Pour les 10 ans de Cheek, une personnalité féministe revient chaque jour sur sa décennie. Aujourd’hui, Victoire Tuaillon.
En 2017, Victoire Tuaillon créait le podcast Les Couilles sur la table. Elle amorçait ainsi une radiographie précise des masculinités contemporaines tout en recueillant un immense succès populaire, qui se vérifie toujours avec une sixième saison en cours. Sous la direction de cette journaliste frondeuse et opiniâtre, on dissèque les révolutions à l’œuvre à travers des essais approfondis, ceux de la collection de livres Sur la table chez Binge Audio Editions, et on parle aussi d’amour avec Le Cœur sur la table, qui scanne les relations amoureuses et amicales à travers différents formats, dont des documentaires sonores signés Ovidie, Judith Duportail ou Anaïs Volpé. Un nouveau titre en cinq épisodes, à paraître le 13 octobre et signé Lolita Rivé, abordera la question de l’éducation sexuelle à l’école sous le nom de programme C’est quoi l’amour maîtresse? Au premier plan pour scruter la société à travers le prisme des féminismes, Victoire Tuaillon survole avec nous cette décennie.
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Quelles avancées féministes t’ont le plus marquée?
En terme de droits, d’argent ou de pouvoir pour les femmes et les minorités, hélas, je ne crois pas qu’on ait avancé. Je suis plus optimiste en ce qui concerne les prises de conscience d’une partie de la population: ces sujets sont discutés dans les médias, un nouveau vocabulaire se popularise, les manifestations sont plus fréquentées qu’il y a 10 ans…
Et quels reculs?
Dans le monde, l’interdiction de l’avortement et la montée des contenus masculinistes –le procès Amber Heard / Johnny Depp en particulier. En France, le maintien en poste de Gérald Darmanin comme ministre de l’Intérieur, alors qu’il a reconnu avoir utilisé son statut d’élu pour obtenir des relations sexuelles; l’affaire Bastien Vivès, qui révèle la persistance de la culture de l’inceste et de la pédocriminalité, y compris dans les milieux artistiques qui se pensent progressistes et éclairés.
Quel est ton / tes film·s féministe(s) de la décennie?
Lady Bird, de Greta Gerwig (2017); Divines, de Houda Benyamina (2016); Portrait de la jeune fille en feu, de Céline Sciamma (2019); Ouvrir la voix, d’Amandine Gay (2017).
Et ton / tes livres féministe(s) de la décennie?
Fille, femme, autre de Bernardine Evaristo; Triste Tigre, de Neige Sinno; Un corps à soi, de Camille Froidevaux-Metterie; Le Consentement, de Vanessa Springora; La Familia grande, de Camille Kouchner; Le Droit au sexe, de Amia Srinivasan; Souvenirs de mon inexistence, de Rebecca Solnit.
Quelles personnalités féministes t’ont le plus inspirée?
Ce sont des collectifs et des mouvements plutôt que des personnalités: Nous Toutes, Justice pour Adama et les Soulèvements de la Terre, en France; en Argentine, Ni Una Menos et les mobilisations “El violador eres tu”, performance créée par Las Tesis; ainsi que le mouvement Femmes, Vie, Liberté en Iran. Les Iraniennes font preuve d’un courage et d’une audace inouïes.
Pour toi, quel est le mot de cette décennie féministe?
MeToo.
Quels sont les défis féministes à relever ces 10 prochaines années?
Entrelacer étroitement les mouvements écologistes, décoloniaux et féministes. Rendre de plus en plus concrets leurs enjeux communs, pour donner lieu à des mobilisations
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