Alix Pfrunder a contribué à populariser la Zumba en France en montant sa propre école de danse. Elle nous raconte cette aventure entrepreneuriale teintée de musiques latines dans une interview “Workaholic”.
Quand on la retrouve pour l’interview, Alix Pfrunder nous prévient d’emblée qu’elle n’aime pas le terme workaholic, qu’elle trouve chargé d’une connotation négative. Pourtant, la jeune femme de 31 ans n’a pas cessé de travailler depuis ce jour de 2009 où elle a découvert une discipline en train d’émerger outre-Atlantique et encore peu connue en France: la Zumba. Ce fitness d’un nouveau genre, à la fois très cardio et très dansé -originellement sur des musiques latines, maintenant tout aussi imprégné d’afrobeat et de RnB-, l’a immédiatement séduite. Elle est alors âgée de 23 ans, tout juste diplômée d’une école de com et réfléchit à se lancer dans l’événementiel tout en passant beaucoup de temps à danser la salsa et la bachata, pour lesquelles elle a eu une révélation, adolescente, lors d’un voyage en République dominicaine. Sa passion est d’ailleurs devenue le job étudiant qu’elle préfère, puisqu’elle est régulièrement invitée au Club Med pour donner des cours en échange de vacances à l’œil dans des endroits paradisiaques. Quand, quelques années plus tard, elle entend parler d’un nouveau fitness né à Miami, baptisé Zumba, elle se renseigne, rencontre ses créateurs de passage en France et se dit instantanément qu’elle veut l’apprendre puis l’enseigner.
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“Comme j’adore ce que je fais, je n’ai pas vraiment l’impression de travailler.”
Celle qui ne s’est jamais imaginée travailler dans un bureau -“Je n’ai jamais voulu avoir de boss ni m’asseoir derrière un ordi, j’ai trop la bougeotte pour ça”- y voit l’occasion de monter sa société. Il faut dire que l’engouement est au rendez-vous et que ses cours se remplissent à toute vitesse. “C’est vrai qu’à ce moment-là, j’ai été workaholic, concède-t-elle. C’était tellement dingue et fun, je n’avais jamais peur de me rajouter des cours alors que j’étais seule pour tout gérer.” Très vite, elle se met à louer des boîtes de nuit parisiennes, qu’elle remplit pour y faire résonner les derniers morceaux de Shakira ou Rihanna et beaucoup transpirer en compagnie de ses élèves. Les premiers mois, elle gère aussi bien la caisse que les cours ou la com. Elle a immédiatement l’intuition de déposer tous les noms de domaine possibles, de se faire un beau site avec peu de moyens et d’investir les réseaux sociaux. Résultat, quand la vague Zumba se met à déferler les années suivantes, Alix Pfrunder est aux premières loges, et commence à s’entourer d’autres profs. “En plus d’avoir mon entreprise, j’ai pu choisir avec qui je voulais travailler, que de bonnes énergies aussi bien professionnellement qu’humainement, et c’est tellement motivant! Ils dégagent vraiment quelque chose et donnent envie de revenir chaque semaine.”
Huit ans plus tard, ils sont huit à travailler pour Zumba France et Alix Pfrunder, même si elle s’en défend, est toujours en train de penser au boulot. “En fait, comme j’adore ce que je fais, je n’ai pas vraiment l’impression de travailler”, explique-t-elle.
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Elle s’est aujourd’hui débarrassée de la peur du jugement des autres, qui n’a pas manqué quand cette fille du seizième arrondissement de Paris, élevée dans une famille bourgeoise, a commencé à tracer sa route vers la Zumba. “Mes proches trouvaient que je faisais n’importe quoi, s’amuse-t-elle. Dans mon entourage, les gens sont surtout devenus avocats, cadres supérieurs ou chefs d’entreprise dans des domaines hyper sérieux, alors autant dire qu’ils ne comprenaient pas pourquoi je voulais devenir prof de fitness.” Alix Pfrunder n’a pourtant jamais hésité, sa mère et sa grand-mère lui ayant ouvert la voie de l’indépendance au féminin. Aujourd’hui, elle précise que le plaisir est intact et qu’elle a plein d’idées pour continuer de développer sa société. Cette hyperactive hyper enthousiaste a pris le temps de nous parler de sa vie de workaholic, qui n’a rien d’un esclavage.
