Tout quitter et partir visiter le monde en solitaire, c’est aussi exaltant que flippant. Pourquoi ça vaut le coup de se lancer, en 7 arguments.
L’adrénaline qui parcourt l’échine. Un frisson d’excitation. Partir vers l’inconnu. Libres de voyager seules. Les femmes osent de plus en plus franchir ce pas-là, qu’elles ne pouvaient, auparavant, que difficilement imaginer, comme l’explique Béatrice Dauvier Simeon, qui travaille aux relations clients chez Voyageurs du Monde. Selon ses dires, nombreuses sont celles qui attendaient, jusqu’ici, de trouver quelqu’un avec qui plier bagage.
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Mais les choses évoluent et l’on croise de plus en plus sur les routes ces aventurières solitaires. Comme cette jeune fille, que Béatrice Dauvier Simeon a croisé au détour d’un voyage: “Elle m’a avoué n’avoir trouvé personne de disponible autour d’elle. Les gens étaient en couple ou travaillaient. Elle s’est dit que si elle attendait toujours de partir avec quelqu’un, elle ne ferait jamais rien.” Quête de réflexion, d’autonomie ou encore d’apaisement, voici quelques avantages à voyager seule.
1. Vaincre ses peurs et développer son instinct
Partir seule, c’est aller à l’encontre de craintes. Pas toujours facile de vaincre la peur de la solitude et celle de l’inconnu. “J’avais certaines appréhensions parce que je partais dans un pays que je ne connaissais pas du tout, mais elles se sont envolées une fois sur place, confie Nathalie, 35 ans, restée deux mois en Thaïlande, en Malaisie et en Indonésie. Ceci dit, je pense qu’il faut bien choisir le pays dans lequel on se rend”. Elle ajoute: “La veille de mon départ, j’étais tendue. Tout le monde te stresse…”
“Certains me disent que je suis folle mais d’autres admirent le fait que j’ose tout plaquer pour l’inconnu.”
Déjà mises en garde en permanence quotidiennement, les femmes le sont encore plus quand elles baroudent. Ce que confirme Émilie, une étudiante de 24 ans, actuellement en stage au Viêt Nam: “Certains me disent que je suis folle mais d’autres admirent le fait que j’ose tout plaquer pour l’inconnu.” Coralie Le Rasle, 31 ans, a traversé seule, à vélo, la cordillère des Andes, de la Colombie à la Terre de Feu en 2010 et 2011 et a raconté son périple sur un blog, La bicicleta Latina. Elle aussi a dû faire face à l’incompréhension de son entourage. Pourtant, partir a été pour elle un moyen de développer son instinct et d’être plus attentive à son environnement.
2. S’inscrire dans une tradition d’aventurières
On a longtemps envisagé la quête d’aventure comme intrinsèquement masculine, tandis que l’inconscient collectif associait les femmes à leur foyer. Une séparation qui s’est fortement construite au XIXème siècle, principalement au sein de la bourgeoisie, comme l’explique Rebecca Rogers, historienne spécialiste de l’histoire de l’éducation des femmes en France.
“L’indépendance financière des femmes leurs permet de se payer des voyages.”
Pourtant, le voyage au long cours n’est pas l’apanage des hommes. En témoignent les grandes voyageuses du XIXème siècle. À cette époque, la quête d’aventure, liée à l’impérialisme colonial, est très forte, et les femmes y prennent part. Et s’il est vrai qu’elles ne se départissent pas des préjugés de leur époque, leurs transgressions ouvrent certaines voies en matière d’indépendance féminine. Elles constituent, néanmoins, une petite minorité. Il faudra attendre, en France, la période de l’entre-deux-guerres pour que le voyage se démocratise avec l’avènement, en 1936, des congés payés. À cette période, la journaliste Andrée Viollis bouscule les normes de genre en décidant de partir seule. Aujourd’hui, si de plus en plus de femmes le font, c’est aussi parce qu’elles en ont les moyens. “L’indépendance financière des femmes leur permet de se payer des voyages. D’ailleurs, l’ère du low cost n’y est pas étrangère”, confirme Rebecca Rogers.
3. Faire ce qu’on veut quand on veut
“Voyager seule, c’est avoir la possibilité de suivre ses propres envies à chaque instant, explique Émilie, 24 ans. J’ai déjà voyagé avec des amis et il nous est arrivé de ne pas du tout partager des moments de la même façon. Je me suis alors dit que j’aurais préféré vivre l’expérience seule.” Se lancer dans l’aventure, c’est également pouvoir sortir de schémas préconçus qui constituent souvent des freins. “J’ai besoin d’être seule régulièrement et c’est quelque chose que je m’autorise maintenant. Quand j’étais étudiante, je faisais toujours tout en fonction de mes copains, révèle Coralie Le Rasle. Maintenant, je ne me mets plus de barrières. J’ai appris à écouter mes envies profondes indépendamment de ce que pourraient en penser les autres.”
