On vous dit pourquoi il faut aller voir Fantastic Birthday, le premier long-métrage de Rosemary Myers.
Fantastic Birthday, le premier long-métrage de l’Australienne Rosemary Myers, met en scène une héroïne de 15 ans, Greta Driscoll, qui ne veut pas fêter son anniversaire. Ce conte fantastique et fantasque sur le passage à l’âge adulte vaut le détour et on vous dit pourquoi.
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Un traitement moderne du passage à l’âge adulte
Si Fantastic Birthday est archi vintage dans sa forme -esthétique 70’s, format 4/3-, le film de Rosemary Myers porte une signature contemporaine qui saute aux yeux. À travers son héroïne, Greta Driscoll, gamine qui n’aime pas les robes et fait d’un garçon sa BFF, Fantastic Birthday transcende un thème rebattu par le cinéma, celui du passage à l’âge adulte, pour l’emmener vers des questions résolument modernes. Il n’est plus simplement question d’abandonner l’enfance, mais de découvrir quel adulte on a envie de devenir, loin des traditionnelles injonctions liées au genre. Dans Fantastic Birthday, les filles se bastonnent comme des punks en plein pogo et les garçons aiment les robes roses. Un propos clairement féministe, et Rosemary Myers explique justement que les années 70 étaient le support idéal de ces questions plus que jamais actuelles: “Comme il s’agissait d’une histoire de fille, nous trouvions intéressant de la transposer dans les années 70 car c’est une époque très particulière pour une jeune fille en Australie. […] Les années 70 représentent une grande libération de la femme en Australie, une nouvelle vision du parcours de vie féminin. La mère est une femme au foyer de cette époque, en totale opposition avec la sœur de Greta, Genevieve, qui, elle, va véritablement tracer sa propre route. Pour une jeune fille comme Greta qui prend peu à peu conscience qu’elle entre dans le monde adulte et doit se définir en tant que telle, la question de la représentation féminine est essentielle.” Bien exploitée aussi, la question du harcèlement à l’école et de la possibilité de se construire en dehors du groupe fait aussi écho à notre époque, avec des situations facilement transposables à l’ère des réseaux sociaux.
Un univers visuel à la richesse extraordinaire
Si Rosemary Myers cite Michel Gondry ou Spike Jonze parmi ses influences, c’est immédiatement à Wes Anderson qu’on pense en regardant Fantastic Birthday, qui se situe visuellement entre Moonrise Kingdom et La Famille Tennenbaum. Palette de couleurs pop, jeu sur la gémellité et le potentiel graphique de l’uniforme…: la gestion des décors et des costumes rappelle instantanément le travail obsessionnel du réalisateur américain. “Nous cherchions un certain style, une certaine utilisation des couleurs, un ressenti visuel particulier […], explique Rosemary Myers. Nous avons regardé beaucoup de photographies des années 70 pour choisir la palette colorimétrique et la façon dont nous voulions que les couleurs ressortent et éclatent à l’écran.” Cette identité visuelle ultra-référencée enrobe une mise en scène qui ne manque pas de personnalité. Ainsi, dans Fantastic Birthday, il faut avoir l’œil partout: il se passe parfois autant de choses à l’arrière-plan qu’au premier. Cette spécificité peut facilement s’expliquer par le parcours de la réalisatrice et du scénariste Matthew Whittet. Auteurs et metteurs en scène de théâtre à l’origine, ces deux derniers ont adapté l’une de leur pièce pour le grand écran. C’est grâce à une association qui propose des ateliers de cinéma, que le binôme a pu passer de la scène au grand écran. “Le scénographe Jonathon Oxlade, le scénariste Matthew Whittet et moi-même venons du théâtre, et nous avons monté de nombreuses pièces sur l’aventure qu’est l’adolescence. […] Notre théâtre fait beaucoup référence au cinéma, et nous voulions garder une certaine théâtralité dans notre film”, explique Rosemary Myers. Le lien ténu entre théâtre et cinéma est en effet ici exploité à fond.
© UFO Distribution
Un conte pour adultes pas si régressif
Si Greta, l’héroïne de Fantastic Birthday, expérimente le passage de l’enfance à l’âge adulte, le spectateur, lui, fait le trajet inverse. L’univers onirique de Fantastic Birthday est une invitation à quitter le monde réel pendant une heure vingt, et à renouer avec notre part d’enfant. Sans toutefois régresser entièrement. Car, si Rosemary Myers admet un amour immodéré pour les contes de fée, en particulier La Belle au Bois Dormant, c’est davantage à la douce amertume d’un film comme Le Magicien d’Oz que renvoie Fantastic Birthday (Rosemary Myers a d’ailleurs monté l’histoire de Lyman Frank Baum au théâtre). Ainsi, le long passage où Greta se perd dans une forêt imaginaire tient davantage du cauchemar que du rêve, avec ses personnages inquiétants ou monstrueux, qui font écho à la vraie vie. “‘Cette forêt où ils se rendent’, dit le pédagogue et psychologue Bruno Bettelheim, ‘symbolise le lieu dans lequel chaque obscurité intérieure est confrontée, où le doute sur qui nous sommes est levé et où chacun commence à comprendre qui il souhaite devenir vraiment’”, explique Rosemary Myers dans le dossier de presse du film. “Nous sommes de grands admirateurs de Bruno Bettelheim et de sa réflexion sur la résonance psychologique des contes de fées, aussi nous avons toujours su que cette partie de l’histoire, où l’on assiste à une transposition de Greta dans le monde des rêves, était primordiale.” Une séquence qui invite en effet à réfléchir sur la construction de notre propre identité, sur l’importance de nos role model et, qui sait, à comprendre un peu mieux l’origine de nos névroses.
Faustine Kopiejwski
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