La Française Maud-Elisa Mandeau, alias Le Prince Miiaou, sort un nouvel album remarquable au titre à rallonge: “Where Is The Queen?” “Who is Asking?” “I Can Not Tell” ”She’s Gone”“Gone Where?” “Just Gone…” . On a remonté avec elle sa timeline Facebook.
Faute de mieux, on l’a souvent comparée à PJ Harvey pour l’orientation rock de ses chansons et sa façon de jouer avec l’intensité de sa voix. Maud-Elisa Mandeau, 30 ans cette année, sort son quatrième album sous l’alias Le Prince Miiaou. Après Safety First, qui lui a valu en 2009 les éloges de la presse, et Fill The Blank With Your Own Emptiness, marqué par sa signature avec le label 3e Bureau (Brigitte, Orelsan), la Picto-Charentaise continue d’incarner l’indépendance la plus obstinée.
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Auteure et compositrice, elle réalise tous ses clips elle-même depuis ses débuts (elle accompagne d’ailleurs la sortie de ce nouvel album d’une série de vidéos à visionner sur sa chaîne YouTube, dont cet hommage appuyé aux Goonies), confectionne une partie de ses disques à la main ou construit elle-même son ordinateur.
Quand il lui reste un peu de temps, Le Prince Miiaou répond aussi à des interviews avec enthousiasme, une dose impressionnante d’autodérision et sans rien tenter de dissimuler de son quotidien d’artiste, de ses pannes d’inspiration à ses questionnements capillaires.
Le 2 septembre 2009, tu t’inscris sur Facebook. Tu t’en souviens?
Je venais sans doute de découvrir Facebook, plus tard que les autres. Je suis un peu réfractaire à la nouveauté, j’ai un côté “c’était mieux avant”. Par exemple, j’ai toujours du mal à me mettre à Twitter. Moi, j’aimais bien MySpace. Il n’y avait pas de bouton “like” et du coup, je me demandais moins si ce que je postais était pertinent, je me sentais moins jugée. J’avais davantage l’impression d’être dans ma bulle, même si j’étais obnubilée par le nombre de vues que j’avais par jour. J’ai d’ailleurs fait un mémoire de sociologie sur l’addiction à MySpace.
Le 15 novembre 2009, tu écris: “Écoute DIAM’S et prend une claque…ben ouais…”. Écouter Diam’s pour toi, ça relève du plaisir coupable?
Diam’s était sans doute en homepage de Deezer ou quelque chose comme ça et j’ai dû avoir un élan de curiosité, ce qui m’arrive rarement -habituellement, je suis assez monomaniaque, j’écoute un disque par an. J’ai donc écouté ce morceau, j’ai aimé l’instru et j’ai trouvé que c’était sincère et couillu.
Le 23 juin 2010, tu postes: “Pense sérieusement à se retirer du monde de la musique (…)” Un petit coup de mou?
J’étais en train de composer Fill The Blank… et je n’y arrivais plus. Je me prenais des discours de maisons de disques et de radios qui me disaient d’écrire en français et de faire de la musique formatée. Et puis, composer était devenu une obligation, un métier, alors qu’avant je le faisais juste par envie. Je me suis donc dit qu’en arrêtant, je retrouverais peut-être ce désir. (Sourire.) J’ai beaucoup de phases de découragement.
Le 18 novembre 2010, tu t’interroges: “Choix cornélien, doute insurmontable, question de vie ou de mort… Blonde again ou chatain forever… Mmmm?” Tu attaches autant d’importance que ça à ta couleur de cheveux?
Ce post était bien entendu un peu ironique, même si j’ai littéralement failli mourir à cause de mes décolorations à répétition. Tous les matins, je me regardais dans le miroir et je me disais que ce blond ne m’allait pas du tout. Je le faisais uniquement parce que c’était un peu rock, que j’aimais bien ce que ça donnait sur scène. Comme mon visage n’a rien de particulier, ça me permettait de me démarquer un peu. Mais c’était tellement douloureux physiquement; ça me brûlait le crâne. J’ai fini par faire un œdème de Quinck en 2011 et j’ai définitivement arrêté les décolorations à ce moment-là.
