Dernier jour de répétition à la Villette pour la compagnie 600 Highwaymen qui présente “The Record”, dans le cadre de la manifestation L’Esprit de groupe. Rencontre avec ses créateurs, Abigail Browde et Michael Silverstone.
J-1 pour les 35 performers recrutés par la cie 600 Highwaymen, tous non-professionnels, recrutés sur audition il y a quelques semaines. On pourrait s’attendre à un doux vacarme à l’heure des derniers réglages, surtout s’agissant d’une troupe aussi nombreuse. Mais non. Le calme règne dans la grande Halle de la Villette et le duo des metteurs en scène, Abigail Browde et Michael Silverstone, continue de faire comme au premier jour des répétitions, cinq semaines plus tôt : travailler individuellement avec chaque performer.
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C’est ainsi qu’ils l’ont créé à New-York où ils l’ont joué huit fois avant de venir en France pour quatre représentations à La Villette et au Centre Pompidou : « C’est la première fois que nous travaillons ainsi en construisant une forme où les performers ne se rencontrent que le jour de la première représentation, mais tous nos projets reposent sur les personnes, nous explique Michael Silverstone. Si on réunit des gens dans un groupe, chacun commence à regarder comment fait l’autre, à l’imiter et ça devient une identité de groupe. Or, notre projet consiste à montrer chaque personne dans une dynamique très précise. Ensuite, c’est la personne qui nous intéresse, pas le personnage. C’est sa présence que nous voulons montrer plutôt que de lui demander de faire semblant d’être un autre dans un autre espace et un autre temps. »
Groupe humain, paysage
The Record se présente comme un paysage de gestes et de parcours où seule la synchronisation entre tous les performers génère un effet de groupe, mais sans jamais gommer la personnalité et la qualité de présence de chacun. Une forme éminemment poétique dans le déroulement du spectacle qui ne laisse jamais oublier la portée politique d’une démarche où le groupe ne se confond pas avec la masse, où la simplicité des actions et des déplacements s’harmonise entre tous, justement parce qu’elles s’inscrivent du début à la fin dans un cheminement individuel où l’autre ne fait pas obstacle.
Inutile de dire que la poésie naît ici d’une partition extrêmement écrite, dans le temps et l’espace. « Chaque performer suit un script et sait exactement quoi faire et quand, précise Michael Silverstone. On leur demande deux choses : être présent et exécuter leur partition. Voir le public et avoir conscience d’eux-mêmes. Il s’agit simplement de faire et d’être. Les mouvements qu’ils doivent faire sont très simples, n’importe qui peut les réaliser, mais une fois réunis sur le plateau le jour de la première, ils créent une architecture de groupe où le corps n’est jamais figé. »
Une démarche qui évoque à la fois la sculpture sociale de Joseph Beuys et l’activité du regardeur qui crée l’oeuvre de Marcel Duchamp. « On estime que le public s’ennuie quand on cherche à lui imposer des personnages. On ne prétend pas jouer, mais on demande aux spectateurs d’interagir avec les performers par le regard, par l’attention portée à la forme qu’on lui présente. Et si on donne peu de représentations de The Record, c’est pour garder cette électricité du soir de la première quand tous les performers sont réunis pour la première fois sur le plateau et devant le public et qu’ils découvrent la musique live qui les accompagne. »
The Record, 600 Highwaymen, les 24 et 25 mars à 19h, Grande H alle de La Villette, dans le cadre de L’esprit de groupe, et les 27 et 28 mars au Centre Pompidou.
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