Chambre d’écho aux textes des patients des institutions psychiatriques, cette création musicale et poétique plonge le spectateur au cœur de la psyché troublée.
Prospecteur pionnier des œuvres produites par la marginalité sociale et à l’origine de l’expression “art brut”, Jean Dubuffet organise la première exposition dédiée à cette pratique en 1949. Dans le catalogue de l’événement, l’artiste en précise la définition, justifiant le rassemblement de créations artistiques considérées en son temps comme illégitimes. “Nous entendons par là des ouvrages exécutés par des personnes indemnes de culture artistique.”
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Explorant le versant littéraire de cette production hors norme, Olivier Martin-Salvan et Philippe Foch s’aventurent, avec [ʒaklin] Jacqueline, écrits d’art brut, dans le chaos des textes produits par des patients de diverses institutions, dont l’hôpital psychiatrique Sainte-Anne à Paris.
Ecrits bruts, ouvrage de référence de Michel Thévoz, devient une Bible dans laquelle ils puisent pour sélectionner une déferlante hétéroclite de témoignages, aussi poétiques qu’hallucinés.
Pour cette plongée en apnée dans les eaux troubles de la démence, nos deux explorateurs des âmes en souffrance se sont réparti les rôles. Habitant une cage métallique semblable à celles que l’on plonge en mer pour observer les mœurs des requins, le musicien Philippe Foch teste ses talents de percussionniste en faisant résonner tout ce qu’il trouve à portée de main.
Le reclus volontaire passe des grincements d’un archet frotté sur le grillage à la caresse d’une peau de tambour, s’arme de fagots de bois pour flageller ce qui l’entoure ou aiguise nos sens à l’épreuve de diverses pierres, composant en direct une bande-son dissonante et bruitiste.
Sainte colère et rage humoristique
Monstre des profondeurs, drapé dans les remous colorés d’un vestiaire qu’il traîne en permanence dans son sillage, Olivier Martin-Salvan tourne autour de cette cage comme un grand prédateur venu des abysses de l’inconscient collectif. Changeant sans cesse d’apparence en tirant parti de son inquiétante silhouette, il se mêle au concert en soufflant dans des tubes d’acier desquels s’élève un chant de baleines empli d’un désespoir immense.
A fleur de peau lorsqu’il prête sa voix aux diverses suppliques de ses auteurs, son incarnation parfois frôle la possession, quand il fait entendre l’unisson de la sainte colère exprimée dans les missives touchantes qui témoignent de leurs délires. L’urgence impérative d’écrire se mêle alors à une rage humoristique qui multiplie, pour notre plaisir, les bras d’honneur à l’ordre établi.
[ʒaklin] Jacqueline, écrits d’art brut d’Olivier Martin-Salvan et Philippe Foch. Les 28 et 29 janvier, Maison de la Culture, Bourges. En tournée jusqu’au 29 mai
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