Cette créatrice romaine a fait du Wax&Stripes -un mélange de rayures et de wax- sa marque de fabrique et s’inspire autant de ses origines haïtiennes que de sa culture italienne pour ses collections. Interview.
C’est la nouvelle promesse italienne de la mode internationale depuis que Giorgio Armani lui a ouvert les portes de son théâtre milanais pour la présentation de sa collection Printemps-Eté 2014 en septembre dernier. Italo-haïtienne, Stella Jean a fait de sa diversité culturelle une force et crée des collections bien à elle, après avoir remporté en 2011 le prestigieux concours Who is On Next, organisé en partenariat avec le Vogue italien. Cette année, elle a également lancé sa première collection pour hommes à l’occasion du salon florentin Pitti Uomo. Rencontre avec une métisse de caractère et, plus que jamais, fière de ses origines.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Italo-haïtienne née à Rome, comment vivez-vous votre diversité culturelle dans un pays comme l’Italie où le racisme est en recrudescence?
Bien que je sois issue d’un milieu privilégié et que j’aie fréquenté les meilleures écoles, je n’ai pas été épargnée par les préjugés. L’Italie des années 80 n’était pas préparée aux familles multi-ethniques. Aujourd’hui encore, à chaque fois que je dis que je suis romaine, cela suscite l’incrédulité. Si je me suis penchée sur mes origines caribéennes, c’était par curiosité mais aussi parce que j’étais poussée par un besoin humain d’appartenance à une communauté.
Collection printemps-été 2014
Que vous apporte votre double culture au niveau créatif?
Ma première collection, que j’ai appelée Wax&Stripes, a représenté pour moi la paix acquise entre les deux composantes, diamétralement opposées, qui constituent mon identité. La mode m’offre un espace au sein duquel je peux faire cohabiter ces deux cultures. Elle m’a également permis de transformer un “talon d’Achille” en atout. Il me faudra encore du temps pour apprendre à connaître et étudier les diverses cultures et traditions que je veux mixer: ce que je crains le plus, c’est la facilité avec laquelle on utilise les traditions du sud de l’équateur, avec une légère tendance à la caricature.
Et à titre personnel?
En ce qui me concerne, je traite mes deux cultures avec une certaine ironie et avec respect. Je suis convaincue qu’il n’existe aucune limite aux mélanges culturels à la seule condition que l’on fasse preuve de bon sens et d’éducation.
Votre mère est une passionnée de mode, votre père de joaillerie: cela vous a-t-il influencée?
Ils m’ont certainement aidée en m’insufflant une naturelle inclination d’esthète.
Pourquoi avoir choisi de devenir styliste alors que vous aviez débuté une brillante carrière de mannequin?
J’éprouvais le besoin de me raconter et non celui de me montrer. La créativité est un moyen de communication extraordinaire pour moi.
Collection printemps-été 2014
Le Wax&Stripes est-il un héritage maternel?
Non, il a un sens parce qu’il unit mon profond italianisme, symbolisé par les rayures, à mon côté créole, symbolisé par le wax. J’ai deux cultures, c’est un dialogue et non un monologue.
Vos origines expliquent-elles votre participation à la ITC Ethical Fashion Initiative?
Mes origines italiennes autant que mes origines haïtiennes m’ont influencée, même si je suis convaincue que l’empathie et la sensibilité se développent indépendamment de la latitude.
Qu’avez-vous en commun avec la femme Stella Jean pour laquelle vous créez?
Tout, pour la simple raison que je raconte mon histoire personnelle.
Propos recueillis par Hélène Battaglia
{"type":"Banniere-Basse"}