Rubrique hebdomadaire du 22 au 29 novembre
Le théâtre de Nanterre-Amandiers met les bouchées doubles : pas moins de quatre spectacles démarrent cette semaine : A nous deux maintenant de Jonathan Capdevielle, du 23 novembre au 3 décembre, et deux créations de Vincent Macaigne : Je suis un pays … et Voilà ce que jamais je en te dirai, du 25 novembre au 8 décembre (voir les articles de Fabienne Arvers et Patrick Sourd dans Les Inrockuptibles du 22 novembre).
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Enfin, Jacques Osinski y crée Lenz de Georg Büchner (du 23 novembre au 3 décembre) avec un acteur hors pair, Johan Leysen. Seul en scène, celui-ci nous fait entendre le récit inachevé écrit par Büchner à 22 ans. “Le jeune écrivain regarde son prédécesseur Lenz, figure majeure du ‘Sturm und Drang’, malheureux poète devenu fou, déclare Jacques Osinski. Il se lance sur ses traces, parcourt les montagnes que l’autre a parcouru, se plonge dans les cahiers du pasteur Oberlin qui avait recueilli le poète et fait, à partir de tous ces matériaux, un récit qu’il ne terminera pas. Cet assemblage de matériaux, cette forme inachevée donnent au texte une grande modernité. La nouvelle mêle l’objectivité d’Oberlin et la subjectivité de Büchner. » Les montagnes sont présentes, filmées sur deux saisons, par le vidéaste Yann Chapotel.
Festen, le film du Danois Thomas Vinterberg qui reçut le prix du jury au festival de Cannes en 1998, n’a pas fini d’inspirer les metteurs en scène de théâtre qui remettent régulièrement le couvert pour cette soirée d’anniversaire qui, le temps d’un repas, va révéler son lot de secrets inavouables. Aujourd’hui, c’est Cyril Teste et son collectif MxM qui en proposent une version décapante à l’Odéon – théâtre de l’Europe, du 24 novembre au 21 décembre. Il y aura un vrai banquet et le théâtre conviera le cinéma en proposant une performance filmique réalisée en temps réel. « Festen va s’écrire comme un plan-séquence dans lequel, grâce à un steadycam, le chef opérateur traverse les murs, les fenêtres, les miroirs pour suivre le récit, indique Cyril Teste. Le décor sera en mouvement et les miroirs sans tain pour ouvrir le champ sur d’autres pièces de la maison. »
» Un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité.« Prenant au mot la parole de l’astronaute Neil Amstrong, Robert Lepage a conçu et interprété en 2000 La Face cachée de la Lune, un spectacle qui ne vieillit pas, comme le rêve d’ailleurs de l’humanité. Il le reprend aujourd’hui à La Villette du 24 novembre au 2 décembre et confie son rôle à l’acteur Yves Jacques. Un récit autobiographique qui se remémore les premières images de la conquête spatiale et convie d’autres personnages, d’autres fictions à s’insérer dans son monologue, accompagné aussi par une vidéo dans laquelle un homme dialogue avec un extra-terrestre. Fantaisie et poésie avancent ici main dans la main.
Le théâtre équestre fait décidément parler de lui aux approches de l’hiver… J’accrocherai sur mon front un as de cœur est une création réunissant la compagnie de cirque équestre Pagnozzo et la metteuse en scène Anne-Laure Liégeois (au Théâtre Firmin Gémier / La Piscine du 24 novembre au 23 décembre et du 26 au 28 janvier à Goussainville). De cet univers inconnu, Anne-Laure Liégeois a d’abord cherché à comprendre « leurs sentiments et leurs sensations » avant de revenir à sa base, le théâtre : » Cette fois-ci je raconterai aussi une histoire mais avec d’autres mots : ceux du geste, du mouvement, de la prouesse, ceux du cheval. Son silence, le bruit de sa course, son dialogue intense avec l’homme, tout cela sans les mots, sans la parole. » Mais avec un thème, né de son travail, au moment des répétitions, pour la création de On aura tout au festival d’Avignon : » Le sujet de l’immigration est venu imprégner le spectacle qui s’est resserré autour du thème du besoin de l’autre. Ensuite est née une histoire simple, celle d’un cirque plongé dans une sorte de mélancolie jusqu’à l’arrivée de l’Etranger… »
C’est encore l’autre qui irrigue la dernière création des chorégraphes Hafiz Dhaou et Aïcha M’Barek, Narcose, présentée au Tarmac du 22 au 25 novembre. Le titre se réfère à cet état du cerveau qui, privé d’oxygène, provoque des hallucinations et altère la conscience. Une métaphore pour désigner l’état d’une société qui se radicalise et pas seulement d’un point de vue religieux. Pour Aïcha M’Barek, » la radicalisation, ça veut dire abandonner ce que j’ai pour aller vers un ailleurs, même si je ne maîtrise pas ce que je vais accomplir, atteindre et ce que ça peut provoquer dans ma vie« . A quoi Hafiz Dhaou ajoute : » La narcose est le reflet de cette société qui s’appauvrit en oxygène. Quand je dis oxygène ici, je veux dire l’autre, l’humain et ce qu’il irrigue et diffuse. A l’inverse de nos pièces précédentes qui se posaient en miroir de la société, témoignaient de l’état du monde, celle-là va se concentrer sur l’individu. »
Mis en place par Christian Schiaretti au TNP de Villeurbanne, la mission de formation et de transmission a réuni 4 jeunes metteurs en scène – Julie Guichard, Louise Vignaud, Baptiste Guiton et Maxime Mansion – pour une période de trois ans durant laquelle ils reçoivent un apport de coproduction, bénéficient de l’infrastructure du théâtre pour répéter, construire les décors et réaliser les costumes. Ils participent également à la vie du théâtre et développent des projets sur le territoire.
Le premier spectacle présenté dans ce cadre est Nos cortèges de Perrine Gérard, mis en scène par Julie Guichard (du 16 novembre au 13 décembre au TNP). Une fable contemporaine située dans une ville du Nord » qui connaît des averses qui s’incrustent dans le bitume davantage qu’elles lavent la douleur « . Elle réunit trois personnages, un frère et une sœur, Tristan et Ariane, et une connaissance lointaine qui ressurgit, Dolorès. Chacun doit vivre avec une perte et y faire face, se confronter à la catastrophe et y réagir, quitte à faire advenir « l’histoire commune d’une monstruosité non préméditée« .
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