Jessica Mila a ouvert avec son compagnon un restaurant français en plein cœur de Medellín, la deuxième ville colombienne.
Avec son accent du sud, Jessica Mila le revendique haut et fort: elle aime la corrida, la Camargue et la Féria de Nîmes, sa ville natale. Il y a trois ans, la jeune femme de 34 ans quitte la France avec son compagnon pour poser ses sacs en Colombie, à 9000 km de Montpellier, où le couple vit à l’époque. Un an plus tard, ils ouvrent La Cantine, un restaurant français en plein cœur du Poblado, le quartier branché de Medellín, la seconde ville du pays.
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Avant le grand départ, Jessica Mila dirige sa propre boîte de communication et d’évènementiel entre Paris et Montpellier. Son compagnon, Pierre-Philippe dit Pépé, est restaurateur à Montpellier. Aucun des deux ne se sent alors pleinement épanoui dans son boulot, notamment Jessica qui se remet difficilement d’un investissement aventureux qui lui a fait perdre beaucoup d’argent: “J’étais en pleine interrogation et j’ai dû me poser les vraies questions, comme est-ce que je peux continuer à vivre comme ça, qu’est -ce que j’ai envie de faire?” C’est elle qui convainc Pépé que c’est le moment où jamais de partir se réinventer une vie.
“Je réalise un projet que j’aime, avec celui que j’aime. Je crois que j’ai trouvé la vie qui me correspondait.”
Après avoir fait le tour de la Colombie, et étudié les différentes options de villes ou de projets, c’est à Medellín qu’ils décident de monter leur restaurant, en couple. Pépé s’occupe de la carte et des fourneaux tandis que Jessica, diplômée de l’ESC Reims en info-com, installe, décore et administre le lieu. Les débuts sont éprouvants car la masse de travail s’apparente à un puits sans fond. Jessica Mila multiplie également les évènements, retrouvant ce qu’elle aime faire, ce qui permet au duo de se faire connaître. “Les premières semaines, je distribuais même des flyers à la sortie de la messe!”, se souvient-elle, amusée.
En deux ans, l’établissement est devenu l’une des tables les plus réputées de Medellín, aussi bien chez les locaux que dans la communauté française, qui s’y retrouve autour de magrets de canard ou de profiteroles. Et comme s’il n’y avait pas assez à faire, le couple vient de s’associer pour lancer il y a quelques mois Monsieur Burger, qui propose des hamburgers sur mesure. L’idée d’une franchise est en discussion. “Je réalise un projet que j’aime, avec celui que j’aime. Je crois que j’ai trouvé la vie qui me correspondait”, résume la jeune entrepreneure expatriée. On l’aura bien compris, aucun retour prévu pour le moment… Interview.
Pourquoi Medellín?
Je dirais que j’ai d’abord choisi la Colombie. Je cherchais un pays où il y avait une bonne croissance et la possibilité de développer de nouveaux projets, notamment dans la gastronomie. De plus, mes ancêtres sont espagnols et j’avais envie de vivre dans leur langue. Lorsque nous sommes arrivés avec mon compagnon, il y a trois ans, nous avons commencé par voyager pendant six mois. En faisant le tour du pays, je suis tombée amoureuse de cette ville: il fait presque toujours beau, la végétation est luxuriante et les gens sont accueillants. En fait, on avait aussi pensé à Bogotá, plus culturelle, dynamique, qui va vite, mais les opportunités professionnelles restaient plus abordables à Medellín. On avait un budget à tenir et il y avaient certaines choses que l’on ne pouvait pas réaliser à Bogotá.
Le truc local auquel tu as le plus de mal à t’habituer?
En travaillant dans un restaurant français, nous avons mis l’accent autant sur la gastronomie que sur une certaine idée du service “à la française”. Avec le personnel, je me rends bien compte que c’est très difficile de transmettre notre sens du détail, de la perfection. Il y a un manque de constance, tout est très irrégulier et je dois bien dire que ça m’énerve, moi qui suis extrêmement perfectionniste.
Celui dont tu ne peux plus te défaire?
La musique! Elle faisait déjà partie de ma vie avant, mais ici c’est encore autre chose. Et puis, avec la musique vient une certaine philosophie de vie: celle de la convivialité et de la légèreté. On ne se prend pas la tête et on vit le moment présent, sans penser à demain.
Le jour où tu t’es sentie chez toi à Medellín?
Au début, je trouvais que tout était bruyant, tout le temps. Et puis un jour, au bout de quatre ou cinq mois, je me suis rendu compte que je m’étais habituée aux nouveaux bruits, ceux de la Colombie. Je me souviens d’un Skype avec ma mère où je lui disais que toutes les choses qui me paraissaient étrangères en arrivant ne l’étaient presque plus. Je me suis mise à pleurer ce jour-là car j’ai eu peur d’oublier d’où je venais. Mais je réalisais aussi que je m’étais intégrée, ce qui était quelque chose d’important pour moi venant d’une famille d’immigrés.
Ton plat préféré?
Le jus d’orange frais du matin que je sors prendre dans la rue. Il y a énormément de fruits exotiques ici, c’est un régal. Et bien sûr le chicharron: de la couenne frite, typique de la région de Medellín.
Ce qui te manque le plus de la France?
Le saucisson et le fromage sans hésiter! Mes amis aussi évidemment, mais j’ai eu tellement de visites ces trois dernières années que je supporte la distance.
Mon carnet d’adresses
Le restaurant Carmen, DR
Mon boui-boui:
Le Social, un bar tout près de La Cantine. J’y vais en général pour boire une bière. C’est un endroit très convivial avec toujours du monde sur le trottoir, de la musique forte: j’ai l’impression d’être en pleine Féria de Nîmes et ça me fait des petits papillons dans le cœur!
Mon bar chic:
Les restaurants Ocio et Carmen dans le Poblado. J’adore aller y boire de bons cocktails faits par des bons barmen.
La visite que je recommanderais à tous mes amis:
Prendre les metrocables (Ndlr: les télécabines urbaines) car on voit vraiment la ville de là-haut. Ils permettent aussi d’aller au Parque España (en travaux pour le moment) ou au Parque Arvi. Normalement les metrocables sont des transports en commun mais ils sont devenus une attraction touristique, pour les étrangers comme pour les Colombiens.
Propos recueillis par Margot Loizillon, à Medellín
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