Tous les vendredis, retrouvez les aventures de Romy Idol. Mecs, boulot, famille, quotidien: Romy, c’est nous en pire.
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Tous les vendredis, retrouvez les aventures de Romy Idol. Mecs, boulot, famille, quotidien: Romy, c’est nous en pire.
Pour la plupart d’entre nous, la rupture est un moment crucial pour la dignité. Certes, il y a la rupture hollywoodienne. Ni cris, ni larmes. Uniquement du calme et de la sagesse. Et en général, un communiqué de presse qui dit: “Brad et Angelina ont décidé d’un commun accord de mettre fin à leur relation.” Mais dans la vraie vie, celle de ceux qui n’ont pas d’attaché de presse, c’est plus compliqué. Et souvent, ça part en vrille. C’est en général à ce moment-là que la notion de fierté se fait aléatoire.
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C’était un soir. Il était tard. Mon sexfriend, au bout du fil, avait décidé de me larguer. Faut dire que mon ultimatum raté avait un peu accéléré le processus. Donc j’étais là, sanglotant et me mouchant sur mon canapé, en pyjama Donald et t-shirt Barbie, le smartphone dans la main droite et le rouleau de papier toilette mouillé dans la gauche. En l’espace d’une demi-heure de conversation, j’étais passée par les étapes classiques: étonnement, déni, colère, tristesse et supplication. J’en étais aux pleurs et aux cris. Donc je criais en pleurant -ce qui, soit dit en passant, rendait mes paroles inintelligibles car, comme chacun sait, quelqu’un qui parle en pleurant, c’est à peu près l’équivalent du niveau d’élocution d’un bébé de huit mois qui serait bourré. Mon pathétique réquisitoire n’avait aucun impact, j’allais devoir trouver mieux.
Pour accroître le côté dramatique de la scène, je raccrochais au nez de mon sex friend.
Et là, une seconde a suffi pour qu’un plan minable m’apparaisse comme un moyen de sauvetage amoureux tout à fait honorable: le chantage au suicide. J’ai dit: “Si tu me quittes, je vais me jeter par la fenêtre.” En vrai -rapport aux pleurs et au nez bouché-, ça donnait plutôt: “Jé vèche mecheter par la fenèt.” Pour accroître le côté dramatique de la scène, j’ai raccroché au nez de mon sexfriend. Mon degré d’articulation étant approximatif, il se pouvait qu’il n’ait pas entendu la menace. Mais quinze secondes plus tard, mon téléphone a sonné. Au bout du cinquième appel -comme j’ai un minimum d’humanité- j’ai fini par décrocher.
Mon sexfriend:
– “Putain, t’es folle, j’ai appelé les pompiers!”
Moi (en colère):
– “Quoi, mais t’es ouf? Pourquoi t’as fait ça?”
Lui (penaud):
-“Ben, tu m’as dit que t’allais te jeter par la fenêtre…”
Moi (toujours en colère):
– “Mais putain tu fais chier, tu vas les rappeler TOUT DE SUITE pour les ANNULER!”
Lui (toujours penaud):
-“Ok…”
Mais j’ai repensé aux épisodes de New York Unité Spéciale et je suis revenue à la raison.
Une minute plus tard, mon sexfriend et moi avons appris quelque chose: il est IMPOSSIBLE d’annuler des pompiers. Ben ouais, c’est pas les taxis G7. Cette nouvelle a été suivie dans la seconde de: “Bababam, bababam, bababam.” On tambourinait à ma porte. “Pompiers de Paris!” À ce moment-là, j’ai bien pensé éteindre les lumières et me terrer sous ma couette en attendant que ça passe. Mais j’ai repensé aux épisodes de New York Unité Spéciale et je suis revenue à la raison. Car si tous mes voisins devaient déjà être réveillés, je préférais éviter que l’avenue entière se masse sous ma fenêtre pendant que les pompiers déployaient l’échelle de secours. Je suis allée ouvrir et là, j’ai vu quatre pompiers débarquer dans mon studio de 16m². Avec leurs trousses d’urgence et un fort accent du Sud. “Alors, ma p’tite dame, qu’est-ce qui se passe ici? Ça va pas?”
Avant même que je n’aie le temps de répondre, l’œil de lynx du capitaine a fixé avec gravité la boîte d’Euphytose qui trônait sur ma table de nuit. Il l’a attrapée et s’est tourné vers moi:
– “Vous avez pris combien de comprimés mademoiselle?”
Moi:
– “Euh, aucun.”
Lui:
– “Vous êtes bien sûre de vous?”
Moi (pensant à Jean-Pierre Foucault):
-“Oui, c’est mon dernier mot.”
Je me suis alors demandé si la passiflore et l’aubépine pouvaient provoquer une overdose et j’ai pensé leur poser la question. Mais je me suis abstenue. Ils ont insisté pour prendre mon pouls et pour ne pas les vexer, j’ai coopéré. Même si la caserne n’était pas loin, il ne fallait pas qu’ils aient l’impression d’avoir fait le trajet pour rien. Et je me suis jurée de prendre un attaché de presse la prochaine fois.
Romy Idol
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