“Les gens sont venus vers moi, on m’ouvrait plus facilement les portes.”
4. Voyager seule, c’est ne jamais être seule
“Les femmes qui voyagent seules choisissent souvent des destinations qui s’éloignent du tourisme de masse”, observe Béatrice Dauvier Simeon. Derrière cela, l’envie profonde d’aller à la rencontre des autres. “J’ai connu toutes sortes de personnes, parfois avec lesquelles je n’aurais jamais imaginé tisser des liens, comme ce couple de quinquagénaires rencontrés par hasard”, avance Émilie. Toutes les femmes rencontrées évoquent par ailleurs la grande bienveillance dont elles ont fait l’objet. C’est le cas de Coralie: “Les gens sont venus vers moi, on m’ouvrait plus facilement les portes. Il se met en place une sorte de réseau d’entraide.” Même constat du côté de Nathalie: “Certains Thaïlandais que j’ai rencontrés ont vérifié que tout se passait bien pour moi. Ils m’ont fait connaître d’autres personnes, m’ont donné des conseils voyant que j’aimais faire des choses non conventionnelles.”
Mange, prie, aime © Sony Pictures Releasing France
5. Vivre des moments décisifs
Dans ces rencontres faites au cours d’un voyage, il faut bien l’admettre, il y a souvent quelque chose d’éphémère. Mais ces échanges n’en restent pas moins porteurs de sens car ils sont “vrais, sincères et souvent pleins d’humour”, rapporte Nathalie. “Partager ce genre d’expérience avec des inconnus, c’est génial, analyse Émilie. On sait qu’on ne se reverra peut-être jamais alors on s’autorise à dire plus. J’ai souvent eu des conversations très enrichissantes avec des personnes qui ont nourri certaines de mes conceptions.” Une manière de dire, pour la jeune femme, que ce ne sont ni la durée, ni la régularité des rencontres qui en font des relations superficielles. “Il y a des personnes que je vois tous les jours avec lesquelles je ne partagerai jamais ce que j’ai partagé avec une personne, certes vue une fois, mais qui a, dans un sens, changé ma vie.”
6. Goûter à la méditation
Être seule, sur les routes, sortir de sa zone de confort, ce sont là des occasions qui permettent “de se comprendre, de souffler ou encore de prendre du recul”. Une grande part est laissée au rêve et à la contemplation, et pour certaines, le voyage prend même une dimension spirituelle, à l’image de Cheryl Strayed, incarnée par Reese Witherspoon dans Wild, partie en quête d’une paix intérieure, seule avec son sac à dos.
“Chaque fois que je reviens d’un voyage ou d’une expédition, j’ai l’impression d’être une autre.”
Il y a une vérité dans le voyage souvent peu évoquée: celle de l’ennui. Un ennui “immense, abyssal” au dire de Priscilla Telmon, écrivaine-voyageuse et membre de la Société des explorateurs français: “Lorsque vous êtes seule sur un cheval dans la steppe eurasiatique, que vous savez que vous allez devoir encore avancer quarante-cinq jours d’affilée sur une plaine absolument plate, sans un pli du terrain, sans rien qui apporte la moindre stimulation, avec toujours le même horizon devant vous, c’est vraiment l’épreuve du néant, alors vous puisez en vous et le défilement du paysage devient une méditation.” Une dimension de l’expérience qui peut être fondamentale quand on cherche l’apaisement.
7. Rentrer métamorphosée
“Chaque fois que je reviens d’un voyage ou d’une expédition, j’ai l’impression d’être une autre. Si le voyage n’opère pas cette mue, alors il n’aura servi à rien. Il ne s’agit pas d’une vaine consommation de territoires et de paysages”, précise Priscilla Telmon. Le voyage aurait ainsi ce merveilleux pouvoir de transformation et permettrait d’acquérir une certaine confiance en soi ou de développer ses aptitudes. Pourtant, la réadaptation n’est pas toujours simple, admet Coralie: “Il y a un travail à faire pour mettre en pratique ce qu’on a appris dans un contexte très différent.”
Et si, en voyageant, on apprend à se connaître, comprendre la vie vécue par les locaux est un autre défi, qui laisse Rebecca Rogers perplexe. De même que Nathalie. “C’est difficile de connaître un peuple en faisant un voyage, constate-t-elle. On est forcément déconnecté, on ne travaille pas, on n’a pas vraiment de problèmes. La vie est facile. Bien sûr, on est plus ouvert et on prend le temps de discuter mais on ne peut pas dire qu’on partage les préoccupations communes de la population locale.” Car découvrir d’autres cultures reste un véritable luxe. À ce propos, Nathalie reconnaît que “c’est une expérience inoubliable qui [lui] a, finalement, permis de prendre conscience de la chance qu’[elle] avai[t]”.
Julie Jeunejean
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