Le 8 avril 2011, tu postes une photo de toi sur le bord de la route et tu écris: “Fuck that shity vito”. Qui est donc ce “Vito”?
Vito, c’était le modèle de mon camion Mercedes qui n’arrêtait pas de tomber en panne. Quand je me suis lancée dans le projet du Prince Miiaou, j’ai eu la chance que mes parents m’aident en me donnant deux choses: un petit pécule et un camion. Ils m’ont dit “maintenant, débrouille-toi avec ça”. Finalement, c’était un cadeau empoisonné car il tombait en panne tout le temps. Depuis j’ai changé, j’ai un Traffic qui marche très bien.
Le 29 mars 2012, tu es à New York. Qu’est-ce que tu y fais?
Je déteste voyager et perdre mes repères, mais j’ai décidé de me faire violence et de partir en voyage toute seule. J’avais beaucoup tourné, je n’en pouvais plus, j’avais envie d’arrêter la musique. J’en avais marre d’entendre parler du Prince Miiaou et je voulais redevenir Maud-Elisa. J’ai donc pris mon courage à deux mains et je suis partie un peu sans réfléchir, en laissant mon copain et sans parler super bien l’anglais… Ce n’est qu’à l’aéroport que j’ai réalisé ce que j’étais en train de faire! Au final, je ne le regrette pas une seconde; j’ai retrouvé le goût de la composition là-bas et très vite, je me suis remise à écrire. Au bout de trois mois, je suis rentrée.
Le 14 août 2012, tu postes une photo d’ordinateur démonté. Tu es une vraie geek?
J’ai commandé toutes les pièces qui permettent de le fabriquer et pour la première fois, je me suis lancée dans le montage de mon ordinateur. Mon frère, qui est un vrai geek, m’avait dit que ce n’était pas si compliqué que ça, que toutes les choses trouvaient facilement leur place. Et au pire, je savais qu’il me servirait de hotline en cas de souci. Ça fait peur, mais en fait c’est assez simple de monter un ordinateur. Bon, forcément, quand j’ai essayé de l’allumer, ça ne marchait pas! J’ai mis une journée à comprendre d’où ça venait. En tout cas, ça coûte beaucoup moins cher de le monter soi-même et ça donne des machines super puissantes.
Le 16 octobre 2013, un documentaire sur toi sort au cinéma et Télérama en parle. De quoi s’agit-il?
Le documentariste Marc-Antoine Roudil cherchait à faire un film sur la création et sur la musique rock. Il a pensé à moi en lisant un article dans Libération. On a passé trois semaines ensemble dans ma pièce de composition, qui fait 6m². C’était un peu comme pour mon voyage à New York: au départ, je déteste être filmée, mais j’aime bien me mettre dans des situations inconfortables pour le challenge. L’étape du visionnage, elle aussi, a été très difficile. C’est un film brut, qui ne triche pas, je n’y suis pas maquillée, pas coiffée, et il y a beaucoup de moments où je suis en difficulté. Ça ne me met pas en valeur, mais c’est la réalité. J’avais envie de montrer que le monde de la musique, ce n’est pas que du glamour.
Le 15 novembre 2013, tu annonces l’arrivée d’un premier extrait de ton nouvel album. L’excitation semble être à son comble…
J’ai travaillé sur ce nouvel album pendant un an et demi et là, c’était le premier jour où j’allais avoir la sentence du public. Du coup, je suis un peu restée bloquée derrière mon ordi à attendre de voir si les gens regardaient le clip ou pas. C’est stressant, ce moment où tu perds le contrôle de ta musique et où tu vas te faire juger. Et moi, j’ai du mal avec le jugement, car j’ai envie de plaire à tout le monde. Mais franchement, ce disque, je le trouve plus réussi que les autres. Pour la première fois, je crois que je suis assez contente de moi.
Propos recueillis par Faustine Kopiejwski
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