A mi-chemin entre l’école d’art et le circuit institutionnel, le salon de Montrouge propose chaque printemps sa sélection des nouveaux talents de l’art contemporain. A retrouver chaque semaine pendant cette 63e édition, un gros plan sur un jeune artiste.
Né en 1987, Baptiste Rabichon vit et travaille à Paris. A la croisée de l’argentique et du numérique, son travail explore les possibilités du médium photographique.
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C’est un travail proche de l’artisanat ou de l’ingénierie de pointe, tant il implique une maîtrise presque virtuose de procédés complexes. Plus que de la débrouille, un art de l’expérimentation : c’est elle qui guide ce jeune artiste géniteur de « photographies sur la photographie » et sondant ses profondeurs, auscultant ses limites et ses recoins. Qu’il réalise des natures mortes articulant photogrammes argentiques et numériques, qu’il capte des traces de doigt et traînées de poussières sur l’écran d’un smartphone, ou projette des diamants sur du papier photo, Baptiste Rabichon explose et expose les réalités kaléidoscopiques des images. Il est clair qu’avec lui les artistes n’ont pas encore épuisé toutes les possibilités intrinsèques de la photographie, qu’il faut continuer à la démembrer, tenter sans relâche de nouvelles choses pour faire apparaitre une autre vision. Une nouvelle réalité, peut-être.
Il est d’ailleurs intéressant de noter que les œuvres de cet artiste, nourri par Marcel Proust, ne révèlent jamais vraiment le pixel. Et lorsque le flou apparaît, il est ténu, comme un brouillard léger à la limite du visible. Ses œuvres sont comme l’écran plasma nouvelle génération : irréelles, HD, claires et nettes. Parfois si nettes, qu’elles retranscriraient quelque chose de l’expérience du surgissement d’une image dans notre œil. Baptiste explique désirer « produire des images qui documentent notre perception, des fragments invisibles à l’œil nu, des images qui collent au réel« . D’où son intérêt pour le scan ou encore les photogrammes, fruits d’un contact entre un objet et un papier photographique. A Montrouge, il en présente quelques-uns, où se confondent la silhouette de sa compagne et des fleurs glanées dans le XVIIe arrondissement.
Enregistrer des phénomènes invisibles à l’œil nu
Ce qui intéresse Baptiste Rabichon, ce n’est pas tant de s’approprier des images déjà existantes comme de nombreux artistes de sa génération attentifs à la production effrénée d’images online, mais de le faire à l’ancienne, « d’enregistrer des événements, plus ou moins mis en scène, et que seul le papier photo peut voir et retranscrire« . Il est « toujours ému, malgré l’omniprésence de la photographie dans nos vies, par son apparent pouvoir magique« .
Baptiste Rabichon présente également à Montrouge des tirages au rayon X : des natures mortes réalisées en détournant un scanner d’aéroport. Un détournement conscient de l’outil symptomatique de nos années Vigipirate ? Probablement, mais Baptiste ne réduit pas ses explorations à un thème, une critique ou à une technique, au contraire il les multiplie. A travers des photos minimales ou des images complexes demandant plusieurs mois de travail, il se fraye un chemin singulier, ou plutôt des chemins pluriels et tentaculaires dans les territoires de la photographie et de l’histoire de l’art. Ses séries Les Discrètes et Braquages reprenaient respectivement les motifs de La Mariée de Duchamp et de tableaux cubistes.
Salon de Montrouge, jusqu’au 23 mai. Au Beffroi, 2 place Emile Crespin, 92120 Montrouge. Entrée libre, tous les jours de 12h à 19h.
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