Entre émotion et engagement, Montpellier Danse fête sa trentième édition, qui a des allures de festival des festivals.
Dans un livre anniversaire plutôt exhaustif, Jean-Paul Montanari, directeur de Montpellier Danse et adepte du franc-parler, résume sa position dominante :
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“Diriger un festival de danse, indéniablement, c’est choisir. Choisir avec discernement les artistes, non pas ceux qui vous plaisent nécessairement, mais ceux qui paraissent essentiels dans l’histoire de l’art en train de s’écrire sous vos yeux.”
Et le maître de cérémonie de conclure : “Car la danse fabrique sa propre histoire au quotidien.” Bien vu.
En trente éditions, Montpellier Danse n’a pas raté grand-chose des courants majeurs, de la postmodern dance américaine à la nouvelle vague française, de la danse conceptuelle et plasticienne plus récente au hip-hop triomphant. Seuls des noms comme ceux de Pina Bausch ou Alain Platel – et ce n’est pas rien ! – manquent à l’appel.
Ce n°30 a donc des allures de festival des festivals : Merce Cunningham pour une étape de son Farewell Tour, Trisha Brown, Régine Chopinot, Kader Attou, Anne Teresa De Keersmaeker ou des grosses machines comme le Béjart Ballet Lausanne, la Batsheva et le Nederlands Dans Theater. Quant à l’incontournable quoique insaisissable William Forsythe, il sera là à travers une minirétrospective de ses installations, dont cet imparable château géant et gonflable, White Bouncy Castle (voir la vidéo). On a les princes charmants qu’on mérite, après tout.
Mais c’est dans les interstices de cette programmation que l’on devrait trouver l’émotion dont parle Montanari lorsqu’il dit :
“Les soirs où je sais que j’ai touché juste, c’est quand j’entrevois cette espèce de rendez-vous d’amour, de sensualité, de frottement des corps dans un espace ouvert à ça.”
Des frottements à craindre autant qu’à espérer avec Germana Civera, Alain Buffard, le tandem François Chaignaud et Cécilia Bengolea ou les dialogues entre Mathilde Monnier et l’artiste peintre Dominique Figarella, ou entre Boris Charmatz et le musicien Médéric Collignon.
Autre forte tête, Fabrice Ramalingom, qui convie la reine Chloé, DJette et conceptrice d’albums electro remarquables, dans sa Pandora Box/Body. Ramalingom fait partie de cette génération de bébés Bagouet, de jeunes interprètes qui se sont frottés à l’art majuscule de Dominique Bagouet, fondateur de Montpellier Danse en 1981. D’une certaine façon, ce dernier, disparu en 1992, n’a jamais quitté le festival.
Plutôt qu’un énième hommage ou une autre reconstitution, c’est un auteur chorégraphique majeur, Raimund Hoghe, qui le saluera. Si je meurs laissez le balcon ouvert est un de ces titres frissons qui laissent augurer du meilleur. Hoghe, à propos des pièces de Dominique B., dit sobrement : “Je me souviens d’une sensation de tendresse et d’humanité dans son travail que je ne vois que très rarement aujourd’hui. C’est quelque chose de perdu, et c’est de cette perte que je voudrais faire partir ma création.” Perte et fracas donc pour ce Montpellier Danse de saison.
*Montpellier Danse(s), 30 ans de créations (Actes Sud), 39€
Montpellier Danse. Jusqu’au 7 juillet, tél. 0800.600.740
Et aussi : journée spéciale sur Arte le 3 juillet, documentaire et retransmission de spectacles (Merce Cunningham, Akram Khan, Alonzo King)
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