Alors qu’il fait ses armes sur France Inter et au Point Virgule, à Paris, on a parlé avec ce nouvel ami belge des discriminations dans l’humour, de journalisme et, bien sûr, de Louis C.K.
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Tu te revendiques clairement du stand up américain ?
Bien sûr. Je n’aurais jamais imaginé faire de l’humour avant de découvrir Louis C.K. Ce n’est pas évident de monter sur scène, ça ne va pas de soi, même si ça se banalise. On a tous un pote ou un pote de pote qui fait de l’humour, ce qui n’était pas le cas il y a quinze ans. A l’époque, ils étaient huit et basta. Après, tout le monde ne fait pas carrière. Le problème de ce métier, c’est durer, et ne pas se décourager. Ceux qui réussissent dans l’humour, c’est généralement ceux qui persévèrent.
Tu as été journaliste puis DA de boites de nuit. Comment tu t’es retrouvé à monter sur scène ?
Je venais de me faire larguer par une fille dont j’étais très amoureux. Professionnellement, j’étais également au fond du trou : la boite pour laquelle je travaillais venait de faire faillite. Je suis sorti intellectuellement lessivé de cette expérience. Il y a encore quatre ans, je vivais chez des potes ! Je n’avais plus rien. Je continuais seulement à faire quelques piges dans un magazine. Et donc voilà, comme il ne me restait plus grand-chose, il fallait que je fasse un truc qui change ma vie. Je me suis dit que la scène pourrait être cette bulle dans laquelle se réfugier.
Tu fais des liens entre le journalisme et l’humour, que tu pratiques aussi à la radio ?
Les cinq questions « qui ? quoi ? comment ? où ? pourquoi ? », tu les appliques généralement quand tu racontes une histoire dans un sketch. Dans une chronique, il y a une idée, un angle. Ce qui est excitant dans le journalisme, c’est d’observer un fait sociétal incongru. Et c’est pareil dans l’humour.
Il y a une tristesse dans ton écriture. C’est très « stand up américain », encore une fois.
Quand j’exerçais en tant que journaliste, j’écrivais beaucoup sur les séries. C’est comme ça que j’ai découvert Louis C.K., avec Louie. Ça m’a bouleversé. Je n’avais aucune culture du stand up américain, à part Seinfeld, de loin. Louis C.K. m’a beaucoup parlé humainement. Je me suis rendu compte que moi aussi je me sentais seul, parfois dégueulasse, et que je n’étais pas heureux de ce que j’étais. Réussir à faire rire avec ça, ça m’a beaucoup impressionné. L’idée de faire moi-même du stand up a commencé à germer comme ça, sans évidemment vouloir être une imitation de Louis C.K. Ce qui est intéressant, ce que je veux partager, c’est ce qui va mal.
Tu es parfois trash mais tu as toujours le souci de ne pas discriminer, comme c’est souvent le cas dans l’humour en France.
Le problème avec les clichés, c’est de les véhiculer au premier degré. Moi aussi je joue avec les clichés – les femmes qui conduisent mal, par exemple. Mais je les véhicule justement en tant que clichés. J’essaye de provoquer un travail intellectuel sur le public. Concernant les discriminations, j’y pense au quotidien. Ma réalité à moi, c’est celle d’un homme blanc hétérosexuel. Et même si je n’ai pas eu une enfance évidente, et que je suis loin d’être un bourgeois, je sais que je suis un bobo qui vit confortablement.
On est en train de changer de paradigme. La société change. Les gens ne sont plus prêts à rire de certaines choses de la même façon. Mon sketch sur le viol, par exemple, ce n’est pas pour me moquer des femmes qui se font violenter. Au contraire : j’essaye de comprendre comment certains hommes ont pu intégrer le fait que c’était normal de faire ça.
propos recueillis par M. de A.
spectacle Guillermo Guiz a un bon fond, mercredi, 21 h 15, au Point Virgule (Paris IVe)
chronique La Drôle d’humeur de Guillermo Guiz, vendredi, 11 h 20, sur France Inter
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