Anaïs Gasset est à la tête d’une boulangerie-café à Buenos Aires en Argentine. Avec ses produits faits maison et son sens aigu des affaires, la Montpelliéraine a conquis l’estomac des locaux.
Sourire franc et regard assuré, Anaïs Gasset nous reçoit chez Cocu, la boulangerie-café qu’elle a ouverte il y a bientôt quatre ans au cœur de Palermo, un des quartiers bobo de Buenos Aires. À 32 ans, la jeune femme originaire de Montpellier est une entrepreneure épanouie. Son associé, Morgan Chauvel, est chef cuisinier. Anaïs Gasset, elle, est “le cerveau”. Tandis que lui est aux fourneaux, elle gère tout le reste: “Ressources humaines, comptabilité, achats, produits… Quand on est une PME, on touche un peu à tout.”
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Issue d’une famille de libéraux et de chefs d’entreprise, Anaïs Gasset a prouvé qu’elle avait, elle aussi, le sens des affaires. En arrivant à Buenos Aires, elle voulait monter son hôtel. Finalement, elle rejoint le projet de deux amis français, Adrien Verny et Morgan Chauvel: créer un endroit où Argentins, expatriés et touristes peuvent déguster un bon pain au chocolat ou acheter une vraie baguette. “Pour moi, c’était avant tout une opportunité commerciale. Même si j’aime la cuisine et que cela m’intéresse de promouvoir la culture française.” En travaillant sur l’image de marque et la qualité des produits faits maison, Anaïs Gasset a trouvé une recette qui marche. Habitués et clients de passage se pressent chez Cocu pour prendre un café ou déjeuner dans un décor délicieusement français: pas de drapeaux tricolores en étendard mais les noms des produits écrits dans la langue de Molière et Jacques Brel en fond sonore. S’il prête à sourire, le nom du lieu est lui aussi une référence subtile à la culture hexagonale. Il s’agit d’un clin d’œil au film de Marcel Pagnol, La femme du boulanger, dans lequel ce dernier, dont l’épouse s’est enfuie avec un berger, entame une grève du pain.
“Comme tout le monde, j’ai été attirée par les stéréotypes sur l’Argentine: la viande, le vin, le tango, la douceur de vivre.”
Au départ, pourtant, les trois amis sont partis de rien. “Ici, on dit que c’est un projet ‘a pulmón’, c’est-à-dire monté sans argent.” Une fois le local trouvé, ses deux associés et elle ont mis la main à la pâte: pendant quatre mois, ils ont fait tous les travaux eux-mêmes. Malgré tout, Anaïs s’estime chanceuse: “Cela a été beaucoup plus facile qu’en France. Quand j’ai lancé le projet, j’avais seulement 27 ans, et ici, ça n’a pas été un obstacle. C’est sûrement lié à l’image très positive des Français.”
Forte de sa réussite, Anaïs n’hésite pas à faire profiter les nouveaux expatriés de son expérience: “Nous sommes très solidaires dans la communauté française. Tous les nouveaux venus qui veulent monter un business viennent me voir et je les aide.” Derrière la femme d’affaires, il y aussi une aventurière, qui ne se lasse pas de bouger. Anaïs Gasset a déjà pas mal voyagé: Dubaï, Bangkok ou Bogotá, mais aussi l’Asie-Océanie, qu’elle a arpentée pendant sept mois avec son sac à dos et sa meilleure amie. Et quand on lui parle d’avenir, son regard semble se tourner vers l’Espagne. Interview Worldwide Cheek.
Pourquoi Buenos Aires?
J’ai beaucoup voyagé et je me suis toujours sentie proche de la culture latine, notamment parce que je viens du sud de la France. Lorsque j’étais en école de commerce, j’ai fait un échange à Bogotá en Colombie. J’y ai rencontré beaucoup de backpackers qui m’ont parlé de Buenos Aires comme d’une ville très dynamique. Comme tout le monde, j’ai aussi été attirée par les stéréotypes sur l’Argentine: la viande, le vin, le tango, la douceur de vivre.
Le truc local auquel tu as eu le plus de mal à t’habituer?
Le manque de ponctualité et d’engagement des Argentins. Par exemple, si tu proposes une sortie à des amis, ils te disent “Oui, on en reparle” et ne fixent pas de date. Au niveau professionnel, certains fournisseurs peuvent décaler un rendez-vous trois fois de suite. Moi qui suis très carrée, j’ai eu du mal à l’accepter.
Celui dont tu ne peux plus te défaire?
Comme rien n’est programmé à l’avance, je peux sortir du travail vers 20h ou 21h, envoyer un message à mes amis et improviser une sortie. Ici, nous vivons plus au jour le jour et faisons vraiment ce dont nous avons envie.
Le jour où tu t’es sentie chez toi à Buenos Aires?
Lorsqu’un ami argentin m’a lancé: “T’es une vraie Porteña (Ndlr: habitante de Buenos Aires)!” Ce jour-là, je me promenais dans Lanús, un quartier populaire et peu touristique de la banlieue de Buenos Aires, pour chiner chez les antiquaires. Cet ami m’a envoyé un message pour savoir s’il pouvait échanger des pesos contre des euros. La promenade dans Lanús et l’échange au marché noir, ce sont deux choses d’Argentins.
Ton plat préféré?
Les asados, ces barbecues typiques, entre amis!
Ce qui te manque le plus de la France?
La famille et les amis d’abord. La gastronomie aussi. Et les distances géographiques: en Europe, tu as la possibilité de voyager en quelques heures dans un autre pays. Ici, pour le moindre week-end entre copains, tu peux faire six heures de route!
Mon carnet d’adresses
Le quartier de San Telmo © @steffischwaerzli / Instagram
Mon boui-boui:
Chan Chan, un excellent resto péruvien!
Mon bar chic:
Le Nicky Harrison. Restaurant de sushis devant, bar des années 20 style prohibition à l’arrière. Tu peux y boire les meilleurs cocktails d’Amérique latine.
La visite que tu recommanderais à tous tes amis:
Le quartier de San Telmo avec ses marchés couverts et ses jolis bars traditionnels.
Propos recueillis par Juliette Marie, à Buenos Aires
{"type":"Banniere-Basse"}