les autres. Et moi, j’ai beaucoup de mal avec ça.” Tel un avocat à la barre, Louis Lanher déploie sa plaidoirie en renversant le discours féministe le plus extrême à grands renforts de mauvaise foi, celle-là même qui anime certains discours féministes jetant à la poubelle l’héritage de la nature. “Tous les moyens sont bons pour parvenir à mon objectif, même si c’est une insulte à toute forme d’intelligence”, souligne-t-il. Louis Lanher tourne en dérision ce que l’on n’a peut-être plus le droit de tourner en dérision. “J’ai eu un peu peur de me couper de toute vie sociale et de ne plus être invité chez ma belle-mère (Ndlr: personnage du roman)”, admet-il en riant, avant de changer de peau le temps de notre interview.
En tant que femme, te considères-tu comme féministe?
Je suis une féministe convaincue et attachée au bon sens. Je n’ai pas l’intention en tant que féministe d’adhérer à des théories fumeuses, comme la théorie du genre, et de devenir un être hors-sol. Je partage la pensée féministe, tout en continuant à affirmer mon identité de femme et en ayant des envies et des désirs sexués. Pour faire court, je suis une féministe attachée à mon altérité sexuelle.
Que penses-tu du mouvement des Femen?
Je suis assez étonnée de l’indulgence dont on fait preuve à l’égard de ce mouvement. J’ai l’impression que les Femen bénéficient d’une sorte de passe-droit qui leur permet de faire à peu près tout ce qu’elles veulent, sans n’être jamais vraiment condamnées par la bien-pensance. Finalement, quand elles coupent une croix catholique en Ukraine ou quand elles urinent sur les cloches de la cathédrale Notre-Dame de Paris, cela ne choque personne dans mon environnement bourgeois parisien. C’est cool et chic d’aller faire chier le catho.
L’homme est-il devenu un objet?
L’homme est devenu un objet que nous souhaitons façonner à notre image. À titre d’exemple, l’image du séducteur polygame a disparu du petit écran. Les séries font désormais l’apologie de la monogamie qui demeure finalement une attente plus féminine que masculine. Pour les hommes, la monogamie peut rester un effort. Cette stigmatisation du séducteur et du désordre sexuel participe au discours global qui tente de mettre l’homme dans un cadre. Pour y parvenir, il faut faire le deuil du bon sens et de l’intelligence…
“Désormais, l’objectif n’est plus de faire des femmes, des hommes comme les autres, mais de faire des hommes, des femmes comme les autres.”
L’homme doit-il se délester de ses attributs masculins pour séduire la femme?
C’est un peu ce qu’on lui demande. Paradoxalement, un comportement “féminin” de la part d’un homme dans un contexte sentimental n’est pas un atout de charme aux yeux des femmes.
À l’inverse, la femme doit-elle se délester de ses attributs féminins pour évoluer socialement? Le féminisme serait-il l’antithèse de la féminité?
Je pense que dans un premier temps, c’est ce qui a été préconisé. On a dit aux femmes: “Vous allez faire comme les mecs, vous allez avoir les mêmes envies, les mêmes attentes, vous allez jouir d’une liberté sexuelle totale.” Les féministes se sont finalement rendu compte que cette attitude ne convenait pas aux femmes. Désormais, l’objectif n’est plus de faire des femmes des hommes comme les autres, mais de faire des hommes des femmes comme les autres. La tendance féministe actuelle pousse à l’affirmation de ses attributs féminins et, en parallèle, demande aux hommes de ne pas trop la ramener. On assiste plutôt à une féminité triomphante.
Comment ressens-tu le fameux “plafond de verre”?
J’ai toujours évolué dans des milieux professionnels où les différences salariales n’étaient pas très marquées. En tant qu’avocate, aujourd’hui journaliste, je ne me suis jamais sentie désavantagée. À noter tout de même que je travaille dans un univers (Ndlr: la télévision) majoritairement féminin. La plupart des personnes à qui je dois rendre des comptes sont des femmes qui, je pense, ne feraient pas en sorte de me payer moins.
Que penses-tu de la “théorie du genre”?
En tant que femme, j’ai pu me rendre compte, depuis mon enfance, que j’étais tenue par quelques réalités naturelles. Aujourd’hui, on me dit que ces réalités ne sont que mensonge. Tout ceci n’avait que pour but de me réduire au rôle de parfaite épouse. Ma poitrine et ma capacité à enfanter ne me différencient d’aucune manière. Alors, j’aimerais bien y croire, mais j’ai quand même du mal avec un QI supérieur à 60. D’ailleurs, tout est dans le titre! La théorie du genre reste une théorie. Une théorie qui ne résiste pas longtemps à l’analyse du quotidien.
Le rose, est-il une couleur féminine?
Le rose, cheval de bataille des féministes les plus acharnées qui ont déclaré la guerre aux princesses des contes de fées et encouragent les petites filles à s’habiller en plombier. Mais, quand je vois les petites filles de mes amis, c’est robes, paillettes et barrettes. En disant cela, je tends une perche aux plus hardies des féministes. Cependant, je ne fais que constater le quotidien. Le rose est définitivement une couleur féminine.
Ton icône féminine?
Un modèle à l’ancienne, à l’image de Grace Kelly, gracieuse et inaccessible à la fois. Najat Vallaud-Belkacem doit également représenter beaucoup d’espoir pour une majorité de féministes, de par son âge, sa position et son discours.
Que dirais-tu aux machos?
Je leur dirais qu’ils nous manquent! L’homme doux et compatissant, qui partage les tâches ménagères et s’occupe des enfants, celui-là, nous l’avons bien formaté, pas de doutes là-dessus, peut-être même un peu trop. Mais tout ceci manque cruellement de testostérone. Je pense que la majorité des machos sont civilisés. Reste cette minorité de machos odieux et détestables qui peuvent se montrer agressifs envers les femmes. Ceux-là ne nous manquent pas. Mais, je ne serais pas contre le retour du macho sympa, le macho à l’ancienne, qui existe toujours, mais qui n’ose plus s’affirmer.
Propos recueillis par Léandra Ricou
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