Alors même que la France a engrangé à Sotchi une moisson record de médailles, les Bleues ne peuvent en revendiquer que trois. Pourquoi les Françaises ont-elles si peu brillé aux Jeux olympiques?
Sur les quinze médailles olympiques ramenées de Sotchi dans les valises de la délégation française -un record-, seules trois ont été décrochées par des femmes. C’est peu. Même si aux JO le duel tourne toujours ou presque en faveur de ces messieurs, c’est rarement dans de telles proportions. Derrière cette différence persistante, il y a d’abord une simple question d’arithmétique: sur les 98 médailles attribuées à Sotchi, 49 l’ont été à des hommes et 43 seulement à des femmes.
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1+1 faisant jusqu’à preuve du contraire 2, les Français avaient donc plus de chances de remporter des médailles que les Françaises.
Mathématiques, talent et chance
En effet, ces dames ne participaient qu’à une seule épreuve de saut à skis (contre trois pour ces messieurs), une en bobsleigh (contre deux chez les hommes) et aucune en combiné nordique (contre trois chez leurs homologues masculins). La délégation française comptait aussi moins de femmes que d’hommes, 38 sur 110 (en excluant les trois couples concourant en patinage artistique et en danse sur glace). 1+1 faisant jusqu’à preuve du contraire 2, les Français avaient donc plus de chances de remporter des médailles que les Françaises.
Mais le sport ce n’est pas que des maths, c’est aussi et surtout du talent. Les Bleues en auraient-elles manqué, contrairement à leurs homologues masculins? En fait, elles auraient plutôt cruellement manqué de chance, ce qui ne pardonne pas dans une compétition qui ne se déroule que tous les quatre ans. Les blessures ont ainsi privé le ski alpin de ses deux leaders, la championne du monde de descente Marion Rolland et la championne du monde de slalom géant Tessa Worley. La chef de file du biathlon Marie Dorin-Habert, victime d’une grave entorse à la cheville fin novembre, a longtemps été incertaine et n’a pas pu se préparer dans les meilleures conditions.
Le sport féminin peu valorisé
Après elles, il n’y avait que peu de sportives capables de prendre le relais, moins d’outsiders que chez ces messieurs. Denis Masseglia, président du Comité olympique et sportif français (CNOSF), et Fabien Saguez, directeur technique national de la Fédération française de ski, s’accordent à le dire: en France, il y a moins de “densité” chez les femmes que chez les hommes. Ce qui n’est pas le cas partout, notamment dans les pays anglo-saxons, où les deux sexes font jeu égal.
« La société ne met pas suffisamment en valeur les femmes et le sport. Aujourd’hui, les jeunes filles font plein d’autres choses que du sport, parce que le sport ça n’est pas très valorisant.”
Tous deux partagent également la même analyse: les raisons de ce déficit sont culturelles et ne concernent pas uniquement les sports d’hiver mais tous les sports, tant au niveau récréatif que professionnel. « La société ne met pas suffisamment en valeur les femmes et le sport. Aujourd’hui, les jeunes filles font plein d’autres choses que du sport, parce que le sport ça n’est pas très valorisant”, regrette Fabien Saguez. “Il y a un véritable travail d’approche à faire pour que les femmes, les filles notamment, fassent plus de sport”, abonde Denis Masseglia.
Un problème de budget
Derrière cette différence de résultats pointe aussi un reproche que l’on a souvent fait au sport professionnel: davantage de moyens seraient systématiquement alloués aux hommes. “Ça n’est pas une question de budget, réfute Denis Masseglia, c’est une question humaine plus que matérielle. Je crois que les structures en France sont conçues de la même manière pour les femmes et pour les hommes. Il faut faire en sorte qu’autant de filles que de garçons aillent dans les clubs.”
Coline Mattel, qui a remporté le bronze en saut à skis, à 18 ans. Chloé Trespeuch, également bronzée en snowboardcross, en a 19.
Mais assez parlé des absentes, faisons plutôt honneur à nos médaillées. Coline Mattel, qui a remporté le bronze en saut à skis, a 18 ans. Chloé Trespeuch, également bronzée en snowboardcross, en a 19. Plus jeune encore, Perrine Laffont, 15 ans seulement, a créé la surprise en atteignant la finale de l’épreuve de bosses. De quoi prédire de beaux jours aux Françaises en sports d’hiver?
“Bien sûr! Il n’y a pas péril en la demeure, au contraire”, rassure Fabien Saguez. “Et nous avons engagé un travail depuis déjà deux ou trois ans pour améliorer notre approche des choses et la manière dont on manage et dont on entraîne nos filles.” Verdict à Pyeongchang, en Corée du Sud, en 2018.
Raphaëlle Peltier (à Sotchi)
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