Pour les 10 ans de Cheek, une personnalité féministe revient chaque jour sur sa décennie. Aujourd’hui, Rokhaya Diallo.
Journaliste, autrice et réalisatrice, Rokhaya Diallo est devenue ces dernières années l’un des visages du féminisme intersectionnel et décolonial en France et l’une des militantes anti-racistes les plus influentes d’Europe.
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On lui doit entre autres l’excellent podcast Kiffe Ta Race qu’elle anime aux côtés de Grace Ly depuis 2018 et qui est de retour après un an de pause. Par ailleurs, Rokhaya Diallo vient de coréaliser un nouveau documentaire avec David Rybojad, Destins croisés: solidarités entre Juifs et Noirs, disponible sur Canal+, qui raconte le parcours de figures noires et juives unies pour combattre ensemble le racisme et l’antisémitisme. Actuellement, la militante travaille également sur l’organisation de l’évènement Ouvrir la marche qui aura lieu au Centre Pompidou du 10 au 12 novembre prochain. Pour nous, elle est revenue sur les 10 ans qui viennent de s’écouler.
Quelles avancées féministes t’ont le plus marquée?
La notion de consentement qui s’est imposée. La visibilité des problématiques concernant les féminismes minoritaires relatifs aux femmes noires, musulmanes, lesbiennes, trans. C’est insuffisant et nombre d’entre elles comme les femmes handicapées, pauvres, immigrées… restent encore très peu visibles.
Et quels reculs?
Le harcèlement amplifié des femmes musulmanes, la façon dont notre société a considéré qu’il était non seulement acceptable de scruter la longueur de leur vêtements, mais aussi de les punir par l’exclusion lorsque l’on les considérait comme trop couvrants. Deuxième point qui n’est pas un recul mais le prolongement des siècles précédents: la complicité des médias et des institutions dans l’impunité des agresseurs est écoeurante.
Quel est ton / tes film·s féministe(s) de la décennie?
Saint Omer d’Alice Diop, Les Filles d’Olfa de Kaouther Ben Hania , Black Widow de Cate Shorthand.
Et ton / tes livres féministe(s) de la décennie?
Les traductions de l’oeuvre de bell hooks en français (enfin!). Sa contribution est inestimable et sa disparition prématurée m’a beaucoup attristée.
Quelles personnalités féministes t’ont le plus inspirée?
Malala Yousafzai, prix Nobel en 2014. Les femmes iraniennes qui ont porté haut ”femme, vie, liberté”. Francia Marquez la vice-présidente de Colombie.
Pour toi, quel est le mot de cette décennie féministe?
Intersectionnalité. La notion créée par Kimberlé Crenshaw date de 1989, mais elle ne s’est imposée dans le débat français que très (trop) récemment. Le mot genre aussi, qui est ancien certes mais s’est aussi imposé dans les politiques publiques. Il permet de décorréler l’identité de genre de la sexuation.
Quels sont les défis féministes à relever ces 10 prochaines années?
La considération des droits et de l’autonomie des enfants, qui sont toujours perçus comme les propriétés des adultes dénués d’agentivité sur leurs vies. Les défis climatiques qui frappent bien plus durement les femmes et particulièrement celles issus des pays du Sud global.
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