On pensait tout savoir sur l’intimité masculine, mais cette expo remet en cause quelques idées reçues sur la virilité en explorant les dessous d’un mythe qui nous concerne tou.te.s.
Il était grand temps de déshabiller l’homme. De le mettre à nu, complètement, sans le masque d’une virilité surfaite, bref de remettre en cause ce mythe de la masculinité qui semble trop souvent aller de soi-“comme si vivre dans une société patriarcale avait imputé d’emblée aux hommes une interdiction de remettre en question les modèles qui leur sont, à eux aussi, imposés”, explique le communiqué de presse. Il fallait sans doute des femmes, en l’occurrence huit étudiantes de l’association CELSA Hors les murs, pour y penser.
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Que ce soit à travers leurs produits d’hygiène, les stéréotypes masculins véhiculés par la pub et les films, leurs relations amoureuses et sexuelles ou encore leur consommation de pornographie, les hommes subissent de plein fouet les clichés associés à la virilité. Des artistes se sont donc amusés à déconstruire ces stéréotypes ancestraux, aujourd’hui en pleine mutation, pour représenter les hommes tels qu’ils sont et non pas comme ils devraient -ou essayent- d’être selon les normes qui leurs sont imposées. Trois choses qu’on a apprises pendant notre visite.
Les femmes ne sont pas les seules à subir la pression sociale sur leur corps
Muscles, pilosité, taille et performance sexuelle sont autant de critères d’un idéal masculin qui complexe les hommes depuis des lustres. Il n’y a qu’à regarder les produits d’hygiène masculins pour le comprendre: un gel douche peut à lui tout seul cristalliser le mythe de l’homme puissant (le flacon est de forme phallique), pressé (un seul gel douche pour le corps et les cheveux), plein de testostérone et ténébreux (le packaging est de couleur noire). Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que les hommes ne soient pas toujours à l’aise avec la notion de virilité. “Je pense qu’il y a une pression plus forte sur les hommes que sur les femmes. Un mec doit prouver qu’il est un bon coup, qu’il a de l’expérience, surtout quand il ne connaît pas encore bien sa partenaire. Moi, ça peut carrément me bloquer et m’empêcher d’aller aborder une nana, même pour un simple plan cul”, explique d’ailleurs un des témoignages imprimés et affichés sur les murs de la galerie.
© Sophie Kloetzli
La virilité la plus attirante n’est pas celle que l’on croit
L’une des étudiantes qui a monté l’expo explique: “Quand un homme surjoue la virilité, c’est pathétique. Pour moi, la vraie virilité, celle qui m’attire, est plus subjective.” Plutôt de l’ordre du charisme et de la confiance en soi. Alors pourquoi s’obstiner à tout prix à vouloir coller à des idéaux intenables? En y renonçant, les hommes -tout comme leurs partenaires- ne s’en porteraient que mieux, à la fois dans leur vie personnelle et amoureuse. En effet, à force de surjouer leur propre masculinité qui leur pose parfois problème, certains hommes en viennent paradoxalement à aller trop loin dans la domination et à déraper: un viol conjugal est représenté en dessins par Joseph Bourdaud.
(Heureusement), la notion de virilité évolue
“De nos jours, on parle beaucoup de la sexualité féminine et assez peu de la sexualité masculine qui est pourtant en train d’évoluer, poursuit cette étudiante. La virilité telle qu’on la conçoit habituellement est même devenue un concept un peu désuet. On le voit avec l’apparition de nouveaux canons masculins comme Pierre Niney”. Sous l’influence de la culture gay, la figure du métrosexuel s’est frayée une place au panthéon des idéaux masculins, avec pour conséquence une redéfinition de la virilité.
© Layla Gras
À travers ses photographies réalisées dans la communauté gay parisienne, Hannibal Volkoff lève quelques tabous sur la masculinité, et montre celle qui s’autorise le maquillage, les larmes et la tendresse. “Je déteste l’idée d’associer la virilité à la musculature, la pilosité, la domination de l’autre, ou la capacité à boire comme un trou. Pour moi, les choses se jouent à un autre niveau: on peut être fort en étant doux, ouvert, vulnérable”, écrit l’un des témoins anonymes. Un autre renchérit: “La notion de virilité, si on pouvait s’en passer, ça m’arrangerait autant.” Nous aussi.
Sophie Kloetzli
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