Avec leur tribune intitulée Nous, femmes journalistes politiques, et victimes de sexisme…, publiée hier dans Libération, 40 journalistes ont raconté leur quotidien auprès d’hommes politiques sexistes, insultants, et pour certains harceleurs. Bien sûr, il ne s’agit pas de faire des généralités et de mettre tout le monde dans le même panier. Simplement, l’intérêt de ce coup de gueule était de dénoncer des faits: un climat souvent défavorable aux femmes, et où certains ont tendance à croire que tout est permis. En politique, ce n’est pas la première fois que les pendules sont remises à l’heure. Dèjà en 2011, avec le premier scandale DSK et l’accusation de viol de Nafissatou Diallo, les langues s’étaient déliées. Des femmes politiques de premier plan, des attachées parlementaires, des journalistes avaient dénoncé. Aujourd’hui, cette chronique est significative, car elle nous pousse à interroger le sexisme de toute la société française.
8 femmes sur 10 déclaraient avoir subi des comportements sexistes, avec des remarques désobligeantes comme “ne fais pas ta blonde”.
En 2015, le sexisme est loin d’être éradiqué. On le retrouve partout. Et d’abord au travail. Rappelez-vous en octobre 2013, une étude pour le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle, réalisée auprès de neuf grandes entreprises comme France Télévisions, LVMH, La Poste, révélait un phénomène inquiétant: 8 femmes sur 10 déclaraient avoir subi des comportements sexistes, avec des remarques désobligeantes comme “ne fais pas ta blonde”, “ma Cocotte”, ou encore “t’es tendue, t’as tes ragnagnas”. En somme, un monde bien difficile, car 90% des femmes interrogées estimaient qu’il était plus facile de faire carrière lorsqu’on était un homme.
La prise de conscience est salvatrice, mais elle doit être générale avec une remise en question totale.
Les vidéos dénonçant le harcèlement de rue, notamment de la belge Sofie Peeters, ont également mis en lumière ces dernières années une situation inadmissible et pourtant très banale. Car le sexisme, qu’il s’exprime sur les bancs de l’Assemblée nationale, dans les couloirs des lieux de pouvoir, ou dans l’entreprise, peut être insidieux. Il peut s’agir des rumeurs de “promotion canapé” dès qu’une femme monte dans la hiérarchie ou alors d’une mise à l’écart après un congé maternité vécu comme une “trahison”, sans oublier le préjugé qu’une femme avec des enfants serait moins compétente et moins disponible qu’un homme. Ce n’est pas tout. On le retrouve également dans nos loisirs, au cinéma comme au festival de Cannes par exemple où l’on s’obstine à ne surtout pas sélectionner de femmes. Idem pour Les Oscars et à Hollywood où les inégalités salariales sont criantes. Il est aussi flagrant dans le sport, où la diffusion de matchs féminins est encore trop rare, et où les commentateurs s’autorisent tout, notamment sur le physique des sportives. Bref, la prise de conscience est salvatrice, mais elle doit être générale avec une remise en question totale. Sinon, la prochaine génération dans le monde politique, économique, culturel ou sportif sera tout autant sexiste que la précédente et toujours sûre de son bon droit.