“Nous savons que ça arrive, nous le tolérons, l’ignorons, et l’excusons tous les jours.” C’est au tour du monde de la mode de briser le silence qui entoure le harcèlement et les agressions sexuelles au travail. Depuis vendredi dernier, le mannequin américain Cameron Russell publie sur son compte Instagram les témoignages de femmes et d’hommes qui ont subi toutes formes d’abus de pouvoir de la part de photographes, d’agents ou encore d’éditeurs de magazines de mode. Aujourd’hui, 80 textes de victimes anonymes dont le nom des agresseurs est caviardé sont disponibles sur sa page.
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L’idée lui vient après une discussion avec une amie mannequin qui lui raconte son agression. Elle a 15 ans et participe à un shooting photo: “Ma belle-mère m’a accompagnée mais était dans une autre pièce. Elle ignorait qu’il [Ndlr: le photographe] avait enfoncé profondément ses doigts dans mon vagin à plusieurs reprises alors même qu’il prenait des photos de moi en m’expliquant que ça rendrait les photos plus sensuelles.” En légende du témoignage disponible sur le réseau social, Cameron Russell contextualise: “Elle m’a demandé de rester anonyme, mais voulait que je partage son témoignage: ce photographe travaille toujours dans l’industrie de la mode. Elle veut encourager d’autres femmes à parler. Nous avons besoin d’un moyen pour commencer à briser le silence en étant protégées. Il ne s’agit pas d’un, de cinq ou même de vingt hommes. Nous parlons ici d’une culture de l’exploitation et cela doit cesser.”
“Quand c’est la norme, dénoncer [les agressions] peut paraître disruptif et non professionnel.”
Cameron Russel invite ensuite les femmes à lui envoyer leurs témoignages si elles désirent garder l’anonymat ou à utiliser le hashtag #MyJobShouldNotIncludeAbuse (Ndlr: en français “Mon travail de devrait pas inclure d’agressions”) avec leurs propres comptes pour que “l’industrie de la mode puisse se rendre compte de la taille et de l’étendue du problème”. Le mannequin explique à ses 90 000 followers que l’affaire Harvey Weinstein lui a donné l’envie de mettre ce projet en place: “Quand c’est la norme, dénoncer [les agressions] peut paraître disruptif et non professionnel.” Elle souligne que, dans son cas, évoquer les comportements inappropriés, sexistes, voire les agressions sexuelles dans son milieu avait toujours engendré des réponses du style “ça te surprend vraiment?” ou “ça fait partie du boulot”.
Encore une fois depuis l’affaire Weinstein, les langues se délient et la solidarité féminine s’installe. On ne peut que saluer le courage des victimes qui témoignent et constater que malheureusement, aucune sphère de la vie professionnelle ne semble épargnée par le fléau du harcèlement et des agressions sexuelles.
Margot Cherrid
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