Le 2 mai dernier, le média américain Politico publiait des documents révélant la potentielle abrogation de la loi Roe v. Wade par la Cour suprême des Etats-Unis. Voté en 1973, l’arrêt Roe garantit le droit à l’interruption de grossesse aux femmes américaines en limitant les lois anti-avortement dans les différents États.
Les femmes américaines vont très certainement se voir retirer l’un de leurs droits le plus fondamental, celui à l’avortement, pourtant garanti depuis 1973 et l’arrêt Roe v. Wade. Le 2 mai, le média Politico révélait des documents ultraconfidentiels, rédigés par le juge conservateur à la Cour suprême Samuel Alito en février dernier : “Nous estimons que Roe et Casey doivent être annulés. […] Il est temps de respecter la Constitution et de renvoyer la question de l’avortement aux élus du peuple”, écrit-il, “la conclusion inéluctable est que le droit à l’avortement n’est pas profondément enraciné dans l’histoire et les traditions de la Nation”, ajoute le juge qui avait été nommé en 2006 par George W. Bush. Le brouillon de décision, composé de 98 pages, sera examiné jusqu’à son verdict en juillet prochain. Le démantèlement des lois pro-avortement pourrait également charrier avec lui des restrictions concernant les méthodes de contraception, mais aussi les droits LGBTQI+.
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Un long processus de retour en arrière
Le 22 janvier 1973, la Cour suprême américaine légalisait le droit à l’avortement avec un arrêt intitulé Roe v. Wade. Celui-ci reconnaissait aux femmes leur droit à disposer de leur corps, sous respect du “droit à la vie privée”. En 1992, les juges de la Cour renforçaient l’arrêt Roe par la loi Planned Parenthood v. Casey, qui stabilise le point de “viabilité” du fœtus à 24 semaines de gestation. Jusqu’à présent, la loi Casey interdisait donc aux États d’adopter des lois restreignant l’avortement avant ce seuil. Pourtant, depuis de nombreuses années, les mouvement pro-life portés par les États conservateurs et encouragés durant le mandat de Donald Trump, illustrent le clivage qui divise encore le pays. En 2018, l’ex-président américain supprime les subventions aux centres de santé qui pratiquent l’interruption volontaire de grossesse et élit trois juges conservateurs à la Cour suprême – Neil Gorsuch, Brett Kavanaugh et Amy Coney Barrett.
Tant attendue par les républicains, l’abrogation de la loi serait appuyée par Kavanaugh, Barrett, Gorsuch et Clarence Thomas. Face à eux, les trois démocrates – qui sont en infériorité numérique – Sonia Sotomayor, Stephen Breyer et Elena Kagan, défavorables à la révision de la loi Roe, n’auront que peu de pouvoir. La décision majoritaire de la Cour suprême découle d’un effet domino qui a vu un à un les États conservateurs exprimer leur désaccord avec les lois. Malgré les garanties que supposent les lois Roe et Casey, vingt-six États ont d’ores et déjà voté diverses restrictions très oppressives vis-à-vis des femmes. En 2019, quatorze États américains signaient des arrêts limitant l’accès à l’avortement, parmi lesquels l’Arizona, le Missouri, le Kentucky, l’Ohio ou encore l’Alabama, qui adoptaient les lois les plus restrictives en interdisant l’IVG après six semaines de grossesse, même en cas de viol ou d’inceste. En 2021, le Texas leur emboitait le pas et ce sans la moindre intervention de la Cour. Parmi les cinquante États américains, seuls quatre sont favorables à l’avortement, dont la Floride qui s’avère être “très favorable” à ce droit, d’après un recensement du Monde.
Gouvernement pro-choice
En septembre 2021, le Président Joe Biden, catholique mais défenseur du droit à l’avortement, qualifiait la loi texane de “violation flagrante du droit constitutionnel reconnu dans l’arrêt Roe v. Wade”. Alexandria Ocasio-Cortez et Kamala Harris, respectivement représentante démocrate et vice-présidente des États-Unis, avaient également apporté leur soutien : “L’administration Biden-Harris se bat toujours pour protéger l’accès aux soins de santé et défendre le droit d’une femme à prendre les décisions concernant son corps”, assurait Harris sur Twitter. Suite à la fuite du texte de Samuel Alito, Joe Biden s’est dit prêt à agir dès lors que la décision serait rendue. Il appelle les Americain·es à défendre le droit “fondamental” à l’avortement dans les urnes des législatives, à l’automne prochain : “Nous aurons besoin de plus de sénateurs favorables au droit de choisir, et d’une majorité en ce sens à la Chambre des représentants, pour adopter une législation que je promulguerai codifiant [l’arrêt actuel]”, promet-il.
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