Mathieu Amalric filme l’extraordinaire chanteuse Barbara Hannigan en répétition et lors de ses troublantes séances d’échauffement. Une deuxième Barbara pour le cinéaste amoureux de femmes et des voix.
Filmée en gros plan, une belle femme à la chevelure auburn, au visage grave et sans apprêt, émet murmures et gémissements, entrecoupés de longs hululements qui enflent peu à peu pour finir par une déchirante note aiguë. La jeune femme plaque ses paumes contre son bassin et son bas-ventre, caresse ou tentative d’apaiser une souffrance ? Quelque chose entre douleurs de l’enfantement et plaisir érotique.
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“La troublante anomalie du chant”
Avec ces images énigmatiques, la caméra de Mathieu Amalric nous dévoile la longue séance d’échauffement de la musicienne canadienne Barbara Hannigan, avouant sa fascination pour ce “mystère” : “D’où viennent ces voix inhumaines ? D’où, dans le corps, la troublante anomalie du chant prend-elle sa source ?” Le cinéaste, dont on connaît la passion pour les femmes puissantes, nous offre, après Barbara, Jeanne Balibar et les strip-teaseuses du “New Burlesque”, ce portrait magnifique d’une artiste au travail.
Une “vocation » pour la musique contemporaine
Chanteuse et cheffe d’orchestre phénoménale, Barbara Hannigan est à l’honneur en France ces jours-ci, et c’est bien mérité pour cette musicienne qui a choisi de se consacrer à la musique contemporaine, un genre trop peu connu, faussement considéré comme hermétique et élitiste, alors que comme pour toute forme d’art un peu exigeante, il suffit d’un minimum de curiosité et d’écoute attentive pour en découvrir les richesses.
“Très tôt, à 17 ou 18 ans, expliquait la chanteuse au site Forum Opéra, j’ai compris que j’étais passionnée par la musique contemporaine, passion dont je voyais bien que peu de gens autour de moi la partageaient, et c’est très consciemment que j’ai décidé de servir cette ‘vocation’.”
Elle a su heureusement rencontrer les personnalités capables d’épanouir cette passion et elle est devenu une sorte de muse pour de nombreux créateurs, qu’ils soient metteurs en scène comme Krzysztof Warlikowski, conducteurs comme sir Simon Rattle et bien d’autres.
Une hilarante interprétation de Ligeti
Elle-même, en plus de ses extraordinaires capacités vocales, de ses talents de comédienne – comme on peut le voir dans cette époustouflante et hilarante interprétation du Grand Macabre de György Ligeti –, tient à son tour la baguette pour diriger – et chanter en même temps – le Lulu-Suite d’Alban Berg, également filmé par Mathieu Amalric dans un passionnant documentaire : Premières répétitions diffusé par Arte.
La musicienne était omniprésente ces jours ci sur les ondes et sur scène: une soirée “Barbara Hannigan and Friends” était programmée le 25 septembre, une journée spéciale lui était consacrée le lundi 2 octobre sur France Musique, et le 8 octobre, elle était au centre d’un concert tout entier consacré à la figure de la Femme, avec des œuvres allant de Debussy à Gerschwin. Des pièces que l’on retrouve sur son premier album en tant que chanteuse et chef, sorti en septembre dernier, et bien nommé Crazy Girl Crazy.
CD Crazy Girl Crazy.
Crazy Girl Crazy Tour avec l’orchestre Ludwig en tournée en décembre
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