À quand remontent les premiers symptômes de ton workaholisme?
Je dirais que c’est apparu avec le projet de Zumba France. J’habitais encore chez ma mère quand j’ai commencé à monter ma boîte, et je bossais souvent jusqu’à 3 heures du mat. Parfois, elle se levait et me voyait encore debout, à chercher tous les derniers trucs sur Internet, et elle me disait d’aller dormir. (Rires.) Maintenant, j’ai un rythme beaucoup plus cool, même s’il m’arrive régulièrement de faire ma compta le soir, en rentrant d’un cours. Et puis, j’ai le projet d’ouvrir ma propre salle, et je sais parfaitement que le jour où ça arrivera, je vais repartir à fond.
“Je fais partie des gens qui répondent à leurs mails dans la minute.”
La fois où tu as frôlé le burnout?
J’avais l’impression que je n’avais jamais trop travaillé, jusqu’à ce que ma sœur me rappelle mes débuts et me dise que je ne me rendais pas compte à quel point j’étais survoltée. En effet, en y repensant, c’était une époque où, quand je prenais l’avion, les gens n’avaient pas encore fini de ranger leurs affaires dans le compartiment à bagages que je dormais déjà. En vacances, je relâchais la pression, et j’étais d’ailleurs systématiquement malade.
En quoi travailler est-il grisant?
Déjà, faire du sport me fait me sentir bien, littéralement. Mais ce que je préfère, c’est quand je vois les élèves sortir d’un cours le sourire aux lèvres: la satisfaction est immédiate, car je me dis que mon boulot fait du bien aux gens.
Ton truc pour avoir de l’endurance?
Dormir. J’ai besoin de mes huit heures de sommeil par nuit et, je l’avoue, je ne suis pas du matin.
Les effets secondaires désagréables?
Pour l’instant, je n’en ressens pas trop, mais je me dis que ça arrivera peut-être le jour où j’aurai des enfants. Je travaille beaucoup le soir et j’ai un rythme de vie un peu décalé qui ne sera peut-être pas facilement compatible avec une vie de famille.
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Ton anti-stress le plus efficace?
Mon mec. Il arrive toujours à me déstresser quand la pression monte. Je me souviens d’un jour où je devais passer à la télé et où j’ai commencé à flipper, il m’a assuré que personne ne regardait cette émission, alors que j’ai su après qu’il y avait 500 000 téléspectateurs!
Ta façon d’appréhender la detox?
Je ne connais pas trop ce mot, car je fais partie des gens qui répondent à leurs mails dans la minute. Je peux être en train d’ouvrir mes cadeaux de Noël, je vais répondre. En vacances, c’est pareil; même si je suis au bout du monde, je ne peux pas m’empêcher d’appeler à l’heure des cours pour vérifier que tout va bien. Et quand, à la rentrée, on me demande “Alors, pas trop dur le retour?”, je réponds la vérité, que je suis trop contente d’être rentrée.
À long terme, envisages-tu de décrocher?
Décrocher pour faire quoi? Je ne me vois pas faire autre chose, et je kiffe chaque jour qui passe. La petite fille en moi continue de s’étonner que j’aie réussi à faire de ma passion mon métier.
Qu’est-ce qui te ferait arrêter?
Je sais qu’un jour, il faudra peut-être que je ralentisse au niveau physique. Mais d’ici là, j’espère avoir développé plein de nouveaux projets autour de la Zumba!
Propos recueillis par Myriam Levain
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