Tous les vendredis, retrouvez les aventures de Romy Idol. Mecs, boulot, famille, quotidien: Romy, c’est nous en pire.
Ça y est, j’ai invité le mec timide à dîner. 2015, j’ai décidé de reprendre ma vie en main. J’aurais pu décider d’aller nager avec des dauphins en Floride mais j’ai décidé de me fixer un objectif plus difficile: avoir de l’ambition pour ma vie amoureuse, devenir la Sheryl Sandberg de la love story en quelque sorte. Je déconne mais je dois dire que 2014 ne s’est pas si mal terminé que ça, j’ai finalement habilement contourné la difficulté du premier rencard avec Jules aka le mec timide en me rabattant sur la valeur sûre qu’est le brunch dominical. Ça ne s’est pas trop mal passé, si j’occulte ce moment où j’ai ri en même temps que je buvais mon jus d’orange. Il ne m’en a pas tenu rigueur et on s’est dit qu’on allait enchaîner avec un dîner à la rentrée.
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Dans un élan de courage, j’ai proposé “Chez moi?”, il a répondu “oui” et c’est comme ça que j’ai oublié l’espace d’un instant que mon alimentation quotidienne se composait de coquillettes, de pizza et de jambon de dinde. Bref, que je ne savais pas cuisiner et que même si l’échéance était en 2015 et qu’on était en 2014, j’aurais dû mentalement anticiper: de décembre à janvier, le temps passe vite.
Au début, j’ai bien pensé à faire une quiche. Ouais, une quiche, c’est bien, c’est simple mais pas trop non plus. La quiche au premier dîner, c’est IDÉAL, me suis-je dit. Avant d’imaginer la conversation que pourrait avoir le mec timide après ce fameux dîner avec l’un de ses potes:
– Alors cette soirée chez Romy?
– C’était sympa, on a mangé une quiche.
– Une quoi?
– Une quiche aux lardons.
– Ah ok.
Puis, un mois plus tard, le pote s’adressant à Jules:
– Tu sors avec la fille à la quiche alors?
Non, je ne veux pas devenir la fille à la quiche, encore moins la fille à la quiche aux lardons. J’élimine donc ladite tarte de mon plan d’action. De toute façon, je n’ai pas de four. Une fois le plan quiche tombé à l’eau, je commence à sérieusement baliser. À la veille du dîner, je n’ai toujours pas d’idée. J’ai passé en revue l’intégralité du site Marmiton.fr et ses 60 000 recettes. Entre les moules gratinées au morbier (imaginez, la fille aux moules…) et le filet mignon en croûte, je finis par écrire à Marmiton que leurs suggestions sont franchement limite. En vrai, il faudrait que je trouve un plat qui signifie “tu me plais bien mais c’est pas gagné non plus”. En faisant à tout hasard une recherche sur Google dans ces termes, je tombe sur un lapidaire “aucun document ne correspond aux termes de recherche spécifié”. Eh merde, même pas un forum Aufeminin en vue.
Une boule de mie de pain dans la bouche, et mon verre de vin dans la main droite, je me souviens d’un truc primordial: à un premier dîner, on ne mange pas.
Deux heures avant le dîner, je pense à ce que Sheryl Sandberg aurait fait en pareille situation et à défaut de trouver, j’opte pour la planche charcuterie-fromage, accompagnée d’une bonne bouteille de vin blanc. Je vérifie chaque détail de l’appartement, de la poubelle de ma salle de bains aux revues savamment (dé)posées sur la table basse du salon. Il est 20 heures, le terrain est prêt, Jules ne devrait pas tarder. Ça sonne. Faussement détendue, j’ouvre la porte.
Après les politesses habituelles –Alors, tes vacances?, Super, et les tiennes?”-, la soirée prend une tournure plutôt sympa. Le potentiel cool du mec se confirme. Une heure plus tard, nous sommes en pleine discussion sur la liberté d’expression et la tête commence à me tourner. Une boule de mie de pain dans la bouche, et mon verre de vin dans la main droite, je me souviens d’un truc primordial: à un premier dîner, on ne mange pas. Enfin, pas vraiment. D’une part, parce qu’on a cette boule au ventre et d’autre part, parce qu’on sait que tout ce qui se trouve sur la table est susceptible de se retourner contre nous. Le jambon de parme pourrait bien se retrouver coincé entre une canine et une incisive; quant au chèvre persillé, en prendre reviendrait à essayer d’attirer une gazelle en compagnie d’un lion. Bref, je regarde toute cette nourriture d’un air méfiant, je n’ai toujours rien avalé et je commence à être saoule.
Outre l’ivresse, je constate que les besoins naturels aussi constituent un obstacle au bon déroulement de cette soirée. Je maudis cet appartement dans lequel les toilettes sont collées au salon. À mon prochain déménagement, j’étudierai la question de plus près. J’y vais quand même et je fais on/off avec mon périnée. De retour dans le salon, je regarde Jules qui, lui aussi, est en train de se retenir. J’en déduis que je lui plais également. Aux alentours d’une heure du matin, nous nous quittons. Je me sens soulagée. Ça y est, c’est fini, Jules et moi avons passé le cap du premier dîner. Heureuse, je m’affale sur le canapé et me prépare un bon sandwich avec les restes. D’un coup, j’ai de nouveau faim.
Romy Idol
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