En revisitant Harold Pinter, Michel Fau opte pour une mise en scène baroque qui passe à côté de la subtilité du propos du dramaturge.
Cela fait maintenant plus de cinq ans que Michel Fau revisite des boulevards surannés (Peau de vache, Fleurs de cactus, Douce-Amère…) qu’il subvertit en instillant son style baroque, cartoonesque et dévergondé. Efficace, la méthode Fau a le mérite de produire un théâtre singulier sur les scènes du privé. Pourtant, face à ce Trahisons d’Harold Pinter, l’expérience n’y fait rien ; la mayonnaise ne prend pas.
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La pièce est bien un vaudeville, mais un vaudeville bien particulier. Il est question d’un homme (Michel Fau) trompé par sa femme (Claude Perron) avec son meilleur ami (Roschdy Zem), donnant lieu à son lot habituel de mensonges et de malentendus.
Seulement, Harold Pinter prend de grandes libertés avec les codes du genre : l’histoire est racontée à rebours, le couple adultérin est empêtré dans une routine ronronnante peu enviable et la jalousie qui devrait naître entre les deux hommes est systématiquement désamorcée par une tension homoérotique.
Lumières colorées et scénographie kitsch
Une telle partition exige une certaine subtilité, dont Michel Fau fait ici défaut. Sa mise en scène exubérante paraît comme trop à l’étroit dans ce texte où les non-dits si british ne sont pas perceptibles. Les lumières colorées et la scénographie kitsch sont hors sujet avec le monde de l’édition qu’Harold Pinter cherche à représenter.
Mais, surtout, les comédiens sont en roue libre : Claude Perron joue une partition clownesque à mille lieues du style naturaliste de Roschdy Zem, qui peine à trouver sa place sur scène. Entre Pinter et Fau, le rendez-vous est raté. C’est dommage.
Trahisons d’Harold Pinter, mise en scène Michel Fau, avec Claude Perron, Roschdy Zem, Michel Fau et Fabrice Cals. Jusqu’au 28 mars, Théâtre de la Madeleine, Paris
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