Renouant avec les souvenirs d’une enfance tarbaise, Jonathan Capdevielle invente un théâtre de l’introspection aussi sensuel et fascinant qu’un conte des frères Grimm.
Au départ, ce ne sont que quelques caractères d’imprimerie (ceux qui s’inscrivaient en lettres de lumières sur les écrans noirs des premiers ordinateurs) qui viennent, à la manière de bugs de plus en plus envahissants, parasiter la pénombre de la nuit qui transforme la cage de scène en un insondable trou noir.
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A la manière des observateurs calant l’optique de leur télescope vers les zones les plus sombres de l’espace pour remonter aux origines de l’histoire de notre univers… Jonathan Capdevielle reprend son premier clavier pour remonter le mot à mot du temps avec son spectacle Saga, et retrouver l’innocence du regard qu’il posait sur le monde dans cette Bigorre sauvage où, entre Lourdes et Tarbes, il a passé son enfance.
Comme dans les contes de fées, l’action se passe dans une grande maison isolée, une bâtisse perdue à la lisière de la forêt. L’endroit idéal pour renouer avec cette bulle protectrice de l’enfance qui fait du petit Jonathan le témoin innocent de la dangerosité des frasques des adultes qui l’entourent… On le retrouve partageant l’intimité du couple formé par sa grande sœur et un amant qui n’a qu’un défaut, celui de se révéler être un expert en bricolages douteux, flirtant avec les frontières de la légalité. Alors que ces aînés donnent simplement à Jonathan l’impression de passer leur temps à jouer aux gendarmes et aux voleurs, la paix régnant dans ce paradis libertaire va faire long feu le jour où il s’aperçoit que lorsqu’une aventure se déroule dans la réalité, elle peut aussi s’achever, comme au Monopoly, par la douche froide d’un passage par la case prison.
Le pays des merveilles de l’enfance
Sur le plateau nu, la masse impressionnante d’une réplique d’un pic des Pyrénées prend les allures de gros gâteau tout juste sorti du four, une madeleine géante apte, elle aussi, à convoquer les souvenirs. Tirant sur le fil d’une mémoire qui dévide sa pelote dans l’animation de personnages semblables à des figurines décoratives ornant le morceau de bravoure pâtissier, sa sœur apparaît telle une poupée en habits traditionnels qui serait devenue experte dans l’ascension des falaises à mains nues. La voici bientôt rejointe par un immense ours en peluche qui gambade en liberté et par des randonneurs à poil portant des sacs à dos, tandis qu’en contrebas, un rugbyman semble devoir rester pour l’éternité suspendu dans les airs, dans le temps arrêté de l’instant de gloire où il marque son essai.
Jouant avec ces épisodes épiques restés dans sa mémoire, comme il le ferait avec les poupées retrouvées d’un coffre à jouets, Jonathan Capdevielle nous invite avec humour à découvrir ce que fut son pays des merveilles. Une délicieuse expédition au cœur d’un paysage de pure fantaisie qui démontre qu’il est possible de grandir sans rien oublier de cet état de conscience de l’enfance qui rend si magique la chronique non censurée de la moisson d’émois qu’il nous livre aujourd’hui.
Saga, conception et mise en scène Jonathan Capdevielle. Avec Jonathan Capdevielle, Marika Driestadt, Jonathan Drillet, et Frank Saurel. Centre Pompidou, grande salle, du 4 au 7 mars.
En tournée
Les 11 et 12 mars au TAP, Scène Nationale de Poitiers, les 18, 19 et 20 mars à L’Arsenic – Lausanne, le 24 mars au Théâtre d’Aurillac, le 27 mars au Théâtre des Salins, scène nationale de Martigues, le 7 avril à L’apostrophe, scène nationale de Cergy Pontoise et du Val d’Oise, le 10 avril au Manège à Maubeuge-Mons, du 15 au 18 Avril à la Maison des Arts de Créteil, les 22 et 23 avril à la Scène nationale d’Orléans, les 12 et 13 mai au Quartz, scène nationale de Brest, les 11 et 12 juin au festival Latitudes contemporaines en coréalisation avec la Rose des vents à Villeneuve d’Ascq.En septembre 2015 au festival Actoral à Marseille.
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