Sa websérie Féminin/Féminin aborde l’homosexualité féminine de façon directe et impertinente, sur le mode du docufiction. L’occasion de poser toutes nos questions cash à la réalisatrice Chloé Robichaud.
À 25 ans, la Québécoise Chloé Robichaud a fait de l’homosexualité féminine le thème de sa nouvelle websérie, Féminin/Féminin, diffusée sur Internet depuis le 14 janvier. L’année dernière, son premier long métrage Sarah préfère la course lui avait valu d’être sélectionnée à Cannes dans la section Un Certain regard. Dans Féminin/Féminin -clin d’œil au titre du film de Jean-Luc Godard, Masculin, féminin– la réalisatrice mêle fiction et documentaire. Une façon pour elle d’offrir un éclairage sur la communauté lesbienne en jouant sur le naturel et la spontanéité des personnages. Envolés donc les tabous et les non-dits, on suit les aventures d’une bande de copines lesbiennes qui abordent avec humour leurs problèmes quotidiens. Le projet est né de sa rencontre avec Florence Gagnon, rédactrice en chef du site LezSpreadTheWord, qui voulait présenter l’univers lesbien d’un point de vue positif. Interview.
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Pour une fois, ta série parle des lesbiennes sans être édulcorée. Est-on trop frileux pour entendre un discours cash sur l’homosexualité féminine?
Non je ne pense pas, mais c’est vrai qu’on en entend peu parler. J’ai toujours été dans l’hyperréalisme dans ce que je fais: c’est une manière de ne pas tomber dans les clichés, comme peut le faire la fiction lesbienne. Je pense à The L Word par exemple. J’apprécie cette série, elle a ouvert des portes à la communauté, mais elle est peu réaliste. Les femmes sont toutes riches et n’ont pas l’air de travailler. (Rires.) Pour l’instant, les gens n’ont pas été choqués par Féminin/Féminin, il y a même des gosses qui m’ont écrit pour me dire qu’ils avaient aimé ça. Les gens sont surpris du fait que ces filles peuvent vivre ce que tout le monde vit.
Au début, il y a un débat sur le mot gouine, dont l’usage serait permis entre lesbiennes mais insultant venant d’un ou d’une hétéro. Alors, dirais-tu que c’est une série sur les gouines?
Oui, effectivement, et je suis lesbienne donc j’ai le droit de dire “gouine” (rires). Mais c’est avant tout une série que j’ai voulue riche en personnages. Ils sont tous très différents, il y a plusieurs visages, plusieurs looks, tout ça dans le but de montrer la diversité de notre communauté.
La réalisatrice Chloé Robichaud sur le tournage, DR
L’homosexualité féminine est-elle plus taboue que l’homosexualité masculine?
Non, je ne pense pas, mais c’est vrai qu’on en parle moins que l’homosexualité masculine. Je ne sais pas pourquoi, peut-être parce qu’ils ont été davantage visés par les critiques. Mais il y a un vent de changement, ici au Québec, ou en France, où les médias parlent de plus en plus des lesbiennes. J’ai vu La Vie d’Adèle et j’ai adoré ce film. Même s’il est un peu dans le fantasme masculin, il est magnifique et fait ressentir la passion qu’il y a entre ces deux filles.
Les réseaux sociaux sont-ils homophobes ou gay friendly?
Eh bien, j’ai été agréablement surprise de tout l’amour que j’ai reçu, de tous les messages de soutien. Cela m’est déjà arrivé de recevoir des messages homophobes mais depuis le lancement de la série, jamais. J’espère que ça n’arrivera pas, pour l’instant ce n’est que de la joie.
À quoi servent les réseaux sociaux pour la promo?
C’est une façon de promouvoir la websérie à grande échelle. C’est un outil de communication formidable qui me permet de toucher d’autres pays que le Québec. C’est ce que je veux, être partout.
Tu mets le paquet sur les femmes, elles sont omniprésentes dans tes projets. Pourquoi?
Selon moi, il y a un manque de rôles féminins intéressants et forts. Et puis on parle toujours de ce qu’on connaît, donc je parle des femmes. Au Québec on a pour la première fois une femme première ministre (Ndlr, Pauline Marois): c’est un moment historique et ça m’intéresse de voir comment les femmes s’adaptent aux changements.
Propos recueillis par Dalia Raad-Jawad
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