Sorti en France au début du mois de mars, l’ouvrage de la journaliste américaine Jessica Bennett, Feminist Fight Club, traduit en français par Le Fight club féministe, propose avec humour des astuces pratiques, basées sur les découvertes les plus récentes en sciences sociales, pour combattre le sexisme “insidieux”.
Combattre le sexisme au quotidien n’est pas toujours facile, surtout quand il est “insidieux”. La journaliste américaine Jessica Bennett, 35 ans, a voulu simplifier la vie aux femmes en écrivant un livre sur le sujet, à mi-chemin entre le manuel et le manifeste féministe. Un ouvrage pensé comme un outil pratique à garder tout le temps sous la main, rempli d’astuces et de conseils simples pour combattre ce sexisme qui ne dit pas son nom, dans lequel vous pouvez aller piocher des idées quand vous en avez besoin. Nous avons posé quelques questions à celle qui souhaite rendre le combat féministe drôle et accessible à toutes et à tous.
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Tu as participé à la rédaction du livre Lean In de Sheryl Sandberg. Pourquoi as-tu ressenti le besoin d’écrire une version plus “milléniale” du livre?
Le Fight club féministe est le livre que j’aurais voulu avoir au début de ma carrière. J’avais deux objectifs en l’écrivant: exposer les immenses changements structuraux et politiques -qui sont toujours nécessaires dans les lieux de travail-, mais également offrir aux femmes et aux hommes des astuces simples, faciles à suivre et efficaces pour combattre les comportements sexistes. Je voulais proposer des conseils pour les problèmes que toutes les femmes peuvent rencontrer. Que sommes-nous supposées faire lorsque nous voulons tout simplement une hausse de salaire? Comment puis-je régler ce problème sans passer pour une râleuse? Ce sont des choses qui peuvent sembler insignifiantes mais, quand elles ont tendance à s’accumuler, elles peuvent prendre des proportions énormes. Et surtout, je voulais rendre le combat contre le patriarcat plus amusant. Ce sont des problèmes sérieux, mais, parfois, en rire est le meilleur moyen pour ne pas abandonner et renoncer à se battre.
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Pourquoi as-tu adressé un manuel aux hommes?
Tout le monde part du principe que c’est un livre pour femmes. Mais c’est pour les hommes aussi, pour qu’ils puissent reconnaître leurs propres comportements, et devenir nos meilleurs alliés. En réalité, la plupart des jeunes hommes souhaitent l’égalité, beaucoup se considèrent même féministes. Mais c’est souvent plus facile à dire qu’à faire. Et je peux comprendre que ce soit difficile de savoir quoi faire exactement. Je considère qu’il faut inclure les hommes dans nos conversations, leur proposer de rejoindre nos équipes, et je voulais donc leur offrir cette possibilité. À la fin du livre, il y a un chapitre qui s’appelle PSA (Ndlr: Penile Service Announcement, en français “Avis de service pénien”): c’est une liste de 16 astuces simples que les hommes peuvent mettre en place quotidiennement sur leurs lieux de travail. Ce serait par exemple faire tout leur possible, s’ils sont dans une position d’employeur, pour que pour chaque homme blanc qu’ils reçoivent en entretien d’embauche, ils reçoivent un nombre équivalent de femmes et de personnes issues de la diversité.
Quelles seraient tes recommandations pratiques pour monter son propre fight club féministe?
Un fight club féministe (FCF) peut être composé d’un certain nombre de femmes et d’hommes, il est ouvert à tous ceux qui croient en l’égalité et qui veulent se battre pour elle. Une condition importante est de se rencontrer régulièrement, par exemple pour un café une fois par mois. Vous devez trouver des moyens pour vous soutenir, réfléchir ensemble à comment vous battre pour ce qui est juste. Votre FCF peut être structuré de n’importe quelle façon -mais le plus important est d’avoir un espace pour parler ouvertement et honnêtement des problèmes sexistes auxquels vous êtes confrontées.
“Le sexisme insidieux est très dangereux parce qu’il est plus difficile à repérer et donc à dénoncer.”
Tu considères dans ton livre que nous vivons dans l’ère du “sexisme insidieux”. Un sexisme ouvertement hostile, à l’image de celui de Donald Trump, pourrait-il faire son come-back?
Je suis la première à le dire: j’ai écrit tout un livre sur le sexisme insidieux et comment le combattre et, peu de temps après, un Président qui est l’exemple même du sexisme ouvertement hostile, est élu. Cependant, cela ne signifie pas que le sexisme insidieux n’est pas néfaste, et très souvent il est même encore plus dangereux parce qu’il est plus difficile à repérer et donc à dénoncer. Comme je l’écris dans le livre, cette forme de sexisme peut vous faire vous demander si vous êtes folle, alors que non, vous ne l’êtes pas. Ça peut prendre plusieurs formes comme, par exemple, être prise par mégarde pour la secrétaire alors qu’en fait, vous êtes la responsable, ou bien être perçue comme étant trop autoritaire ou trop agressive simplement parce que vous dirigez. Insidieux ou ouvertement hostile, le sexisme était partout durant la campagne présidentielle. Beaucoup de gens n’aimaient pas Hillary Clinton par exemple, et la recherche sur le sexisme insidieux peut répondre en partie à cette question: il a été prouvé que plus une femme a du pouvoir, moins elle est aimée, alors que c’est l’inverse pour les hommes!
Propos recueillis par Natacha Bastiat-Jarosz
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